get some air. w/ jun.

Un soupir, un énième soupir traversait mes lippes tandis que je me retrouvais – de nouveau – à suivre cette file bien trop longue afin de mettre la main sur l'un de ces quelconques gobelets cartonnés emplis de ce liquide noirâtre et légèrement mousseux. Liquide, qui m'offrait de toute évidence, l'énergie qui me manquait jour après jour. Un réconfort. Un moyen de noyer ce sentiment de fraîcheur qui s'emparait peu à peu de notre quotidien au vu du temps qui se rafraîchissait. Temps, qui, quant à lui, s’approchait d'avantage de la saison hivernale, que, automnale. À mon plus grand désespoir, par ailleurs. C'est donc tout naturellement que je réajustais ce veste que j'avais pris soin d'emporter avant mon départ. Choix judicieux et je ne manquais pas de me féliciter intérieurement. Pour une fois que mon côté lunatique ne me jouait pas des tours, je me devais bien de me féliciter concernant ce simple fait. Anodin pour certains, une grande première pour moi. Depuis mon entrée au sein de mon université artistique, j'avais quelque peu perdu le contrôle de ma personne, et cela se ressentait au travers de multiples actions. Que ce soit au travers d'une simple perte d'objet, de retard, mais aussi, de bien d'autres faits quotidiens. Ce qui, en soit, était plutôt frustrant. Malgré tout, ce qui semblait d'avantage frustrant dans ces instants était cette jeune femme qui semblait stoïque face à son hésitation concernant sa commande. N'avait-elle donc pas eu la chance de réfléchir tout au long de ces minutes qu'elle avait passé à suivre cette file ? Improbable. Et pourtant, si vrai. C'est donc, au travers d'un murmure que je daignais lui offrir quelques propos acerbes issus de ma langue natale afin de passer inaperçu aux yeux des autres, et ainsi, laisser mes sentiments mécontents se frayer un chemin. Ni-vu, ni-connu.

« 白痴.* » Répétant cela à de multiples reprises, ce n'est qu'après plusieurs mélodies agréables retentissant au sein de mes orifices auditifs que je parvenu à mettre la main sur le bien tant attendu. Ce gobelet cartonné reclus au creux de chacune des paumes de mes mains, je parvenais enfin à sentir cette douce chaleur émaner de celui-ci au travers de multiples frissons parcourant agréablement mon échine. Une gorgée, puis, une autre, parvint à me porter de nouveau vers l'instant présent. Mais aussi, la raison de ma venue en ces lieux : trouver l'inspiration. Le manga que je réalisais venait tout juste d'atteindre son paroxysme et je ne pouvais aucunement nier l'idée que je souhaitais obtenir un résultat des plus époustouflant. Satisfaction personnelle, dans un premier temps, mais aussi, pour celle de mes lecteurs. Je ne pouvais aucunement négliger leurs attentes, les désirs, leurs envies. J'avais retenu à la perfection les moindres détails qui parviendraient à m'éclairer au travers des multiples lettres qu'ils avaient daigné m'écrire et c'est à présent au sein de ces rues bondées que je me retrouvais. Mettre la main sur l'endroit de prédilection par excellence pour les couples semblait être une idée judicieuse, je ne pouvais aucunement nier ce fait. Et ce, malgré mon cruel manque d'expérience concernant ce sujet. Puisque, l'une des seules relations auxquelles j'ai parvenu à trouver un équilibre fut brisée de la manière la plus inattendue qu'il soit. Pourquoi ressasser le passé ? Je me maudissais intérieurement tandis que je détournais mon regard vers le moindre détail qui me semblait important. Boutiques. Cafés. Restaurants, tout y passait, mais... Rien.

N'y avait-il donc pas en ces lieux une source d'inspiration ? Je baissais peu à peu les bras tout en essayant de me rendre à l'évidence qu'au final, cette idée que je trouvais auparavant géniale, ne se trouvait être qu'un véritable fiasco. Fiasco qui venait tout juste de me faire perdre une heure de mon temps. Temps si précieux. Temps auquel je donnais une véritable importance.

J’enchaînais donc le pas, d'une manière bien plus rapide que je n'avais pu l'être il y a encore quelques secondes de cela. Café niché au creux de l'une de mes mains, regard perdu porté à l'intention de mon téléphone portable qui semblait avoir subi un acharnement de messages par l'une de mes connaissances. Un retour aux sources : j'étais de nouveau en retard. Et je doute que mon retard ne puisse être allégé au vu de la situation présente : une inattention qui allait me caser bien des torts. Ce simple café que j'avais mis longtemps à obtenir venait tout juste de trouver refuge contre le corps de cet homme. Ou plus exactement : ses vêtements. Vêtements, qui, à première vue semblaient fort coûteux.

« 他妈的.** » De nouveaux propos acerbes issu de ma langue maternelle et voilà que je daignais apporter un regard inquiet envers cet inconnu. Inconnu ? C'est bien ce que je pensais, mais ce ne fut qu'une idée en vain. Lui, ici ? Quel bon diable jouait avec moi ? Était-ce donc là une simple image issue de mon imagination bien trop débordante ? Naïvement, je secouais ma tête de droite à gauche, de nouveau en vain. Et enfin. Un nouveau murmure. « Quelle surprise, y a pas à dire... »

* idiot(e).
** merde.

Comme à son habitude, son pas était rapide malgré la foule habituelle du centre ville. Jun détestait toute cette populace qui l'empêchait d'avancer comme il voulait et le contraignait lui, être suprême, à s'excuser auprès d'eux. Quelle abomination. Pourtant, il devrait être plus détendu, il s'était rendu à la fashion week de Shanghai, il avait pu pratiquer sa si délicieuse langue qu'il ne peut parler d'ordinaire qu'avec Mei. Pourtant, c'était si beau comme langue, si facile, si doux, si tendre. Pas comme le japonais. Bon, il dramatisait un peu, parfois il avait ces poussés de haine féroce envers son pays d'accueil qu'il avait autrefois tant idéalisé. Il trouvait l'endroit toujours aussi fascinant, bien au fond de lui.

Un expresso aussi vite acheté que terminé, il reprit sa route sans même un merci ou un regard pour la serveuse. Cette gueuse incapable qui avait mis un temps interminable à prendre les commandes avant la sienne. Scandaleux, il trouvait que c'était juste une outrance à sa personne. Lui qu'on devrait pourtant préserver, traiter comme un prince pour supporter les conneries du maire de cette ville pour lequel il ne pouvait même pas voter parce qu'il n'était pas japonais. Bon, même s'il pouvait, il ne le ferait pas, il voterait pour tout le monde sauf pour lui, mais le Japon est un pays d'idiot.

