Let's be gay tonight • |

Mes paupières ne cessaient de papillonner tandis que la musique au sein du bar résonnait dans toute la salle. Je parvenais à peine à bouger alors que l’endroit dans lequel je me trouvais me paraissait si insensé. En premier lieu, cela semblait être un bar tout à fait normal mais ça, c’était avant que je vois cette espèce de travesti qui se donnait en spectacle, qui appelait les clients « mes choux » et que je fus obligé d’admirer la pièce avec plus d’attention. Il y avait des filles, des garçons, ensemble ou non mais surtout... Il y avait ce couple d’homme au comptoir qui ne cessait de se tripoter discrètement. Pareil sur la piste de danse. Bon okay, deux filles ensembles, ça pouvait être excitant... N’importe quel mec le penserait de toute manière mais deux hommes, non, c’était dégueulasse. N’avaient-ils donc aucune fierté ?

Un sourire se crispa sur mes lèvres quand l’un des serveurs, vraisemblablement gay aussi, vint me saluer moi et non mon amie qui m’avait accompagné. Je pouvais lire dans ses yeux ô combien il était heureux d’avoir un nouveau client et certainement qu’il avait déjà en tête de faire de moi sa prochaine proie. Hors de question ! Je lançai un regard horrifié à ma camarade qui n’avait pas l’air de remarquer mon désarroi. Ne pouvions nous simplement pas sortir de là ? Pourquoi elle m’avait emmené là tout d’abord ? Et pourquoi, moi, Takano Kai, me retrouvait dans un bar gay ? Qu’on vienne me sauver !

Erena. Tout ça était la faute d’Erena. Elle m’avait proposé une sortie, me disant que boire un verre ça pourrait être drôle. Je l’avais moi-même pensé. Avec tout ce qui m’était tombé dessus ces derniers temps, j’avais également besoin de décompresser. Elle m’avait parlé d’un club, soit disant réputé pour sa musique entraînante et le service qui était agréable. Je lui faisais confiance donc après m’être soigneusement préparé, j’avais accepté, la suivant naïvement. J’aurais dû trouver ça bizarre dés le début... Elle qui avait un sérieux problème avec les hommes vouloir sortir dans un club. Ce n’était pas logique. Sur le coup, j’avais songé que puisqu’elle était avec moi, elle s’était certainement senti en sécurité. J’avais tout faux. Tout faux ! Peut-être qu’elle était attirée par les femmes, d’où le fait qu’elle avait un étrange problème avec les garçons. Franchement, elle aurait pu y aller sans moi... Néanmoins, je me disais que je pouvais faire des efforts de temps en temps et que si la jeune femme avait envie de prendre un peu de bon temps, cela ne devrait pas me poser de soucis. Mais moi qui espérais me changer les idées, c’était fichu... Il n’y avait que des gays ici et j’avais l’impression d’être une bête de foire entre tous ces hommes en chaleur. Du moment qu’ils ne me touchaient pas ça irait mais si Erena m’abandonnait parce qu’elle avait rencontré quelqu’un qui lui plaisait, comment ferais-je pour m’enfuir ?

Une soirée jeux vidéos auraient été mieux. Je comprenais un peu mieux cette passion qu’avait la demoiselle d’ailleurs. Les lesbiennes sont en général un peu garçon manqué... Je venais de trouver l’explication.

- Tu aurais pu me le dire quand même que tu avais une préférence pour les femmes, Lui déclarais-je une fois à table, me penchant vers elle afin qu’elle m’entende.

C’était vrai quoi. On était ami non ? D’ailleurs j’aimerais savoir quel effet ça faisait. Et pourquoi elle préférait une femme plutôt qu’un homme. Surtout qu’honnêtement, au lit, il n’y a pas photo, c’est probablement mieux pour elle de le faire avec un homme. Y a plus de plaisir. Je ne comprenais pas néanmoins je trouvais ça particulièrement intriguant. Malgré le fait d’être coincé dans un bar gay, certes.

Pour l’ambiance ? Je n’avais pu m’empêcher d’arquer un sourcil. Comment pouvait-on aimer l’ambiance d’un tel endroit ? C’était tellement loufoque. Elle devait forcément être attirée par les femmes, il n’y avait pas d’autres explications à cela... Bon après, elle avait un sérieux problème avec les hommes - sauf moi - donc il était certain que ceux présents dans ce club ne lui ferait pas grand chose mais quand même... Personnellement, si j’avais un problème avec les femmes, ce n’est pas pour autant que j’irais dans un bar gay. Rien qu’à les voir se tripoter ça me donnait la nausée et je sentais mon corps tout entier se crispait. Peut-être aurais-je du accepté le tournage de ce film, cela m’aurait permis de voir leur monde différemment. Oui, parce que selon moi, les homosexuels et moi-même ne vivions pas sur la même planète. Comment un homme pouvait-il en aimer un autre ? Et puis franchement, se faire avoir par derrière, ça doit faire mal non ? Bien sûr, ils faisaient ce qu’ils voulaient, du moment qu’on ne me touchait pas moi, ça ne me posait pas de problèmes. S’ils pouvaient aller se rouler des galoches ailleurs ça serait aussi bien néanmoins mon amie avait eu la brillante idée de m’emmener dans un endroit rien que pour eux alors je n’avais pas réellement mon mot à dire. Ah... Pourquoi l’avais-je écouté ? J’aurais dû me douter que venant d’Erena, la proposition était louche.

Il y avait ce serveur en plus... Il m’intriguait. Non pas parce qu’il était mignon, je m’en fichais royalement de ça mais parce qu’il ne cessait de me regarder. Et voilà, il avait craqué sur moi. Une telle chose devait forcément arriver. N’importe où je me rendais, il fallait toujours que mon charme fasse des ravages. A croire que même chez les gays ça fonctionnait. La perfection n‘a vraisemblablement pas de limites. J’étais fier parce que cela ne faisait qu’augmenter cette confiance en moi cependant il y avait cette partie de moi qui en était un peu effrayé. Il n’allait quand même pas me violer hein ? Cette idée me fit grimacer discrètement et je ne m’apercevais pas ô combien j’étais tendu. Je n’étais pas un jouet, encore moins un morceau de viande et tous ces regards posés sur moi m’intriguaient autant que me dégoûter.

Cependant, malgré moi, je ne pus m’empêcher de sourire au barman qui venait de déposer nos boissons. J’étais assez paradoxal comme individu... Je n’avais pas envie que cet homme m’attaque avec ses pattes sales mais en contrepartie, je lui souriais parce que je savais que je lui avais tapé dans l’oeil. La fierté avant tout.
Après avoir trinqué avec ma camarade, je portai mon verre à mes lèvres avant de recracher ce que je venais d’avaler à l’intérieur. Toussant, je faillis m’étouffer en me demander ce que la jeune femme souhaitait dire par « J'pourrais te le présenter, si tu veux » Je n’avais pas envie qu’elle me le présente ! Machinalement, je lui lançai un regard ébahi alors que je ne comprenais réellement rien à l’attitude de ma camarade. Je ne voulais pas être ami avec ce mec gay et encore moins, et plus si affinité.

Un soupir s’enfuyant de ma bouche, je finis ma boisson rapidement avant de me sentir tirer sur la piste, au milieu de tous ces gays. J’étais encore plus tendus désormais surtout que je n’étais pas particulièrement doué en danse. On m’avait déjà dit que j’avais de super déhanchés, il fallait dire qu’avec mon métier, mes déhanchés étaient bien souvent travaillés. Seulement mis à part ça, je ne savais pas danser. Ou plutôt, je n’aimais pas danser. En particulier dans ce bar où les autres étaient collés à nous, ainsi que ce couple de garçon à côté de nous qui se déshabillait presque sur place.

« Ferme les yeux, Kai » étaient les mots que je me ressassais sans arrêt afin de me mettre dans l’ambiance et d’oublier le lieu dans lequel je me trouvais. Closant enfin mes paupières, je commençais à me laisser aller, ne touchant pas pour autant ma camarade parce que même si elle était à l’aise avec moi, je ne souhaitais pas qu’elle se fasse de fausses idées me concernant. Elle était mon amie... Une super amie et je ne voulais pas perdre cette amitié.