Et il ne croyait pas si bien dire ! Il le pensa encore plus quand une personne osa le crime suprême, en plus d'entrer en collision avec lui et de le freiner quand son emploi du temps était plus chargé que celui de n'importe qui au monde. Sans exagéré ! Il n'entendit pas même le juron dans cette si belle langue, baissant juste son regard vers sa chemise. Une putain de Gucci et c'est comme ça qu'on la traitait ? Avec du café ? Un café noir ? Il ne pouvait tolérer ça. En plus, il était encore chaud, s'il faut ça allait lui brûler le torse. Son torse si beau, qu'il entretenait avec tant d'amour ! Son outil de travail ! Son regard se leva vers la personne qui, à cet instant précis, venait sans doute de signer son arrêt de mort et il resta quelques secondes à la fixer. Merde, Hana ! Quelles étaient les chances qu'il la recroise après tellement d'années, dans un autre pays ? Elle le suivait, c'était obligé, il n'arrivait pas à croire à ce genre de coincidence.

« Surprise ?! » S'exlama t-il dans leurs langues maternelles. « Tu regardes jamais devant toi ? Regarde ce que t'as fait ! Tu sais combien elle coûte cette chemise ? Putain, tu crois que j'ai le temps de rentrer me doucher ? Puer le café toute la journée. Sérieusement ! En plus il a l'air dégueulasse ce café ! »

On aurait pu imaginer les retrouvailles gênantes, les petits mots timides de recroiser la première femme qu'il avait aimé après des années, mais non, non. Il y avait une Gucci en jeu et aussi fort qu'il l'avait aimé elle, il avait un amour inconditionnel pour ses vêtements. En parlant de vêtement, il la détailla un peu du regard, fronçant les sourcils. Elle aurait pu faire un effort quand même. Vraiment, elle aurait pu.

« C'est pas vrai, quoi, regarde moi ça ! Achète-toi des lunettes, arrête de boire des cafés, prends un chien d'aveugle, fais quelque chose. Tu trouves ça normal ?! »

… Faudrait peut-être lui apprendre à dédramatiser, Hana aurait pu être en voiture et écraser des enfants, en soit, renversé un peu de café n'avait jamais tué personne. Enfin, sauf une merveilleuse chemise. L'impertinente, comment avait-elle osé. On était à Nishinaka, on mettait des gens en prison pour se placer du côté traditionaliste de la force mais pas pour renverser des cafés sur des êtres supérieurs. Ville de fous.

Le destin jouait-t-il avec ? Me testait-il ? Était-ce donc une épreuve afin de connaître mes capacités à agir de la meilleure manière qu'il soit afin de rejoindre – incessamment sou peu – le paradis. Si oui, j'aurais souhaité pouvoir être emporté, là, maintenant, tout de suite. Et fuir. Fuir cette situation qui semblait des plus déstabilisante qu'il soit. Tout du moins, pour ma part. Puisque, l'homme en question semblait trouver d'avantage d'intérêt sur ses vêtements tâchés que part mon identité. Avait-il autant changé ? Je l'avais connu, imbu de sa personne, certes... Mais je ne pensais pas que cela avait été d'avantage poussé au fil des années. J'aurais souhaité le taquiner concernant le simple fait de se retrouver ainsi, ou simplement arborer la situation d'un point de vu différent, mais, cela ne semblait guère judicieux.Bien au contraire. Il était tout juste en train d'attirer l'attention sur nous au travers de ces multiples exclamations, celles-ci attirant – de toute évidence – le regard d'autrui. Gênant. Véritablement gênant. Et bien heureusement pour moi, il avait daigné utiliser notre langue maternelle afin que nos propos ne parviennent pas à être compris par ces inconnus. Je venais donc balayer vulgairement ma chevelure vers l'arrière de mon crâne avant que je ne puisse me permettre de jeter mon dévolu sur le contenu de mon sac à main tandis que j'abandonnais ce gobelet cartonné à présent vide contre le sol. Un paquet de mouchoirs au creux de l'une de mes mains, l'un d'entre eux au sein de l'autre, voilà que je tentais avec tant bien que mal d'essuyer ce que je pouvais bien essuyer. Sans grand succès. Je le conçois. « Je... Je n'ai pas fait exprès. Idiot. » Un léger murmure et voilà que je tentais de réparer les choses. Mais, cela semblait bien pire qu'avant. Essuyer voulait tout aussi bien dire : agrandir la tache et étaler celle-ci au travers d'une plus large étendue. Quelle bêtise pouvait bien m'avoir piqué ? Ou bien, était-ce là le résultat d'un effet de surprise de le voir ici, en ces lieux, à Nishinaka ?


Vulgairement, j'en venais malgré tout à soupir d'une manière peu convenablement, mais qu'importe. Ton comportement n'était que très peu convenable à ton tour. Pourquoi devrais-je faire des efforts en vain face à cet homme qui semblait bien trop obnubilé par l'état de sa chemise ? « On dit que le temps et l'âge apportent sagesse, mais je suppose que c'est le contraire, pour toi... Je n'ai pas fait exprès, tu ne peux donc pas comprendre cela ? Je suis désolé, ô grand Jun de mes deux. Je payerais le nettoyage, si cette chemise te tient à tant à cœur. À moins que, tu n'as juste à claquer des doigts pour avoir la même dans la minute à suivre cela, c'est inutile... » Ma langue maternelle de nouveau utilisée. Parviendrais-je à sortir indemne de cette situation ? J'en doutais fortement, et pourtant, je devais avoir confiance en mes capacités de persuasions. Je semblais d'avantage mature que lui. Je ne pourrais aucunement me laisser marcher sur les pieds, impossibles. Impensable. J'étais bien trop déterminé à lui faire ravaler ses paroles. Paroles, qui, en soit, avaient été plutôt blessantes.


« Et puis, ne rejette pas entièrement la faute sur moi. Tu es aussi coupable, Monsieur. Tu aurais très bien pu m'avoir évité si tu avais regardé devant toi. N'est-ce pas ? Donnant, donnant. » Un argument de choc lancé, j'aspirais à lui sous-tirer une excuse. Aussi minime soit-elle. Cela flatterait à la perfection mon ego. Aussi infime soit-il. « Je trouverais bien un moyen de te rembourser malgré tout, si c'est absolument nécessaire... » Débourser de ma poche pour ses beaux yeux me dérangeait quelque peu malgré tout, mais je favorisais le fait d'éviter l'affront afin de me rendre bien vite à mon rendez-vous. Déjà en retard, je doute d'être facilement pardonnée si ces quelques minutes finissent par être de longues heures.

Pas fait exprès ?! Oh ça lui faisait de belles jambes ça. Et qu'elle le traite d'idiot encore plus. C'était elle, qui avait osé le souillé de ce breuvage infâme et elle l'insultait ? Comment osait-elle, après les années passées ensemble ? Ah, elle avait déjà tout oublié !... On lui rappelait qui agressait qui depuis avant ? Peu importe. Sa chemise ! En plus, elle étalait encore davantage la tâche, comme si ça ne suffisait pas. Il se demandait ce qu'il avait fait ce matin pour mériter une telle malchance. Bon en soit, ça lui évitait de ressentir la gêne de croiser son ex-petite-amie après bien des années. Son premier amour aussi, occasionnellement. Mais là on parlait quand même d'une chemise Gucci. Sa préférée. Concrètement, peu importe laquelle il aurait porté, à cet instant, ça aurait été sa préférée.

Quand elle se lança dans la philosophie, il arqua un sourcil. Oh, il avait acquis beaucoup de sagesse avec le temps. En quelque sorte. Ça dépendait pourquoi. Autant, pour éduquer Mei et faire en sorte qu'elle devienne une bonne personne, il se débrouillait plutôt bien, même s'il cédait un peu facilement à ses caprices. Il voulait être exemplaire avec elle et était sans doute loin d'être l'idiot qu'il peut être sinon. Mais cela ne justifiait rien et il voulait comprendre comment est-ce qu'elle avait pu faire cette tâche si énorme.

Payer le nettoyage ? Faut-il encore que cela parte ! Et jamais il n'acceptera son argent, ce n'était pas comme s'il en manquait. C'était plus pour le principe. Il était attaché à chaque chose qu'il possédait. Ça faisait déjà quatre ans qu'il vivait assez confortablement, sans avoir à avoir des boulots horribles ou dépendre de quelqu'un. Toute sa vie, il n'avait jamais eu grand chose, alors une chemise Gucci, c'était complètement dingue. Il donnait cette impression d'avoir toujours tout eu, et ça ne le dérangeait pas au final qu'on pense cela de lui. Il n'aimait pas attirer les pleureurs de toute façon.

« Me rembourser ? » S'enquit-il en arquant un sourcil. « Merci bien, je m'en passerais. La seule chose utile que tu pourrais faire, c'est remonter dans le temps avant que je ne pue le café à plein né. Sérieusement, où l'as-tu acheté ? »

… Jun, elle l'a probablement acheté dans un café normal, absolument respectable. Il avait toujours la critique facile, surtout quand il était énervé. Et là, il l'était clairement. Un soupir rageux quitta ses lèvres tandis qu'il regardait la chemise qu'elle avait davantage souillé avec son mouchoir. Sacrilège. Son regard se posa sur sa montre, constatant qu'il allait être en retard à son rendez-vous. Hors de question qu'il y aille ainsi, même si ce n'était qu'un rendez-vous où son altesse Gao allait à la rencontre de pitoyables gueux. Eh bien gueux ou pas, il refusait de s'y rendre.

« J'étais occupé, je ne pouvais pas regarder devant moi, j'avais un rendez-vous important, vois-tu et j'avais un détail à corriger. » Si important qu'il peut l'annuler à cause d'une tâche de café sur sa chemise. Tout à fait. « N'essaie pas de partager les torts, ça ne marche pas avec moi, tu pourrais montrer un peu de regret. »

Bien évidemment, le comportement qu'il adoptait donnait parfaitement envie d'éprouver un quelconque regret. Bon, au fond de lui, ça le perturbait de la revoir alors qu'il pensait qu'elle sera juste une partie de sa mémoire qu'il allait oublier un jour. Ou sans doute pas, ça n'avait pas été le genre d'amour qu'on oublie facilement et depuis elle, Jun n'avait pas forcément été de ceux qui entretiennent de belles et longues relations amoureuses. Il était tout bonnement incapable de garder ses petites-amies. Elles ne savaient pas ce qu'elles perdaient de toute façon, ses standards étaient trop élevé.

« Qu'est-ce que tu fais ici ? Enfin, à part t'arranger pour bousiller ma journée par ta maladresse ? Un peu de tourisme dans cette charmante ville ? » S'enquit-il, fronçant un peu les sourcils avant d'ajouter sur un ton plus neutre et surprit : « Tu es bien la dernière personne que j'aurais pensé croiser ici. »

Tant de choses avaient changés depuis. Il se souvenait de ces années lycée, où il y allait toujours avec entrain. Enfin, tout lui semblait mieux que de rester au foyer, bien qu'il pouvoir voir Mei. Hana l'avait beaucoup motivé à travailler ses cours et à réussir son diplôme, bien que personne n'y croyait réellement, vu le manque d'intérêt qu'il pouvait y porter. Au final, ce diplôme ne lui avait servit qu'un premier temps avant de n'avoir plus la moindre utilité. Mais bien qu'il était un monstre d'égoïsme à cet instant, il lui devait quand même pas mal. Jun avait juste tendance à l'oublier.

« C'est une longue histoire. » Ces propos, j'aurais simplement souhaité les énoncer et fuir aussi loin qu'il m'en était possible, et pourtant, je n'en étais pas capable. Absolument pas capable, loin de là... Même. Je n'étais qu'une idiote tentant d'arranger les choses de la manière la plus péjorative qu'il soit, ainsi, face à lui, arborant ces vêtements peu convenables et cet air fort idiot scotché sur mon faciès. Le temps semblait l'avoir arrangé physiquement, lui, comparé à moi. J'avais perdu cette flamme de jeunesse et de folie qui avait auparavant fait partie de mon quotidien. Les raisons ? Elles étaient nombreuses, ou multiples, à vous de voir. Certaines semblaient anodines, tandis que d'autres avaient davantage d'importance. Les citer ? Était-ce véritablement nécessaire ? Je me maudissais intérieurement d'avoir poussé le destin à une énième rencontre avec lui tandis que j'en venais à mordiller vulgairement ma lèvre inférieure. N'y avait-il donc personne d'autre ? Pourquoi lui ? Pourquoi maintenant ? Je n'avais pas été préparé psychologiquement à cela et je devais bien avouer être désemparée. Bien plus que je n'avais pu l'avoir imaginé. (Cela serait très certainement une expérience de plus à ajouter concernant mes futurs écrits à publier au sein des prochains tomes. Original, je suppose.) « Premièrement, ce café, je l'ai acheté dans un café, aussi simple que cela peut-il être, il ne sera très certainement pas au goût de Monsieur. Deuxièmement, je me suis déjà excusée, que souhaites-tu ? Que je m'agenouille devant toi, peut-être ? » Une question rhétorique, en soit. Mais qui semblait malgré tout pouvoir être soulevée, la réponse de mon compagnon pourrait bien me mettre hors de moi, malgré tout. C'est donc tout naturellement que je repris ce léger monologue à la suite d'un murmure traduisant l'amour que je pouvais à présent éprouver à ton égard : « Idiot. »