On dansait au fur et à mesure que la musique résonnait dans la salle à fond dans la chanson, Erena avait commencé à danser avec d’autres et moi, j’avais profité de ce petit instant de répit pour fuir la piste. J’avais lu dans son regard qui disait « vient avec nous » cependant il était évidemment hors de question que je les rejoigne.
Assis sur mon canapé, j’observais mon verre vide, hésitant à en commander un autre. Il y avait ce serveur et je refusais de lui donner de l’espoir même si je n’étais qu’un simple client. Gonflant mes joues, je grommelais intérieurement songeant au fait qu’Erena me paierait ça un jour. M’emmener dans un bar gay, sérieusement... Je voulais bien admettre que j’étais un peu désespéré ces derniers temps, que j’étais tracassé et que j’avais besoin de me changer les idées néanmoins de là à me tirer à la Gaypride, c’était tout de même abusé.

- Vous allez bien ? Me demanda une voix masculine.

Sur ses dires, je relevai mon regard devant moi et sursautai en reconnaissant le fameux serveur. Paniqué, je cherchais ma camarade de mes yeux mais ne la trouvai point. Il y avait beaucoup trop de monde. S’il me touchait, ce serait de sa faute à elle et je crierais au harcèlement sexuel. C’était dans son propre intérêt de ne pas me toucher. Ce n’était pas le nombre de gay qui manquait dans ce bar, qu’il aille draguer ailleurs seulement vu que j’étais ici, il se disait certainement que je l’étais moi aussi. Je m’apprêtais alors à lui révéler la vérité cependant le jeune homme me coupa dans mon élan, déclarant qu’il revenait et qu’il m’offrait un verre. Bon... Ca avait ses avantages mais non. Et s’il mettait quelque chose dans ma boisson ? On ne sait jamais... Il pouvait tenter de me droguer pour profiter de mon corps divin avec mon consentement.

- Tenez. Je vous ai servi la même chose que précédemment.

Je le remerciai d’un sourire crispé, un air un peu hésitant sur mon visage cependant au vue de son expression, il ne semblait pas être un grand méchant loup alors je trempai mes lèvres à l’intérieur. Ca faisait un bien fou et je laissai s’échapper un soupir de bien être qui le fit rire.

- Je suis Hiroki, enchanté.

Erena !! Au secouuurs !!! Ce mec était en train de me faire du rentre dedans, qu’étais-je censé faire ? Si je lui disais qu’il ne m’intéressait pas, que ferait-il de moi ? Je ne pouvais toutefois pas lui dire non plus qu’il m’intéressait si ce n’était pas le cas. Levant mes yeux au ciel, je me résignai à me présenter... Je pourrais très bien mimer plus tard n’avoir pas réalisé que je lui plaisais et qu’il souhaitait faire de moi son quatre heure. Ah... Mon dieu. Quelle horreur... Un frisson d’effroi me parcourut à cette pensée.

- Kai. Mais vous ne travaillez pas ?
- Je suis en pause pour l’instant, c’est mon amie là-bas qui me remplace, Expliqua-t-il en désignant une femme derrière le comptoir.

Zut. Il ne me lâcherait pas de sitôt et je n’avais aucunement envie de faire la conversation avec lui.

- Je ne t’ai jamais vu ici, c’est la première fois ?
- Oui, pourquoi ?

Sûrement la dernière aussi.

- Comme ça. Tu devrais penser à revenir plus souvent.

Mon unique désir était de prendre mes jambes à mon cou, de fuir cet endroit, d’aller voir Naoki et de pleurer ma situation. Je n’avais pas relevé ses mots, me contentant de lui sourire de la plus belle de mes esquisses - simple réflex - et c’était à ce moment là qu’Erena revint. Je ne pus que la fusiller du regard, elle m’avait abandonné et laissé seul avec ce type qui en avait après mon corps.

- Je peux te l’emprunter ? L’interrogea le prénommé « Hiroki » en m’indexant du doigt.

Sauf qu’il n’attendit pas de réponse, que se levant il m’obligea à faire de même en attrapant mon poignet. Horrifié, tandis qu’il me tirait, je regardais ma camarade en secouant vivement ma tête. Mes lèvres quant à elle ne cessait de mimer des « Il va me violer ! Il va me violer ! » et l’expression sur mon visage montrait à quel point elle devait me sortir de ce désastre. Je ne voulais pas mourir. Pas maintenant. J’avais encore tellement de choses à vivre. HELP !

Dansant non loin de Kai, elle remarqua que ce dernier semblait se détendre petit à petit. Il avait fermé les yeux et avait commencé à se dandiner de son côté. Elle sourit et continua de se déchaîner sur la musique. Elle s'était rapprochée d'Emi, une autre client, et avait commencé avec elle des mouvements qu'elles seules connaissaient. Elle avait rencontré Emi la première fois qu'elle était venue ici. Oh, elle pourrait raconter cette histoire à Kai plus tard. Elle avait espéré qu'il vienne les rejoindre, d'ailleurs mais il était retourné vers la table. Tant pis, elle danserait sans lui.
Elle continua de bouger en rythme avec la musique, alors qu'Emi se pencha vers elle et souffla un rapide « C'est ton petit-ami ? »
Elle ne put retenir son rire et agita sa main rapidement avant de nier.

« Non c'est un ami », dit-elle en regardant vers ce dit ami qui semblait avoir de la compagnie, « Et me regarde pas comme ça, je suis pas intéressée »

Tout en continuant de bouger, elle désigna Hiroki à sa camarade de danse et souligna que Kai devait lui avoir tapé dans l’œil. Elle ne releva cependant pas le fait que Kai était gay. Emi était assez grande pour comprendre que s'il était là, ce n'était pas pour décorer les murs.

Puis Emi partit finalement s'asseoir. Erena fit de même, en plus elle n'aimait pas spécialement la chanson qui passait. Elle se dirigea vers sa place, souriant à Kai en l'apercevant. Sourire qui s'effaça bien vite quand elle comprit que son ami ne faisait que la fusiller du regard. Qu'est-ce qu'elle avait fait ?
La voix de Hiroki se fit entendre et elle ouvrit la bouche pour répondre mais aucun son n'eut le temps de sortir qu'il était déjà parti en embarquant Kai. Ah. C'était quoi ce regard apeuré ?

Elle écarquilla les yeux. Elle avait complètement oublié que Kai était peut-être vierge ! Et que du coup, il n'avait pas l'habitude de se faire draguer comme ça. Encore un peu et elle se traiterait elle-même d'amie indigne. Elle se dépêcha pour rejoindre les deux jeunes hommes et tenta d'attraper la main de Kai. Elle ne put que la frôler, un jeune homme s'était mis sur son chemin. Trop emporté par la musique, il n'avait pas remarqué qu'Erena voulait passer. Elle regarda par dessus son épaule pour voir où était Kai et s'excusa pour passer.

Après quelques minutes de combat d'épaules, de bras et de jambes, elle arriva enfin aux côtés de son ami. Elle lâcha un léger soupir avant de capturer sa main dans la sienne. Elle lui sourit et se tourna vers Hiroki pour lui sourire à son tour.

« Je crois que ta collègue t'appelle », dit-elle en désignant quelqu'un vers le bar, « De ce que j'ai vu, il y a du monde, elle doit avoir du mal à gérer toute seule »
« Je vais y aller alors, merci », répondit le serveur en souriant à la jeune femme, « Je reviendrai », lâcha-t-il à Kai avant de lui offrir un sourire plein de promesses.

Hiroki les quitta rapidement. Puis, remarquant qu'ils étaient au beau milieu de la piste et qu'ils ne bougeaient pas, Erena garda la main de son ami. Ils retournèrent tous les deux à table. Elle lâcha enfin la main de Kai et se laissa presque tomber à sa place.

« La fille avec qui j'ai dansé avant, c'est Emi », avoua-t-elle soudainement en sirotant le reste de sa boisson, « Quand je suis venue ici la première fois, elle croyait que j'étais lesbienne. Bon, j'peux pas la blâmer pour ça, c'est pas écrit sur mon front. Et donc, quand je dansais, elle arrêtait pas de me toucher les fesses »

Elle se mit à rire doucement en y repensant. Il était vrai qu'elle ne pouvait pas en vouloir à la jeune femme. Pour chacune des personnes présentes ici, la personne qui franchisait ses portes était homosexuelle. C'était rare de voir quelqu'un d'hétéro dans les parages.
Elle regarda à nouveau son ami et sourit.

« Ici ce ne sont pas les hommes les plus pervers... mais les femmes. Au début j'étais étonnée, j'y croyais pas, mais c'est vrai ! Bon faut dire que pour les hommes, j'ai pas vraiment pu « tester » leur côté pervers, mais de ce que je vois et de ce que je sais, ce sont les femmes les pires »

Elle posa son verre vide sur la table et fit un grand signe de main à Hiroki qui se trouvait plus loin. Sauf que le serveur n'eut même pas besoin de venir. La main encore en l'air, une serveuse arriva et posa deux verres sur la table.

« C'est pour vous », dit-elle en regardant Erena, « de la part d'Emi »
Et Erena sourit tout en remerciant la jeune femme, avant de dire que son ami n'avait rien à boire. Elle n'eut pas vraiment le temps de finir sa phrase que Hiroki arriva et posa deux verres devant Kai.

« De la part des deux hommes là-bas », lâcha-t-il en les montrant d'un air blasé.

Erena se mit à tapoter l'épaule de son ami, comme pour dire « T'en as du succès ! » avant de remercier les deux employés qui s'en allèrent. Elle regarda les verres quelques instants avant de rire.

« Encore un peu et on pourrait faire un concours »

Elle fit un rapide clin d'oeil à Kai, le regard brillant d'amusement et de malice.
Elle prit son verre et avala quelques gorgées avant  de croiser le regard d'Emi qui était assise plus loin. Elle but quelques gorgées de sa boisson avant de lâcher un « Oh ![/color] », signe qu'elle venait de penser à quelque chose.

« Y a un nouveau jeu qui sort la semaine prochaine. Ca te dit qu'on se fasse une soirée jeux vidéos alors ? Chez toi ou chez moi, comme tu veux, tout me va »

Kai était l'une des seules personnes avec qui elle pouvait parler de jeux vidéos. Kai était quasiment l'un des seuls amis qu'elle avait ici. Puis en général, les jeux vidéos, ce n'était pas vraiment le truc des filles. Même Shinki, certaines ne s'intéressaient pas du tout à ça. Mais Erena, elle, avait toujours adoré ça. C'était à cause de son frère, avec qui elle passait parfois des journées entières à jouer aux jeux vidéos. C'était pour ça qu'une console portable l'accompagnait toujours partout. Sauf quand elle sortait danser comme ce soir, mais sinon sa console traînait dans son sac. Elle aimait jouer dans un parc, c'était calme... ça lui permettait souvent d'obtenir les meilleurs scores. En plus, c'était l'ambiance qu'il lui fallait pour dégommer le plus de zombies. Enfin bref, Erena adorait les jeux vidéos, elle en était accro et ne s'en cachait pas. D'ailleurs, le meuble près de sa télé dans le salon était plein de jeux en tout genre. Elle aimait tout : action, aventure, simulation, réflexion... Elle n'avait pas un genre précis et pouvait s'amuser avec tout et n'importe quoi.
Et pouvoir jouer avec Kai la motivait encore plus. Elle aimait jouer avec quelqu'un, ça permettait de passer de bonnes soirées à rire, c'était génial. Lui et elle devaient se faire ça prochainement, Kai  n'avait pas intérêt à refuser.

« Par contre, j'espère que tu es prêt à perdre contre une fille », continua-t-elle doucement, un sourire amusé aux lèvres.

Ce ne sont pas les hommes les plus pervers ? Elle se moquait de moi là. Comment lui faire comprendre que si, les hommes étaient particulièrement pervers. Et je ne parlais pas de moi. Dans un endroit comme celui-ci je n’avais aucune nécessité et encore moins aucune envie de l’être. Mais ils étaient tous vraiment obsédés avec leurs mains baladeuses ci et là. J’étais certain que ce Hiroki si j’étais rentré dans son jeu, il aurait déjà tenté de me violer. Son « je reviendrais » ne m’avait par ailleurs pas rassuré, je ne voulais pas qu’il revienne. Jamais. Je n’étais pas gay. J’aimais les femmes. Les belles femmes avec des formes bien comme il faut et pas avec un bâton entre les jambes. Lorsqu’il m’avait emmené danser, j’étais resté droit tel un piquet, incapable de le suivre alors que j’avais injurié Erena. Le serveur avait commencé à s’approcher de moi, soufflant des mots aux creux de mon oreille que je n’avais pas compris et que je n’avais pas eu envie de comprendre.

Heureusement pour elle - et surtout pour moi - mon amie avait enfin eu la bonne idée de venir me sauver et me tirer des griffes de cet homme. Je voulus lui répéter encore une fois qu’il était prêt à me violer, qu’elle ne devait plus me laisser seul, que je n’étais pas homosexuel et que j’aimerais m’enfuir d’ici cependant la jeune femme m’avait devancé commençant à parler d’une autre fille. J’avais écarquillé les yeux lorsqu’elle m’avait expliqué qu’on lui avait peloté les fesses. Cela ne lui faisait-il rien ? Bon en général, elles sont plus conciliantes sur ce genre de choses... Et c’était vrai que j’étais plus conciliant également quant il s’agissait de deux femmes. Si un gars osait me tripoter, je crois que, même si je n’aimais pas me battre, il volerait à l’autre bout de la pièce.

Et je grimaçai quand Hiroki revint, me donnant des boissons qu’on m’offrait. J’avais l’impression qu’ils avaient tous envie de me saouler... Hors de question de faire un plan à trois ou à quatre. Ils ne m’auraient pas comme ça. Je n’avais même pas soif. Enfin si, un petit peu seulement je n’étais pas rassuré bien que je souris, amusé, à mon amie. J’adoptais réellement un comportement paradoxal avec mes pensées. Probablement à cause de cette fichue fierté.

- Je ne perdrais pas ! Répondis-je au tac au tac en cognant ma main sur la table, la détermination se reflétant dans le creux de mes pupilles.

Je n’étais pas mauvais perdant toutefois j’étais un grand joueur et j’avais bien l’intention de la battre au jeux vidéo. On pouvait même rentrer et y jouer de suite si elle le désirait. Je serais moins crispé qu’ici.

- Mais quand tu veux ! Je suis toujours d’attaque pour ce genre de choses !

Pour d’autres aussi néanmoins je m’abstenais de lui déclarer cela. Finalement, je bus tranquillement mon verre, déclarant qu’à être si proche d’une fille, beaucoup se poserait des questions quant à son orientation. Je jugeai bon d’ajouter que moi je ne pouvais pas supporter ça, que rien qu’à l’idée de savoir que des gars s’intéressaient à moi m’hérissait le poil... Et que de ce fait, je ne la comprenais pas. C’était louche. Elle n’avait quand même pas l’intention de me faire devenir gay hein ?

Je comptais l’interroger lorsque je sentis une présence à côté de moi et sursautai en voyant à nouveau ce barman près de moi. Il était réellement revenu. Je lançai un regard désemparé à ma camarade tandis que le garçon, déclarant qu’il avait fini son service, s’approchait de moi pour me caresser la cuisse.

- Pourquoi ne pas rentrer chez toi alors ? Lui proposais-je en repoussant délicatement sa main.
- Tu viens avec moi ?
- Tu es un peu trop entreprenant comme gars.

Et j’aurais voulu me gifler intérieurement pour avoir répondu aussi vivement à sa rétorque, m’apercevant que de ce fait, Hiroki allait sérieusement penser qu’il m’attirait peut-être mais qu’il précipitait trop les choses.

- Désolé, Rît-il, Je ne sais pas comment agir quand quelqu’un me plaît.

C’était juste qu’il était jaloux des deux autres qui m’avaient offert un verre et qui nous observaient du coin de l’oeil accoudés au bar. J’avais comme un mauvais pressentiment... Un sacré mauvais pressentiment. Je le fis comprendre à Erena d’un regard, l’inquiétude se lisait dans mes prunelles... J’aurais aimé qu’elle m’aide, qu’elle dise quelque chose cependant je crois qu’elle était surprise par la situation. Ou peut-être qu’elle était émerveillé. Il ne manquerait plus que ça... Qu’elle soit fan de ces espèces de boys love et compagnie.

Des mains s’emparèrent de mes joues, m’obligeant à sortir de mes rêveries alors que mes paupières ne cessaient de papillonner à la sensation de lèvres contre les miennes. Qu’est-ce que... Par réflex, je répondis au baiser avant de me rendre compte de la situation quand des mains bien plus masculines que féminines se posèrent sur ma taille. D’un geste presque violent, je repoussai le garçon, ses fesses heurtant le sol.