« Troisièmement, la, ou les raisons de ma venue ici ne sont pas utiles à entendre. C'est un choix... Personnel. Et obligatoire. Ce n'est pas du tourisme, désolé de te décevoir Jun, mais, je considère ces lieux comme étant chez moi, à présent. Nul doute que tu n'es pas ici en tourisme à ton tour, malheureusement... » Une joie immense. Une ironie des plus immense, aussi. Déglutissant difficilement, j'en venais à baisser mon attention vers ce désastre. Me sentais-je mal ? Bien sûr que oui, mais je ne pouvais en aucun cas l'avouer. Non, pas face à elle. Son ego surdimensionné serait bien trop flatté pour me laisser m'en sortir indemne de cette situation. Et pourtant... Non. Cette douce voix intérieure m'ordonnait de me taire, de garder le silence à ce sujet. Mais aussi sur celui concernant le simple que je semblais malgré tout heureuse de le revoir en ces lieux. Et ce, malgré son comportement des plus haïssable et hautain qu'il soit. Au fond, j'avais connu la personne qu'il était au cours du passé et je doute que celle-ci puisse avoir été véritablement effacée de son esprit.

Enfin. Un bloc-notes extirpé de ce sac à main niché contre l'une de mes épaules, stylo gribouillant de multiples numéros au travers d'une suite logique, il me semblait légitime de prendre mes responsabilités, et ce, malgré ce mécontentement dont tu m'avais fait part concernant cela. « Je ne peux pas remonter le temps. Mais je peux malgré tout rembourser ce que je te devrais. J'y tiens, Jun. J'ai mes principes et tu le sais, je me sentirais redevable et ce que je détesterais au plus haut point, c'est de devoir l'être auprès de toi sans parvenir à faire quoi que soit contre cela... Donc. C'est mon numéro de téléphone. Appelle-moi uniquement lorsque l'affaire sera réglée, pas à des heures saugrenues, ou bien trop tardives, je t'en prie. »

Conscience tranquille, mon sort se trouvait à présent au sein de l'une des poches encore blanche de ta chemise afin que tu ne puisses pas refuser cette attention de ma part. Mais, bien vite, la réalité prit le dessus et me rattrapa de pleins fouets. Une douce mélodie se fit entendre et le simple nom inscrit du contact me poussait à croire que mon propre rendez-vous venait de tomber à l'eau. Et ce, au vu des multiples messages écrits que je parvenais à lire. Tout cela, à cause de quoi ? De qui ? Moi, ou lui, qu'importe. Il était bel et bien trop tard.

« A moins que, tu ne souhaites que j'arrange la situation, tout de suite. J'ai quelques heures devant moi. Tu peux toujours filer à la prochaine boutique de luxe, emporter une énième chemise pour ta collection et me donner celle-ci, à toi de voir. » Une proposition. Une énième proposition. J'étais bien trop gentille, peut-être. Mais qu'importe. Philosophie chinoise inculquée par mes géniteurs, oblige.

Jun n'était pas un monstre. Non, c'est vrai, il faut le croire. Au fond de lui, et même pas tellement au fond. Alors il s'en voulait très légèrement de l'avoir agressé comme ça, même s'il restait persuadé que c'était tout à fait normal de s'en prendre à elle ainsi. Bon, il n'aurait pas autant exagéré s'il ne s'agissait pas d'Hana. Après tout, il la connaissait bien, et la familiarité était devenu naturel. Malheur pour elle aussi, il pouvait s'exprimer dans sa langue maternelle. Bien qu'il vive ici depuis trois années, son japonais n'était pas parfait et il lui arrivait de perdre facilement ses mots ou de les confondre. Forcément, s'il pouvait s'énerver en chinois, il n'allait pas manquer à son devoir.

Son regard se fit mauvais quand l'imprudente l'insulta encore une fois d'idiot. Lui avait-il renversé du café dessus ? Jamais. Il ne lui avait jamais rien renversé dessus. Ah... Peut-être un peu de riz une fois, mais un grand de riz est bien inoffensif. Bon, là n'était plus la question, et il préféra se reporter sur le sujet de conversation qu'il avait lancé plus tôt de peur de s'emporter une fois encore à cause de cette odieuse tâche sur son corps.

Hana vivait à Nishinaka ? Jun n'avait pu cacher sa surprise face à cette révélation et la fixait comme s'il tentait de voir si elle lui mentait. Pourquoi mentirait-elle sur cela ? C'est juste que ça lui paraissait invraisemblable de retrouver son ex-petite-amie de lycée dans un pays étranger, dans une ville comme Nishinaka. Dans ils étaient au lycée, il lui parlait souvent du Japon, de ces trois années où il y allait régulièrement avec l'épouse Wang. En fait, il avait souvent l'impression de beaucoup parler quand il était avec elle et il se demandait après coup s'il n'avait pas dû être incroyablement soûlant aussi. Heureusement qu'il s'était bien calmé sur cela depuis qu'il s'était fait connaître. On ne sait jamais à qui on peut faire confiance.

« Malheureusement ? » Répéta t-il avec un sourire narquois sur les lèvres. « Non, désolé, je ne suis pas là en touriste non plus. »

Même si, en toute sincérité, il préférerait se dire qu'il pourra rentrer en Chine à la fin de la semaine et qu'il ne s'agissait là que de simples vacances. Jamais il n'aurait imaginé que son pays lui manquerait autant et il était fasciné de voir que Mei s’accommodait autant à ce nouveau cadre. Peut-être parce qu'elle était encore une enfant ? Ou bien parce que tout devait être mieux que l'orphelinat dans lequel elle grandissait jusque là. Il ne lui avait jamais posé la question et quelque part, ça n'avait pas tant d'importance que cela.