- Ne me touche pas avec tes sales pattes !

De l’alcool. Il me fallait de l’alcool. Sans la moindre hésitation, je bus les deux verres cul sec. Je devais nettoyer mes lèvres, je ne savais pas avec quoi. Juste qu’il fallait que j’efface cette horreur de ma bouche.

- Je savais qu’on aurait pas du partir d’ici, Rétorquais-je en frottant vivement mon visage d’un revers de bras.

Une femme. Je voulais une femme. Mais une vraie femme. Ne réfléchissant pas, je contournai le serveur toujours à terre puis m’excusant auprès de ma camarade, je me penchai vers elle pour l’embrasser à mon tour.

- Désolé ! Ne me tape pas ! Je devais à tout prix enlever ça ! Et vu que c’est de ta faute, tu me dois bien ça !

Je souris, songeant que ses lèvres étaient bien plus douces que celles de ce type et priait intérieurement à ce qu’on quitte les lieux rapidement.

Elle sirota gaiement sa boisson quand Kai répondit qu'il ne perdrait pas. Ca se voyait qu'il n'avait pas encore goûté à la puissance d'Erena aux jeux. Son frère l'avait longtemps entraîné, si l'on pouvait dire les choses ainsi. Elle avait toujours réussi à battre ce dernier d'ailleurs. C'était étonnant pour une femme d'être aussi douée aux jeux vidéos. Elle savait que d'habitude, les femmes étaient ces petites choses qui n'osaient pas toucher aux manettes, ou qui  ne savaient même pas comment les tenir. Ca la faisait toujours glousser. Les hommes croyaient pouvoir la battre, toujours, à chaque jeu. Que ce soit un jeu de course, de simulation... Elle était douée partout. Ca devait être ça son talent.
Un petit rictus en coin, elle s'imaginait déjà battre Kai. Elle le regarda rapidement... Quoiqu'en y réfléchissant, elle allait peut-être avoir du mal à le mettre à terre, mais elle y arriverait. Elle devait y arriver. Rien que pour sa petite fierté.
Elle sourit simplement à son ami quand il avoua être toujours partant pour ce genre de choses. Elle aussi l'était. Ils auraient peut-être dû se faire une soirée jeux vidéos... Elle haussa rapidement les épaules, ils avaient le temps. Ils allaient encore se voir pour pouvoir faire ça.
Elle allait ouvrir la bouche pour demander à Kai s'il était partant pour faire cette soirée jeux vidéos tout de suite ce soir, mais la présence de Hiroki aux côtés du jeune homme lui fit ravaler ses paroles. Elle laissa les traits de son visage se plisser en une mine légèrement boudeuse avant de continuer à siroter sa boisson, savourant jusqu'à la dernière goutte. Elle se permit d'écouter la conversation d'une oreille distraite, et faisait mine d'être trop concentrée sur la recherche du fond de son verre. Elle fronça quelque peu les sourcils. C'était quoi ce rentre-dedans trop flagrant de la part de Hiroki là ? Eh oh, c'était son ami à elle d'abord. Elle était venue avec, elle repartirait avec, non mais. Si elle avait emmené Kai c'était pour lui faire rencontrer du monde bien sûr, mais pas pour rentrer toute seule non plus ; fallait pas déconner. Elle hocha positivement la tête à la phrase de son ami, oui, il était trop entreprenant. C'était pas bien. Et puis ce pauvre Kai était vierge, il fallait le comprendre... Il n'avait probablement pas l'habitude.
Elle déposa son verre plus loin sur la table et regarda les deux jeunes hommes. Elle offrit un sourire désolé à Kai, qui semblait à la limite du suicide. Il aurait dû lui dire qu'il était vierge !
Sa bouche s'ouvrit en magnifique et parfait petit « o » alors qu'elle voyait Kai et Hiroki s'embrasser. Elle resta un moment comme ça sans bouger et ne s'inquiéta même pas quand le serveur fut à terre. Ca avait été trop soudain, elle était prise au dépourvu, elle ne savait pas quoi faire. Et elle savait encore moins quoi faire quand elle sentit les lèvres de Kai contre les siennes. Elle le regardait avec des yeux ronds, les joues légèrement rosies, alors qu'il lui demandait de ne pas le taper.
Et là, ce fut le vide galactique dans l'esprit dans la jeune femme.
Son ami, qui était gay, venait de l'embrasser parce que le serveur, qui était gay lui aussi, l'avait embrassé. C'était quoi ce scénario louche de mauvais film porno ? Elle n'arrivait pas à comprendre pourquoi Kai avait réagi comme ça. S'il était gay, il devrait être content non ? Ah... Mais étant donné qu'il était vierge, le contact avait été trop brusque. Hiroko était donc une brute, cqfd.
Elle se leva soudainement tapant l'arrière du crâne de Kai d'un geste vif.

« Comment ça c'est ma faute ?! », dit-elle en posant ses mains sur ses hanches, Erena pas contente, « C'est sa faute à lui s'il a pas de tact, pas la mienne ! »
« Hey ! », se fit entendre Hiroki qui venait -enfin- de se lever, « C'est pas ma faute non plus ! »

Elle se tourna rapidement vers le serveur, lui lançant un regard froid tout en croisant les bras.

« Oh alors toi, la ramène pas ! J'crois que t'as assez fait de bêtises pour ce soir. Regarde Kai, il a l'air choqué. Et moi aussi d'ailleurs j'suis choquée. J'te pensais pas comme ça, limite vautour, à faire autant de rentre-dedans. J'ai presque l'impression d'avoir embarquer une petite biche toute innocente au milieu des loups »

Innocente et vierge, mais Erena se voyait mal le crier sur le serveur. Elle pensait tout de même à la fierté de Kai. Puis quel genre d'amie serait-elle si elle se mettait à chanter ça un peu partout ? Non, elle devait garder ça secret. C'était entre Kai et elle... même si le jeune homme ne l'avait pas clairement exprimé.

« Mais pour qui tu te prends ?! », lâcha le serveur.
« Et toi ? Tu te prends pour qui pour draguer mon ami comme ça et être à la limite le violer hein ! »

Elle lança un dernier regard plein de rage à l'employé du bar avant de se laisser tomber sur sa chaise, un léger « Pff » s'échappant de ses lèvres. Le serveur grogna contre elle avant de s'en aller. Elle regarda son ami d'un air attristé.

« Il va plus m'offrir de boissons maintenant, j'suis triste... », avoua-t-elle, « C'est un peu con parce que j'ai encore soif »

Elle fit signe à une serveuse qui passait par là et commanda un autre verre. L'alcool commençait à se faire sentir dans ses veines. C'était pas encore la grosse ivresse, disons plutôt qu'elle était juste un peu pompette.
Elle ne travaillait pas le lendemain soir, elle pouvait bien se permettre ça ce soir non ? Et puis, elle savait déjà qu'elle allait passer sa journée au lit. Heureusement pour elle, elle récupérait en général assez vite.

« Par contre, t'as plus intérêt à m'embrasser comme ça. Parce que sinon la prochaine fois... »

Elle fut interrompu par la serveuse qui venait de lui poser sa boisson devant le nez. Elle en oublia le reste de sa phrase, et les yeux pétillant d'envie, elle avala une nouvelle gorgée.
Ah... Erena contente.

Oui c’était amplement de sa faute. Parce que c’était elle qui avait eu l’idée d’un bar gay, personne d’autre. Et que si elle ne nous avait pas emmené là, on ne serait pas tombé sur un garçon complètement fou et amoureux de moi - quoi que ça, c’était possible. Néanmoins il n’aurait jamais pu imaginer que moi aussi j’étais également homosexuel vu qu’on serait dans un bar normal. Hors là, nous n’étions pas dans un bar normal et tous les gens qui nous entouraient étaient plus gays que bis parce que je ne voyais pas pourquoi un homme qui aimait aussi les femmes se rendraient dans un endroit pareil. Les femmes sont tellement mieux que jamais je n’aurais envie de moi-même me rendre dans un tel lieu. C’était stupide. Donc, c’était de sa faute.