Ses yeux se levèrent au ciel, las de la voir insister pour payer. Pourquoi rembourser ? Il la connaissait assez pour connaître ses principes, il se connaissait assez pour connaître les siens : jamais il ne laissera quiconque lui payer cela. Ce n'était qu'une chemise, même s'il se contredisait lui-même par là. (si tu veux galbé ton boule, va chez Calzedonia. CALZONIA : votre boutique de collant – c'était la pub) Mais il était trop fier pour se laisser payer des choses. Toute sa vie il avait eu l'impression de vivre aux dépends des autres et désormais, il n'avait plus besoin de personne. Il avait gagné cette indépendance dont il avait toujours rêvé, il ne dépendait de personne sauf de lui-même et même cela, ce remboursement, il le refusait. Alors il lâcha un soupir agacé quand elle plaça un morceau de papier dans sa chemise.

« Hana je ne vais pas t'appeler pour rembourser une chemise. »

Il sortit le petit bout de papier, jetant un regard sur le numéro, ne pouvant s'empêcher de sourire un peu. Qu'elle était stupide. Mignonne mais stupide. Il serait bien trop fier pour l'appeler et lui demander de rembourser une chemise. Et ne pas l'appeler à des heures tardives, c'était trop lui demander, il adorait appeler les gens à n'importe quelle heure de la nuit ! On lui reprochait souvent mais quelle importance. Ils devraient tous être flatté d'entendre sa somptueuse voix.

Silencieux, il remarqua qu'elle venait d'avoir des messages qui devaient la contrarier. Peut-être qu'elle avait raté ses rendez-vous aussi ? C'est malin, si elle avait été plus attentive aussi, ça ne serait pas arrivé ! Toutefois, la finalité de cette lecture l'étonna – encore – et il resta planté là comme un idiot à la fixer. Y aller maintenant ? Ensemble ? Faire du shopping ? Bon, il adorait faire les magasins, ce n'était pas le problème, c'est juste que ça lui semblait bizarre. Il ne voulait pas qu'elle lui paie cette chemise mais quelque part, il savait qu'il n'avait plus rien à faire de la journée et la revoir était plutôt surprenant et terriblement intriguant.

« J'ai raté mon rendez-vous de toute façon, donc tant qu'à faire. Allons à Narikin dans ce cas ? » Oui, Diamonds Street et ses trésors. « Mais je tiens à passer chez moi avant pour prendre une douche, je refuse de rester ainsi. Je ne vais pas en avoir pour longtemps, tu n'auras qu'à boire un thé, ou peu importe, ce que tu veux. Enfin, si tu penses que tu peux le boire sans le renverser. »

Et ça, on était jamais certain que ça arrive. Elle avait été victime de maladresse, on ne sait pas si cela peut se reproduire, et on était jamais assez prudent non plus, hein ?

Pour la énième fois ; un soupir traversait mes lippes. Autant, je parvenais à en apprendre d'avantage concernant sa situation actuelle, autant... Je ne voyais guère de réjouissance concernant ce que je pouvais apprendre. Alors, Monsieur avait à son tour trouvé refuge en ces lieux ? Après tout, il n'y avait rien de surprenant à cela. Au travers de nos années partagées au lycée, il semblait avoir parlé un bien grand nombre de fois de ce pays du soleil levant qu'il affectionnait tant. Fasciné. Le voilà à présent en ces lieux. Était-il heureux ? Fort probable. Enfin. Bien vite, l'instant présent me claqua de pleins fouets lorsque tu daignas énoncer mon prénom. Depuis combien de temps ne l'avais-tu pas fait, déjà ? Des années. De longues années en arrière. Le passé ne me manquait pas, c'est ce dont je me persuadais à croire, et pourtant, je semblais discerner en moi un sentiment peu favorable concernant ce simple fait. À quoi vouloir se persuader soi-même... ? Le manque se traduisait uniquement au travers de mon innocence, de ma façon d'agir, ou bien des relations perdues. Cela me manquait, apparemment. Et je ne pouvais guère le nier, au fond de moi. J'avais redouté d'atteindre une certaine maturité et de devoir à mon tour, devoir gérer ma propre vie. « Narikin ? » Une question rhétorique, en soit. Et une proposition qui me poussait à reporter mon attention envers l'instant présent. Je n'avais que très peu de connaissances concernant cette ville où je résidais. Favorisant le simple fait de suivre un rituel prédéfini au travers de chacune des journées où j'ouvrais les yeux. Une douche bien chaude, un simple petit-déjeuner, un simple passage au sein de ma salle de bains et voilà que je me permettais de fuir auprès de mon cousin afin de me rendre au sein de cette bâtisse fort imposante où réside l'entreprise Neverland. Entreprise, au sein de laquelle, je possède un rôle important. Et ce, malgré mon comportement fort contradictoire concernant les stéréotypes d'hommes d'affaires usant d'un poste de président, ou de vice-présent. Je passais donc, plusieurs heures en ces lieux avant que je ne puisse – de nouveau – rejoindre mon appartement afin de vaquer à l'une de mes occupations principales : dessiner, encore, et toujours. Je ne voyais donc aucun inconvénient à briser cette petite routine.

Mais... Passer chez lui ? Était-ce donc une véritable bonne idée ?

Je réfléchissais intérieurement, posant le pour, ou le contre. Mais je ne parvenais que très peu à trouver une véritable raison de refuser cette proposition. Chacun de nous semblait avoir du temps libre ; il trouverait une chemise de remplacement, et je ne me sentirais guère redevable auprès de lui. Donnant, donnant. Je suppose. Tout du moins, c'est ce dont je tentais de persuader. « Je suppose que je ne peux pas refuser... Et je tiens à dire que je ne renverse pas toutes les boissons que je peux tenir entre mes mains, humpf. » Ronchonnant quelque peu, j'en venais à heurter l'un de tes bras à l'aide de l'un de mes coudes avant que je ne puisse parvenir à me tenir à tes côtés. « Je tiens juste à émettre une règle : évites de jouer l’exhibitionniste, veux-tu. » Ceci étant dit, je me permettais d'attraper délicatement l'une de tes manches afin de te pousser à avancer à ton tour. Et ce, afin d'éviter un quelconque mécontentement de ta part.