Toutefois, je fus énormément stupéfait en la voyant s’exciter contre ce pauvre gars pour qui, tout à coup, j’éprouvais un soupçon de compassion. Je n’aurais pas aimé être à sa place, Erena paraissait réellement remonter. Et pour ne pas l’aider, j’acquiesçai d’un hochement de tête à tout ce qu’elle déblatérait, allant même jusqu’à froncer les sourcils lorsqu’elle déclara « limite violer ». Ce n’était pas limite. Il m’avait complètement violé. Je ne lui avais pas donné l’autorisation de m’embrasser tout d’abord, en général c’était moi qui prenait les initiatives et non le contraire. Cela me choquait moins dans ce sens là. La preuve, j’avais embrassé un gars une fois parce que j’avais envie de tester, voir si cela m’écœurerait puisqu’on m’avait proposé de faire aussi du porno gay. Et à dire vrai, j’avais trouvé cela complètement dégueulasse. Maintenant que j’y songeais... Le type en question... Mon premier baiser gay, c’était Ryuhei. J’avais embrassé mon frère. Génial. Bon de ce point de vue là, on ne pouvait pas considérer cela comme de l’inceste parce que, en premier lieu, ce n’était qu’un vulgaire bisou et qu’en plus, j’ignorais à ce moment là qu’il était mon aîné. Il s’agissait donc d’un petit baiser fraternel et vu ainsi, c’était moins choquant d’ailleurs.

Hiroki partit et je ne pus retenir qu’un soupir soulagé, priant à ce qu’il ne revienne pas à l’attaque d’ici quelques minutes. Mais il avait l’air d’avoir compris donc tant mieux. J’esquissai un sourire désolé à mon amie, levant mes bras en guise d’innocence quant elle me menaça mais les rebaissai aussitôt en voyant que son verre était tout à coup devenu intéressant. Elle ne m’effrayait pas tellement cependant je n’avais pas envie de me fâcher avec elle à cause d’un petit baiser... On pouvait prendre ça comme un petit bisou amical non ? Mes lèvres étaient tout aussi douces, elle aurait dû essayer de les apprécier et elle se serait aperçu que je n’étais pas si innocent que ce qu’elle imaginait. J’en venais d’ailleurs à me demander pourquoi elle songeait cela de moi ? Bon, parmi, cette horde d’hommes affamés, il était certain qu’à côté d’eux, j’étais purement innocent mais de là à me comparer à une petite biche, c’était un peu exagéré.

- Il n’y aura pas de prochaine fois, promis, Dis-je alors en sirotant ma boisson, C’est juste que franchement les gars c’est pas du tout mon truc ! J’ai l’impression de tomber dans une foire ici, ils sont tous à l’affut, c’est assez impressionnant.

Pire encore. Et c’était la dernière chose que je me rappelai avoir dite durant cette soirée, du moins le reste après avait commencé à devenir flou. Parce qu’on avait bu énormément donc tout ce brouhaha s’était troublé et sans que je n’eus le temps de réaliser, j’avais fini par m’endormir. Probablement que je m’en souviendrais mieux le jour suivant.

Les paupières closes, je grimaçai légèrement à la sensation des rayons de soleil qui passaient au travers ma fenêtre et ainsi donc effleuraient ma figure. D’un geste presque machinal, je me frottai les yeux que je peinai à ouvrir, un léger mal de crâne m’en empêchant. J’avais probablement trop bu la veille... Plus que de raisons. Toutefois, ce que je n’avais pas prévu - pour une fois - était que je me réveillerais en charmante compagnie... Enfin « charmante », elle le fut un peu moins lorsque je reconnus la jeune femme à côté de moi, tout juste recouverte d’un drap avec ses épaules nus dépassant quelque peu, et qui me contemplait d’un air tout aussi perdu que moi. Pour le coup, j’étais vraiment choqué. Il y eut un grand silence avant qu’on réalise vraisemblablement en même temps la situation et qu’on se mit à crier. Je crois que c’était la première fois que je criais autant... Cela ne me dérangeait pas de coucher avec des filles - ce serait le comble au vue de mon métier tient - mais avec elle oui. Elle était mon amie... Je la voyais un peu comme une soeur et jamais je n’avais eu de penser obscènes envers elle - pour une fois. Sûrement à cause du fait qu’elle avait cette « phobie » des hommes bien qu’elle a toujours été extrêmement tactile avec moi. De là à s’envoyer en l’air quand même, c’était un peu abusé... Je reconnaissais être un bon coup et qu’à force, je lui avais certainement fait trop d’effet qu’elle n’avait pu se retenir mais enfin... Elle aurait pu s’abstenir. En plus, je ne pouvais même pas me rappeler si ça avait été bien ou non. Dommage.

- On se calme, on se calme, Dis-je alors, ayant retrouvé mes esprits plutôt facilement.

De toute manière, même si c’était arrivé, on n’avait rien à se reprocher non ? Ce n’était pas grave, c’était humain. Et si vraiment elle aimait les hommes et qu’elle n’en avait pas eu depuis un moment, elle devait avoir quelques besoins à satisfaire. Je pouvais tout à fait la comprendre.

- Déjà, tu vas bien ?

Question stupide. Elle n’avait pas vraiment l’air d’aller bien donc je me repris aussitôt en m’excusant avant d’essayer de me rappeler. Toute la soirée me revenait en tête et en général, même après avoir bu, j’en garde mes souvenirs le jour suivant... J’avais le pressentiment qu’au fond, il ne s’était probablement rien passé néanmoins je n’en avais pas la certitude et mon esprit était bien trop troublé pour le deviner.

Je sortis alors du lit, nullement gêné du fait que j’étais presque nu moi aussi, simplement vêtu d’un sous-vêtement, lui donnant le plaisir d’admirer les courbes de mon dos tandis que j’apercevais mes affaires de la veille étendus sur le sol. Bon... J’ignorais quoi dire et quoi faire... Habituellement, les réveils matins au côté d’une jeune femme sont bien moins compliqué seulement je ne pouvais pas jouer le garçon qui avait passé une agréable soirée dans les bras d’une belle demoiselle puisque premièrement je ne m’en rappelais pas et deuxièmement, je me doutais qu’Erena, elle, quoi qu’il soit arrivait devait le regretter amèrement.

- Ecoute... Soufflais-je en me rasseyant sur le bord du lit et la regardant, On ne va pas se prendre la tête hein ? On avait sans doute un peu trop bu...

En réalité, ce que j’appréhendais le plus était qu’elle m’en veuille et me fuit après un tel évènement. Et je le refusais, je l’aimais bien. Elle était mon amie et ce serait stupide de se fâcher pour si peu non ?

Le silence était lourd. L’atmosphère pesante. Je n’osais même plus parler tandis que j’avais l’impression que les secondes devenaient des heures. C’était insupportable et je n’étais pas encore devin pour savoir ce qui se passait dans la tête de ma camarade en cet instant précis. L’unique chose que je pouvais entrevoir était l’expression sur son visage qui montrait ô combien elle semblait regretter et se le reproche. Ce que moi-même je peinais à comprendre... Etait-ce parce que nous étions amis, parce qu’elle ne s’en rappelait pas ou peut-être à cause de cette phobie qu’elle avait contre les hommes. Je souhaitais juste qu’elle parle, qu’elle me dise ce à quoi elle pensait, que je puisse l’aider, priant intérieurement à ce qu’elle ne m’en veuille pas. Je n’aurais sûrement pas dû boire autant... C’était bien la première fois que je me réveillai sans aucun souvenir. Il finirait par revenir, j’en étais certain tout comme j’avais ce fâcheux sentiment que nous n’avions rien fait Erena et moi. Pour le pratiquer tous les jours, bien que cela soit devenu habituel, en général, je suis encore capable de faire la différence entre un jour avec et un jour sans. Et ce, que je sois ivre ou non.

Moi-même, je me le reprochais d’avoir été si idiot parce qu’elle était la dernière personne que je souhaitais blessé. Si déjà elle avait un souci avec les garçons, je ne lui en offrais pas une meilleure image aujourd’hui. Bon, de toute manière, c’était exactement ce que j’étais... Parmi tous, au yeux des femmes, je devais être le pire. En générale, les filles sont un peu plus prudes que les hommes et les voir courir pour « s’envoyer en l’air », ça les dégoûte. Pourtant il ne s’agit là que de prendre du plaisir et de passer un agréable moment néanmoins j’avais parfaitement conscience qu’on ne pouvait pas être d’accord avec tout le monde. De ce fait, j’essayais de ne pas contredire les femmes qui étaient assez saine d’esprit et pensaient encore qu’on ne devait faire l’amour qu’après s’être marié. Rares sont celles qui ont cette vision de l’acte cependant, il y en a encore malgré tout. Et c’est une manière d’expliquer qu’il y a des personnes qui préfèrent le faire uniquement avec ceux qu’ils aiment et non pas, juste pour du plaisir. Ce qui au bout du compte était assez stupide... Je ne suis jamais tombé amoureux, j’aurais été triste de ne pas avoir connu ça jusqu’à aujourd’hui si j’avais songé ainsi. Hors, pour ma part j’admettais que ce n’était pas pareil, j’étais un acteur de films pornographiques. Même la notion de plaisir, je la ressentais différemment. Je ne la ressentais plus vraiment d’ailleurs. Bref, peu importe.

Prenant alors un jogging dans mon placard, je me retournai aussitôt en la voyant si inquiète. Je ne devrais pas toutefois cela me rassura de constater qu’elle espérait la même chose que moi. J’avais eu si peur de ça, sincèrement et l’entendre me dire qu’elle espérait que cela ne change rien entre nous m’enleva ce lourd poids qui me pesait sur la conscience.

- Ne t’en fait pas, Lui rétorquais-je d’une voix douce en m’approchant d’elle, Pour moi, ça ne change rien du tout.

Sur ses mots je lui embrassai le front, m’étonnant moi-même d’une telle tendresse. Après avoir enfilé le pantalon, je lui fis signe que je revenais et partis dans la cuisine, lui préparer un verre d’aspirine.

- Tiens, boit ça, ça te fera du bien, Fis-je ensuite en lui donnant la boisson, Si tu veux, regarde dans mon armoire, pour un vêtement et va te doucher. Je vais préparer de quoi manger, ça allégera aussi le mot de tête parce que le ventre vide, ça n’aide pas, d’accord ?

Je me sentais tellement inutile de la voir aussi... Triste ? Elle n’était pas comme d’habitude. Je la préférais lorsqu’elle me souriait, me racontait ses bêtises et sautait de partout. Dans un soupir discret, je m’accroupis en face d’elle, posant mes mains sur le matelas en guise d’appui.

- Si ça peut te rassurer, je pense qu’on n’a rien fait. Je veux dire, en général, ça se ressent ces choses là et puis... Regarde, on portait nos sous-vêtements tous les deux. Et je doute que éméchés comme on l’était, on aurait pensé à se rhabiller. Donc, cesse de culpabiliser s’il te plaît. Allez boit ça et ensuite, va prendre une douche, ça ne pourra te faire que du bien. Je t’attends dans la cuisine.

Un sourire sincère accompagna mes paroles tandis que me redressant, je lui ébouriffai amicalement les cheveux avant de quitter la pièce. J’espérais vraiment qu’elle finisse par aller mieux et ne se prenne pas trop la tête avec ça. Je voulais juste qu’on passe à autre chose et qu’on se retrouve, comme avant. Elle était importante pour moi. Même si notre rencontre avait été assez bizarre au début, j’étais content de l’avoir connu. Je ne souhaitais pas que cette amitié entre nous ne change.

Son regard ne lâcha pas Kai, et lorsqu'il s'approcha d'elle, sa main se serra à nouveau sur le bout de tissu. Elle avait vraiment peur de ce qu'il pouvait dire. Mais ce fut un soupir de soulagement qui quitta ses lèvres, sa main tombant mollement à côté d'elle sur le lit.
Elle ferma les yeux quand elle sentit la bouche de son ami contre son front, comme pour profiter de cet instant et sa vue se brouilla soudainement. Elle n'allait pas pleurer, non, mais ce simple geste semblait lui rappeler l'importance de Kai dans sa vie. Elle ne pouvait pas le perdre, ni le laisser s'en aller après ça. Qui est-ce qu'elle allait pouvoir battre aux jeux vidéos s'il n'était plus là, hein ? Qui allait l'accompagner dans un bar gay ? Personne. Il était le seul à pouvoir faire ça, l'un des seuls hommes qu'elle s'autorisait à apprécier, et l'un des seuls auquel elle s'était aussi autant attachée.  
Le coin de ses lèvres se releva légèrement, et elle rouvrit lentement les yeux. Elle comprit que Kai était parti dans la cuisine. Elle laissa un autre petit sourire venir peindre ses lèvres. Ce n'était pas encore ses sourires habituels, elle avait un peu de mal à se remettre de tout ça.

Mais une fois son ami loin d'elle, Erena se laissa à nouveau submerger par ses pensées obscures. Le fin sourire qui était apparu sur ses lèvres n'existait déjà plus et son regard se perdait dans le vide, refusant de s'accrocher à quelque chose.
Elle ne pouvait pas oublier qu'elle avait peut-être pris la première fois de Kai. Et elle se sentait encore plus mal en repensant au calme de son ami. C'était bizarre, d'ailleurs. Elle pourrait l'engueuler pour paraître si serein, mais au lieu de ça, elle s'en voulait presque d'être trop paniquée.
Elle quitta ses réflexions pour poser son regard sur Kai qui lui tendait le verre. Elle le prit doucement entre ses mains, faisant un signe de tête pour le remercier. Elle lâcha ensuite un léger « D'accord », d'une voix à nouveau basse, avant d'avaler le liquide.
Elle arqua rapidement un sourcil en voyant Kai s'accroupir à côté d'elle. Elle le regardait et buvait ses paroles comme s'il lui récitait les paroles de Dieu. Ses yeux ne pouvaient pas le quitter et le suivirent lorsqu'il se releva. Elle avait l'impression qu'avec ce geste, ébouriffer ses cheveux, son ami l'aidait à chasser ces idées noires qui lui plombaient le moral. Ce qu'il avait partiellement réussi à faire. Elle se tourna, pour dire quelque chose, mais ne tomba que sur le dos du jeune homme qui venait de sortir. Elle baissa alors la tête, et tomba nez à nez avec le verre vide.
Elle se mit alors à réfléchir aux paroles de Kai. C'était vrai, ils n'avaient peut-être rien fait, mais comment pouvait-elle en être sûre ? Ca se ressentait bien sûr, et ils avaient leurs sous-vêtements, mais les gens ne contrôlaient pas leurs actions en étant ivres. Alors, sur un coup de folie, ils auraient pu remettre ces vêtements-là.
Ou alors ils n'avaient rien fait, comme Kai venait de l'affirmer.
Elle soupira fortement, avant de se masser le front. C'était trop de réflexions et de questions dès le matin après une nuit trop arrosée. Elle posa le verre sur la table de chevet et quitta la chaleur des draps. Un long frisson la parcourut lorsque l'air frais de la pièce vint la frapper. Elle vérifia que Kai n'était plus présent à la porte et partit vers l'armoire. Elle l'observa quelques secondes avant de l'ouvrir lentement. Elle ne voulait pas fouiller ; elle n'aimerait pas qu'on fouille dans son armoire alors elle ne voulait pas fouiller dans celle de quelqu'un d'autre. Elle prit donc le premier vêtement -une chemise blanche- qui lui tombait sous la main et partit rapidement vers la salle de bain sans un regard en arrière. Elle ferma la porte et souffla un bon coup avant d'enlever le peu de vêtements qu'elle avait.

Une fois sous la douche, elle laissa l'eau chaude couler sur son corps. Les yeux fermés, elle soupirait régulièrement de bonheur ; l'eau lui faisait vraiment du bien. Ses muscles semblaient se détendre, même s'ils n'étaient pas très tendus au départ. Sa tête, ou plutôt ses idées avaient l'air de s'éteindre petit à petit, comme l'eau éteignait ce feu qui brûlait et qui lui ronger l'esprit. Elle ne faisait que se concentrer sur le bruit de l'eau qui tombait sur le sol de la douche, se laissant quelque peu bercer par cette mélodie.
Elle resta une bonne dizaine de minutes de plus sous la douche, puis s'extirpa de l'antre chaude et vaporeuse, s'enroulant dans une serviette douce.