Je devais bien l'avouer : marcher à tes côtés ravivait en moi un bien grand nombre de souvenirs. Mais aussi, la naissance d'une légère gêne au sein de mon esprit. Je tentais – avec tant bien, que mal – d'évincer cette idée de mon esprit, mais je n'y parvenais pas. Je jetais de rapides regards à son attention tout en essayant de lister les multiples changements que j'avais pu discerner chez lui, et ce, au travers de notre chemin jusqu'à ton appartement. Impressionnant. Net, propos, moderne et très agréable. Fort différent de celui au sein duquel je résidais et j'avais bel et bien peur de faire tache au sein de cet univers.

« Dis, Jun. Tu ne te sens pas seul, ici ? » Ces paroles énoncées au travers d'un simple et unique murmure, voilà que je me permettais d’ôter ces chaussures qui allaient salir – à leur tour – l'intérieur de ton antre. Mais aussi, ma veste, qui trouva refuge au creux de mon bras avant que je ne puisse me permettre de faire irruption au sein de la pièce principale.

Si elle refusait, il rentrait sans elle, c'était aussi simple que cela. Hors de question qu'il se rende dans une luxueuse boutique en ayant l'air d'un gueux. Jamais. N'était-il pas la vitrine de Nishinaka selon les dires de ce cher Maire ? Le parfait petit immigré intégré qui montrait combien cette saleté de ville était ouverte ? Bon, il n'allait pas encore s’emporter sur ce détail, ça finira bien par lui passer. Ou peut-être pas mais il n'était pas non plus là pour rien et en soit, il aimait bien la ville de Nishinaka, il n'y avait que pour le maire qu'il avait une haine incommensurable. En dehors de cela, il pouvait reconnaître un certain charme à la ville nippone.

Éviter de jouer exhibitionniste ? Cette fois-ci, il ne put contenir un large sourire de se former sur ses lèvres tandis qu'il regardait Hana, profondément amusé par cette « règle ». De quoi avait-elle peur ? De ne pas pouvoir se tenir et de lui sauter dessus ? Oh, il ne pourrait même pas lui en vouloir. S'il lui plaisait lycéen, il était tellement plus attirant désormais, il ne savait même pas comment elle faisait pour se contenir, vraiment.

« Tu as peur de te sentir nostalgique ? » S'enquit-il, quelque peu taquin alors qu'elle tirait déjà sa manche.

Ce n'était pas comme si elle avait déjà vu tout ce qu'il y avait à voir. Son corps n'avait pas non plus énormément changé depuis, il s'entraînait tout autant qu'avant, sauf qu'il avait la chance d'avoir des appareilles plus perfectionnés à sa disposition pour cela. Dans tout les cas, cette recommandation amusait particulièrement le Chinois, qui se demandait à quoi elle s'attendait. Qu'il l'amène chez lui juste pour pouvoir la coincer et lui faire un strip-tease improvisé pour raviver la flamme.

✧ ✧ ✧

La clé glissée dans sa serrure, Jun poussa la porte de son grand appartement, laissant les chaussures à l'entrée. Il avait appris à aimer l'ordre et ne supportait pas quand les choses n'était pas impeccable. C'était sans doute cela le principal sujet de conflit qu'il avait avec Mei qui déclarait être « angoissée » quand c'était trop ordonné. Plutôt elle que lui. Son regard se posa sur Hana qui venait d'entrer à son tour et il pinça un peu les lèvres, trouvant cela si étrange de la voir ici, chez lui. Dans son propre appartement bien des années après qu'ils se soient séparés dans l'optique de ne plus jamais se recroiser. Si étrange. Il avait tellement l'impression d'avoir affaire à une personne d'une autre vie. Ce qui était un peu le cas, au final. Hana faisait partie d'une autre vie et il n'aurait jamais imaginé qu'un jour, elle apparaîtrait dans celle-ci, et cela ne pouvait que créer une extrême confusion dans la tête du mannequin.

Sa question le ramena un peu à la réalité et il ne put qu'en sourire. S'il vivait seul ici, c'est vrai qu'il serait sans doute déjà mort de solitude. La plupart du temps, il avait vécu avec plein de gens autour de lui, partageait sa chambre avec d'autres garçons de tout âge, c'était toujours animé, peu importe où il allait. Quelque part, il appréciait la solitude désormais bien qu'elle soit plus rapidement pesante.

« Je ne vis pas seul », répondit-il en un bref haussement d'épaule, lui faisant signe de s'asseoir sur le canapé. « Tu te souviens de Mei ? Cette petite fille qui ne me lâchait pas au foyer ? Je t'en parlais souvent aussi. Je l'ai adopté il y'a trois ans, quand j'ai commencé à avoir assez d'argent pour cela. Elle vit ici avec moi désormais. »

A son âge, on se trouvait plutôt une petite-amie, une femme, ou peu importe mais il n'avait jamais été firand de convention. Sa mère l'avait eu à quatorze ans, c'était la même différence d'âge qu'il avait avec Mei, pour autant il se voyait plus comme un grand frère que comme un père, bien qu'il ait ce statut juridiquement parlant.
Faisant couler un expresso, il vint le poser devant elle avec précaution, n'oubliant pas de lui demander de faire attention. Deux fois. Pour être sûr.

« Qu'est-ce que tu es venue faire au Japon ? Et à Nishinaka, surtout ? Ça me surprend un peu. »

Pourtant, ce n'était pas comme si elle lui avait dit ne pas aimer ce pays, c'est sûrement la coïncidence qui lui paraissait trop énorme, bien qu'en soit, elle n'était absolument pas impossible.

Oui, j'ai peur de la nostalgie. Inconsciemment, j'en avais peur. Et pourtant, je me retrouvais là, assise sur ce canapé qui t'appartenait, jambes croisées recouvertes de cette simple veste, observant de part et d'autre l'intérieur de cette pièce fort agréable. Je ne pouvais aucunement négliger le fait d'apprécier la mise en place de celle-ci ; aussi bien concernant les meubles, que la décoration utilisée. Simpliste, mais efficace. Et tout aussi adorable. La présence de cet petit être devais très certainement avoir joué un rôle au travers de ce simple fait et je ne pouvais que sourire négligemment lorsque je parvenais à me remémorer de cette image lointaine que je pouvais avoir de ce petit être. Si enfantine, si pure, et tout aussi naïve... Ce qui, en soit, était fort différent de l'homme que tu représentais actuellement. À mon plus grand désespoir, par ailleurs. Mais qu'importe, ton comportement changeait peut-être en sa compagnie, et je l’espérais fortement pour celle-ci. Enfin. Je n'aspirais pas – non plus – à t'imaginer arborer cette image paternelle irréprochable. Impossible. Impensable. Non, pas toi. Et si c'était le cas, j'en ricanerais intérieurement. « Trois ans... » Me contentant de répéter ces propos, je devais très certainement en conclure que tu avais posé les pieds en ces lieux il y a de ça, trois ans, aussi. En y réfléchissant bien, je comprenais d'avantage ta connaissance plus poussée de ces lieux, contrairement à moi. La date de mon arrivée en ces lieux était encore floue. Je n'avais pas de souvenir précis concernant ce fait, malheureusement. C'est donc, tout naturellement que je me permis de balayer ma chevelure vers l'arrière de mon crâne tandis, que je pris l'initiative d'inspirer lourdement. Tes questions ravivaient en moi un bien grand nombre de souvenirs que je ne souhaitais guère aborder. Aussi bien, auprès de ta personne, que quiconque daignerait le faire. C'était difficile. Difficile à aborder. Difficile à avouer. Et pourtant... N'avais-je pas besoin de vider mon sac auprès d'une personne ? Je redoutais cela. Redoutais l'image péjorative que j'allais renvoyer face à ces confessions, et pourtant. Je pris la parole.


« J'ai fui, Jun. Je n'ai pas fait attention du lieu de ma destination, j'ai simplement pris l'initiative de rejoindre un côté familial, ici, à Nishinaka, c'était trop dur pour moi de rester là-bas. Trop dur de rester avec eux. » Déglutissant difficilement, j'en venais à amener mes jambes contre mon corps, bras entourant délicatement celles-ci au travers d'une tendre étreinte, j'en venais à reposer ma tête contre mes genoux avant que je ne puisse me permettre de poursuivre. « Tu sais, j'ai perdu la notion du temps depuis longtemps déjà... J'en serais presque à t'envier de te plaire autant dans ta vie actuelle. Enfin, c'est peut-être à cause d'eux, aussi... Tu sais, ma relation avec mes « parents » n'étaient pas des plus fructueuses – c'est d'ailleurs une grande première que je daigne utiliser ce mot afin de les définir, mais qu'importe – et puis, il y a un, ou, deux ans de cela, ils nous ont quittés. Je n'ai rien ressenti, à part un dégoût. Un dégoût de ne pas avoir pu connaître les raisons de leur engouement à mon égard, j'ai l'impression de sentir un poids peser sur ma conscience, et je ne peux rien faire. C'est blessant. » Pourquoi ? Pourquoi en étais-je venue à dévoiler mes ressentiments concernant ce sujet ? Je haïssais plus que tout, dévoiler cette faiblesse de ma personne. Et ce, bien plus auprès de ta personne. Il est vrai que j'avais souvent évité ce sujet au cours de notre adolescence et voilà qu'à la première occasion, je dévoilais cela, de but en blanc. Sans véritable explication. Sans véritable retenue. Je me sentais peut-être coupable de ne pas avoir arboré ce sujet dans le passé... Mais, le passé, reste le passé. Je n'avais aucun droit de ressasser celui-ci. Pas maintenant alors, que tu semblais arborer ta propre vie de la manière la plus heureuse qu'il soit. Je n'avais aucunement le droit de glisser cette part d'ombre au sein de ton quotidien. J'en avais déjà bien trop fait au vu de mon inattention et de l'état de ta chemise. C'est donc, tout naturellement que je pris l'initiative de détourner mon regard de ta personne. Fixant ainsi, cette simple tasse emplie de ce liquide de couleur noirâtre ayant trouvé refuge face à ma personne il y a quelques minutes de cela.

« Aller, va prendre ta douche... Grouille. » Repoussant très légèrement ton être à l'aide de l'une de mes mains, je ne souhaitais en aucun cas obtenir une quelconque pitié ou d'avantage de questionnement émanant de ta personne. Favorisant le fait d'éviter, plutôt que d'affronter, je ne changerais cela pour rien au monde. « Vite, sinon je te renverse cette nouvelle tasse où je le veux. »

Oui, trois ans. Et il trouvait ça un peu fou au final. Vingt-quatre et déjà en charge d'une enfant de dix. Parfois, il se demandait comment il fera quand elle aura besoin de conseils, d'aide, ou il ne savait quoi encore et qu'il sera tout simplement incapable de l'aider. Elle voudra forcément en parler avec une femme, déjà que maintenant, alors qu'elle avait à peine dix ans, il avait du mal à la suivre, à la comprendre. Et ça n'ira sans doute pas en s'arrangeant. De toute façon, Jun n'avait jamais ignoré ce détail quand il avait décidé de l'adopter, il savait que ça ne sera pas toujours facile et que Mei aura sans doute une phase où elle allait le détester pour ne pas la laisser faire tout ce qu'il veut, mais il voyait cela de façon positive : au moins, elle fera une crise d'adolescence normale. En foyer, ce n'est pas possible.

Son regard resta encré sur elle après sa question, mais il devait avouer qu'il ne s'était pas attendu à une réponse comme cela de sa part. Fuir ? Par eux, il se doutait qu'elle entendait sa famille, il se souvenait que sa relation avec eux n'était pas des meilleurs, sans qu'elle n'ait jamais réellement voulu lui expliquer. Ça l'avait beaucoup fait réfléchir à l'époque, sur elle qui avait tant de mal avec sa famille et lui qui n'avait longtemps rêvé que d'une chose : en avoir une. Maintenant, il avait peut-être trouvé un point d'encrage à son raisonnement. Avoir une famille était merveilleux, quand on pouvoir en choisir les membres.

Se plaire dans sa vie actuelle ? Ces mots arrachèrent un rictus au Chinois qui ne préféra même pas relever. Oh, il n'allait pas se plaindre de la vie qu'il menait ici. Elle était tellement mieux que celle qu'il avait auparavant ou que celle qu'il aurait pu avoir s'il n'avait pas rencontré les bonnes personnes au bon moment. Il n'affichait aucune réaction particulière en écoutant son discours, terriblement sérieux pour ne pas omettre le moindre détail de ce qu'elle lui disait. Il n'avait pas vraiment de moyen de se mettre à sa place, de comprendre ce qu'elle avait pu ressentir. Il savait que ce n'est pas normal d'éprouver du dégoût à la mort de ses parents, ça soulignait combien elle avait du souffrir par leur faute, combien ces années avaient été difficile pour elle.