Une fois séchée, habillée et la salle de bain remise un peu en ordre, elle sortit de la pièce pour se rendre dans la cuisine. Elle arriva à la porte et observa son ami. Elle passa sa main sur front, repensant au petit baiser de Kai, puis la passa dans ses cheveux, comme pour se souvenir de son autre geste. Elle ne savait même plus comment elle aurait réagi en temps normal face à ça. Là, elle avait envie de faire qu'une seule chose.
Elle franchit les quelques petits mètres qui la séparaient de Kai en quelques enjambées, et se retrouva face à lui. Elle ne fit et ne dit rien, elle alla simplement s'accrocher à lui, d'une manière presque désespérée, laissant ses bras se joindre dans le dos de son ami. Sa tête quant à elle, se posa avec douceur sur l'épaule offerte.

« Juste quelques minutes... »

On aurait pu penser qu'après cette nuit, Erena voudrait éviter tout contact avec Kai. Sauf que c'était tout le contraire. Elle avait tout simplement envie de le serrer dans ses bras, comme pour s'assurer qu'il ne partirait pas, pour le garder près d'elle. Elle voulait aussi se sentir rassurée, et en sécurité, et c'était ce que la chaleur de ce corps contre le sien lui procurait.
C'était aussi une manière à elle de le remercier, car il avait su trouver les mots et avait eu les bons gestes au bon moment.

« Je suppose que tu as raison. On a rien fait. Mais si c'est le cas, je suis quand même désolée »

Même si elle n'était pas totalement sûre qu'ils n'aient rien fait, elle avait envie de le croire quand il disait qu'il ne s'était sans doute rien passé. Elle préférait penser avoir paniqué pour rien, mais tenait tout de même à s'excuser, au cas où.
Elle recula d'un pas et se mit à sourire avant de venir pincer la joue de Kai avec une tendresse non dissimulée. Elle voulait juste faire ça pour l'embêter un peu, pour le voir sourire encore, pour le faire rire, pour qu'ils oublient aussi tous les deux la situation dans laquelle ils étaient, pour repartir dans la joie et la bonne humeur.
Elle tapa rapidement dans ses mains, son sourire n'ayant toujours pas quitté ses lèvres.

« Alors, qu'est-ce que tu as préparé ? », dit-elle en laissant son regard faire le tour de la cuisine, « J'espère que tu cuisines bien, j'ai suuuuper faim ! »

Dans la cuisine, pensif malgré tout, je réfléchissais à tout ce qu’il venait de se passer. Et j’avais mal au coeur pour elle. Je n’aimais la voir dans un tel état, elle m’avait tant habitué à mieux que la voir si décontenancée me faisait de la peine. Le plus dur était probablement le fait de se sentir si inutile... Puisque je ne me souvenais de rien et j’ignorais si je m’en rappellerais à l’avenir. Je l’espérais, plus pour elle que pour moi parce que je ne souhaitais qu’une chose, la rassurer. A mes yeux ce n’était pas bien grave néanmoins pour une jeune femme comme elle ça l’était certainement. Tout en préparant le petit déjeuner, j’essayais de trouver une solution pour la réconforter cependant mis à part agir normalement, j’ignorais comment me comporter. Nous étions amis elle et moi, je n’avais pas envie que cela change. Qu’on l’ait fait ou non, ce n’était pas dramatique du moment qu’on avait conscience mutuellement de nos sentiments non ? Je ne disais pas que j’en serais heureux, j’étais incapable de m’en rappeler toutefois, je ne m’en formalisais pas. Pour moi ce n’était qu’un acte comme un autre, ce n’était pas un symbole de l’amour ou je ne sais quelle autre définition pouvait avoir les utopistes à ce propos. Sûrement que les années écoulées avaient effacé toute bonne opinion que je pourrais avoir dessus mais c’était ainsi qu’était ma façon actuelle de concevoir les choses. J’espérais alors que tout s’arrangerait et qu’Erena ne culpabiliserait plus.

On avait malgré tout passé une bonne soirée si on omettait ce garçon gay qui en avait eu après moi, de ce que je me souvenais, on s’était bien amusé. Ceci dit, je refusais de remettre les pieds dans un tel endroit la prochaine fois ou alors qu’elle me prévienne avant, le temps que je me prépare psychologiquement... Finissant de préparer ce que je faisais, je me retournai en entendant des pas pénétrer dans les pièces mais fut étonné en sentant des bras s’entourer autour de ma taille. On amie avait toujours été facilement tactile avec moi, ce que j’avais toujours eu du mal à comprendre néanmoins c’était la première fois qu’elle effectuait un tel et geste et surtout, qu’elle me paraissait aussi désespéré. En silence, je renforçai l’étreinte et abandonnai mes phalanges dans ses cheveux, les lui caressant doucereusement. Cela me rassurait. A présent, je pouvais constater que peu importait ce qu’il s’était passé entre nous, cela ne nous éloignerait pas. Au contraire, j’avais comme le sentiment que cela risquait même de nous rapprocher un peu plus.

Je souhaitais lui dire qu’elle n’avait pas à s’excuser, que dans ce cas, c’était plus moi qui devait l’être qu’elle toutefois aucun mot n’était sorti de mes lèvres, seul les gestes que j’effectuais sur sa chevelure perpétuaient. Et puis, d’un coup, ce fut comme si tout était revenu comme avant... Les sourcils froncés, je l’avais dévisagée lorsqu’elle me pinça la joue mais je ne pus m’empêcher de lui rendre son sourire. Le mieux était de ne pas se prendre la tête, de tourner la page et de se dire que ce qui comptait était qu’on reste là l’un pour l’autre.

- Je me débrouille, Déclarais-je à sa question, C’est un petit déjeuner simple donc ne t’inquiète pas, je te promets que ça ne sera pas dégueu !

Je n’avais pas forcément confiance en moi quant à mes talents de cuisinier néanmoins j’étais tout de même capable de dire que je ne faisais pas dans la catastrophe. Je n’étais pas prêt d’ouvrir un restaurant en mon nom cependant je m’en sortais à ma manière. Je finis par déposer le tout dans des plats ayant préparer quelque chose de traditionnellement japonais. Je n’aimais pas les petits déjeuners occidentaux.et il n’y avait rien de plus délicieux qu’une bonne soupe miso le matin.

Néanmoins, au lieu de lui indiquer de s’assoir, je l’observai d’un air malicieux et sans lui laisser l’occasion de s’attendre à quoi que ce soit, je glissai mes doigts sur ses côtes, la chatouillant de plein fouet.

- Petite vengeance pour le pincement ! Riais-je avant de me décaler et de lui indexer gentiment une chaise, Je t’attend pour une partie de jeu vidéo d’ailleurs ! Je n’ai pas oublié hein ?

Parce que la veille on s’était promis de se faire une soirée et j’y comptais bien. En ce moment, je n’y jouais plus trop lorsque j’étais seul et puis, c’était tellement plus amusant à deux. Je savais qu’Erena était forte toutefois, je l’étais tout autant. Les matchs promettaient d’être très serrés. Souriant, je mangeai en silence, content que finalement rien n’était différent entre nous puis une fois terminé, je rangeai les affaires sales dans mon lave vaisselle.

J’étais en train de me redresser lorsque mes yeux se posèrent sur un objet près de mon évier et j’arquai instinctivement un sourcil en me demandant pourquoi il était là. Un pistolet. Enfin, c’était un petit gadget que j’adorais et qui était l’arme culte d’un manga que j’adorais.

- Je ne sais pas pourquoi c’est là. C’est bizarre.

Il m’arrivait parfois de poser des trucs à un endroit sans réellement m’en apercevoir cependant état d’origine maniaque, je les rangeais rapidement. J’avais du l’oublier. Erena devait sûrement s’intéresser à ce genre de choses aussi, si elle aimait les jeux vidéos, elles devaient obligatoirement aimer les mangas. Il faudrait que je lui fasse lire celui-là si elle ne connaissait pas.

- Je collectionne plein de truc comme ça. Enfin tu sais moi les jeux, les mangas tout ça, j’adore.

En particulier Naruto. Dans une armoire, j’ai encore tous les objets que j’avais acheté lorsque j’étais adolescent.

- Et ça, je me le suis offert parce que regarde, Rétorquais-je en lui montrant le revolver, La gaychette est formé bizarrement non ?

Mes paupières papillonnèrent aussitôt que je m’étais aperçu de ce que je venais de déclarer. « Gaychette », j’avais dit « gaychette ». Pourquoi avais-je dit une telle chose ? C’était de sa faute ça. A m’emmener dans des endroits étranges, me faire rencontrer des gens tout aussi étranges, voilà que je devenais moi-même encore plus étrange.

- Gâchette, je voulais dire gâchette ! Ah... Quel idiot.

Je ne savais pas pourquoi je me sentais embarrassé tout d’un coup et j’avais honte de ce que j’avais répliqué. J’étais certainement encore un peu trop chamboulé par nos histoires que je ne parvenais plus à parler correctement.

C'était tout de même à regret qu'elle s'était détachée du corps de son amie. Elle n'avait pas eu envie de le lâcher, déjà parce qu'elle se sentait parfaitement bien comme ça, et puis parce que cette main dans ses cheveux l'avait rassurée plus qu'il n'était possible de le penser. C'était peut-être ça, le charme de Kai. Ou son talent.

Son sourire ne la lâcha pas. Elle ne put cependant s'empêcher d'envoyer un regard dubitatif à la déclaration de son ami. Ce ne sera pas dégueu... Elle ne savait pas si elle devait avoir peur ou non de ce déjeuner. Elle faisait confiance au jeune homme, donc tout devrait bien se passer. Elle regarda avec attention les gestes de son ami et laissa son regard dériver vers ce qu'il y avait sur les plats. Ca sentait bon. Et ça n'avait pas l'air mauvais du tout. Ses yeux retombèrent sur Kai et ses sourcils se froncèrent, c'était quoi ce regard là ? Elle ouvrit la bouche pour dire quelque chose mais ce fut seulement un rire qui franchit la barrière de ses lèvres. Oh le fourbe, il venait de la chatouiller. Elle se débattait légèrement entre ses doigts, tentant par moment de taper ces mains qui la perturbaient.
Elle lui tira la langue une fois qu'il l'avait relâchée avant de partir s'asseoir sur la chaise, la tête haute. Le pincement de joue avait été mignon, au moins. Être chatouillé c'était pas mignon. Enfin, ça ne l'était que dans les films.

« J'ai pas non plus oublié pour la soirée jeux vidéos. T'en fais pas, j'compte bien te mettre à genoux devant moi », dit-elle, confiante.

Elle sourit, lâchant un rapide « Bon appétit » avant d'attaquer ce qui se présentait devant elle. Elle mangea en silence, profitant de cette ambiance quelque peu bon enfant. Une fois le repas fini, elle aida Kai à tout ranger dans son lave-vaisselle et s'étira lentement. Elle posa sa main sur son ventre et le frotta quelques fois. Finalement, ça avait été délicieux, elle avait bien mangé. Ca lui faisait du bien d'avoir le ventre plein. Elle se sentait revivre, sa jauge d'énergie était retournée à son top niveau. Elle pouvait à présent affronter la journée !

Elle tourna la tête vers Kai quand ce dernier se mit à parler. Elle regarda l'objet dont il parlait et se rapprocha de lui. Elle décortiqué l'objet des yeux, tout en écoutant son ami, secouant la tête de temps en temps, et affirma rapidement qu'elle aussi aimait bien les mangas. Elle partit dans ses pensées, s'imaginant déjà avec l'objet en main, posant pour un magazine d'accessoires de jeux vidéos. Ah... elle avait raté sa vocation. Elle n'avait jamais posé pour ce genre de magazines, ça la rendait triste d'ailleurs. Elle se voyait bien en costume de Lara Croft, brandissant une arme et un...
Son regard se leva rapidement vers Kai, alors qu'elle clignait des yeux, laissant de rapides « Quoi ? Quoi ? Quoi ? »

Elle fit un pas en arrière, mettant sa main contre sa bouche, alors que son regard pétillait déjà d'amusement.

« G..gay...gaychette ? », réussit-elle à dire sans rire.

Elle ne dit rien d'autre durant plusieurs secondes, avant de finalement exploser de rire. Elle riait tellement qu'elle se tenait le ventre et était obligée de s'accrocher à quelque chose pour ne pas se retrouver par terre. Elle ne savait pas ce qui était le plus drôle, le mot ou la tête de Kai. Ou bien était-ce les deux. Ca devait être les deux. Une larme roula le long de sa joue alors qu'elle entendait son ami se reprendre. C'était encore pire maintenant. Son corps se courba légèrement vers l'avant, son rire continuant de résonner contre les murs. Elle ne pouvait plus s'arrêter. Une autre larme coula, et, s'arrêtant enfin, elle essaya de reprendre son souffle. Mais ce fut peine perdue : une fois que son regard croisa à nouveau celui de Kai, sa crise de fou rire lui reprit de plus belle. Son corps se courba légèrement vers l'avant, une de ses mains toujours sur son ventre alors que l'autre agrippait au dossier d'une chaise. Ca faisait longtemps qu'elle n'avait plus ri comme ça, et ça lui faisait du bien. Elle semblait avoir tout oublié, toutes ses inquiétudes de son réveil, la peur de perdre son ami... Tout ça semblait loin maintenant.

« Dé.. désolée mais... », commença-t-elle entre deux rires, « C'est trop drôle...T'aurais dû.. voir ta tête ! »

Son rire se fit plein silencieux de seconde en seconde, et cessa enfin. Elle soupira bruyamment avant de prendre une grande inspiration. Elle se redressa et essuya ses joues rapidement avant de lancer un sourire amusé à son ami.

« Sache que je ne verrais plus jamais un pistolet de la même façon »

Oh oui, là, Kai avait changé sa vision de cet objet. Ca allait être dur de garder son sérieux à chaque fois qu'elle verrait ce mot. Elle agita sa main devant elle, pour se faire l'air.
Puis sa main s'arrêta subitement. Gaychette. Gay. Chette. Oh. Oh oh. Il venait d'avouer ? Etait-ce un lapsus révélateur ? Il devait vivre dans le déni depuis des années... Et voilà qu'après une folle soirée, il avouait sans l'avouer ! Encore un peu et Erena trouverait ça émouvant.

« Gaychette hein... », lâcha-t-elle finalement, un sourire amusé placardé aux lèvres, le regard rieur.

Gaychette... Non, mais j’aurais voulu me gifler pour avoir oser sortir une bêtise pareille. Parmi tous les mots existant sur Terre, il avait fallu que j’en invente un. Et pas des moindres. En plus Erena, s’était littéralement moqué de moi, je l’avais fusillé du regard. Ce n’était pas drôle. Elle allait vraiment finir par croire que j’étais gay à force. Sauf que je ne l’étais pas. C’était tout le chamboulement depuis la veille qui me faisait raconter n’importe quoi. Si les hommes m’attiraient, cela ferait un moment que je le saurais... Il m’écoeurait plus qu’autres choses. Enfin les autres, pas moi-même. Parce que, qui dit être écoeuré par les hommes, cela signifierait que je me dégoûtais vu que j’en étais un. Mais moi j’étais l’exception. Puis je parlais des hommes gays. Bref tout ça pour dire qu’elle s’était bien moquée de moi... Je n’avais jamais été aussi gêné de toute ma vie. A un point que j’aurais voulu creuser un trou pour m’y cacher à l’intérieur néanmoins au lieu de ça, j’avais fini par rire avec elle en lui ordonnant d’arrêter de rigoler.

Quand elle avait déclaré qu’elle ne verrait plus jamais les pistolets de la même façon, j’avais aussitôt balancé l’objet derrière moi songeant que désormais j’étais dans le même cas qu’elle. La vie de cet outil se terminerait très vite dans la poubelle à cause des souvenirs idiots qu’il me rappellerait. Bon, je l’avais acheté donc je ne voulais pas le jeter inutilement néanmoins il finira ranger dans un carton de mon placard et ça suffira.

On avait discuté ensuite puis elle était parti. J’avais promis qu’on se ferait une soirée jeu vidéo et j’avais aussi promis que je ne la laisserais pas me battre aussi facilement. On avait plus pensé à l’évènement de la veille toutefois j’étais certain désormais qu’il ne s’était rien passé. Je ne pouvais pas l’expliquer, c’était juste un ressenti. On aurait pu, oui, surtout ivre comme on l’était cependant on ne l’avait pas fait. On avait juste du s’amuser comme on le faisait toujours puis me connaissant, j’avais dû me déshabiller. Je me déshabillai toujours de toute façon. Encore plus quand j’étais bourré. Pour Erena par contre, c’était une autre histoire... Peut-être que me voir tout nu lui avait donné chaud alors elle avait décidé de retirer ses vêtements elle aussi. Ou bien, elle avait juste suivi le mouvement. Mais peu importait, ça n’avait plus d’importance.