A peine avait-il eu d'accumuler les informations qu'elle reprenait déjà la parole, l'envoyant prendre sa douche. Il fronça les sourcils de mécontentement, mais quelque part, elle n'avait pas tort, il ferait mieux d'y aller. La conversation lui semblait importante, et il préférait revenir quand sa tasse sera vide, ça l'angoissait moins.

« Soit, je reviens dans quelques minutes, ne bouge pas. La conversation n'est pas terminée. »

Jun avait des choses à dire et à comprendre, même si cette idiote avait souillé son vêtement, ce n'était pour autant pas une étrangère dont l'histoire lui passerait au dessus de la tête. Il savait qu'il était redevable à Hana pour beaucoup, de ce fait, il ne pouvait ignorer ce qu'elle venait de dire. Commençant à déboutonner sa chemine pour ne pas perdre de temps, il tourna immédiatement les talons pour se rendre à la salle de bain où il put retirer ce vêtement crasseux, ainsi que les autres pour se perdre sous la chaleur brûlante de l'eau contre son corps. C'était tellement étrange, de revoir une personne qui avait tant compté pour soi il y'a quelques années. Jun avait pris l'habitude de ne pas avoir trop d'attache avec les autres, plus par protection que pour une quelconque autre raison. À part cette famille qu'il avait eu enfant ou Mei, il n'y avait sans doute que Hana qui avait pu réellement compter pour lui. L'amour n'était pas tellement un concept que Jun comprenait, encore aujourd'hui. Il se demandait si elle le comprenait mieux que lui.

Rapidement, il évinça l'eau qui avait cette chance inouie de se poser sur son sublime corps, retrouvant des vêtement propre avec plaisir. Enfin. Il se sentait comme revivre désormais. Il ne supportait pas de se sentir sale ou désavantagé. Son apparence avait une importance capitale. Arrangeant sa magnifique chevelure, il vérifia une fois encore qu'il était absolument parfait avant de retourner au salon où elle se trouvait encore. Fort heureusement, d'ailleurs.

« Je vois que tu n'as rien renversé. Je suis très fier de toi », déclara t-il, un sourire moqueur sur les lèvres. « Tu voulais dire quoi par cet engouement à ton égard ? Tu sais, tu ne m'as jamais vraiment expliqué ce qu'il y avait avec eux à l'époque. Je savais que ça n'allait pas, que les choses étaient étrange mais pas plus. J'ai l'impression d'en apprendre plus alors qu'on ne s'est pas vu depuis six ans qu'en ayant passé trois avec toi. »

Un léger rire s'échappa des lèvres du mannequin en réalisant cette ironie. Peut-être que maintenant qu'ils avaient disparu de cette terre il lui était plus facile, voire naturelle, d'en parler ? Il n'en avait pas la moindre idée, la psychologie féminine, ce n'était pas pour lui.

« Tu as essayé de cherché par toi-même ? Dans la maison familiale ou d'en parler aux autres ? Pourquoi est-ce que tu as encore eu besoin de fuir alors qu'ils n'étaient plus là ? »

N'aurait-il pas été plus logique qu'elle s'en aille quand ils vivaient et lui rendaient la vie impossible ? Jun aurait pu comprendre, mais qu'est-ce qu'il y avait à comprendre ? Il ne savait pas. Plutôt, il n'en savait pas assez.

Moi qui pensais que, t'envoyer vaquer à tes occupations premières, me permettrais d'éviter d'avantage de questionnements... Ce n'était que peine perdue. Ta curiosité avait été piquée à vif et tu ne semblais pas vouloir, me laisser, m'en sortir indemne au travers de ce sujet si dérangeant. Un chemin rugueux au sein duquel je semblais perdue, et brisée de tout sens commun. Favorisant l'abandon et l'absence de recherche à une quelconque réponse, j'avais bien vite baissé les bras. Baissé, les bras et laisser cela sans réponse, pour le bien de mon propre moral et de mon esprit. Tout naturellement, je me permis donc de jeter un énième regard à ton attention avant que tu ne puisses définitivement quitter mes côtés. Me laissant, ainsi, seule avec mes propos remord du passé. Tasse de café reclus au creux de chacune de mes mains, je me contentais d'avaler ; gorgées, par gorger, le contenu de celle-ci jusqu'à parvenir à vider celle-ci. Les menaces n'avaient été que veines, jamais je n'aurais pu me permettre de vider le contenu de celle-ci contre ta personne, le sol, ou bien, l'un des multiples meubles se trouvant à mes côtés. Aussi immature pouvais-je être par moment, il m'était impossible d'agir de la sorte sans avoir une véritable raison. Enfin. Je tentais par tous les moyens de formuler de multiples phrases afin de rendre le tout bien plus... Compréhensif, mais je n'y parvenais que très peu. Les mots et les émotions se mélangeaient sans que je ne puisse faire quoi que ce soit contre cela et j'en venais à entretenir de la pitié envers ma propre personne. Était-ce possible ? Mes mains trouvèrent rapidement refuge contre mon faciès avant que je ne puisse inspirer longuement, les yeux clos. Trouve une solution, Hana ; daignait me répéter ma conscience, mais rien. Absolument rien. Et voilà que tu osais refaire surface. De l'engouement à mon égard ? En apprendre d'avantage sur moi après ces longues années d'absence ? Chercher par moi-même ? En parler aux autres ? Et enfin, pourquoi avoir fui ?

Ah, si je le savais moi-même, ce serait bien plus simple, à l'évidence. Et pourtant, je me devais de t'offrir une réponse face à ces multiples questions.

« Jun... » Une entrée en matière des plus déplorables qu'il soit, certes. Mais qui ne tant rien, n'a rien. Et je tentais d'amadouer celui-ci... Sans succès. « T'es vraiment têtu, quand tu t'y mets, y a pas à dire... Je n'en sais rien. J'ai essayé, je n'ai rien trouvé. Peut-être que j'ai gâché leur vie ? Je n'en sais rien. Personne n'a la réponse. Personne ne sait pourquoi. Après tout, j'étais la seule fille, alors, c'est peut-être l'unique raison à cela. Après tout, tu connais les lois chinoises. Les filles sont inutiles, d'après certains. » Un raisonnement idiot, certes, mais fort probable. J'avais – à bien de nombreuses reprises – osé émettre une telle idée, que je n'avais pas pu évincer de mon esprit, encore à présent.

« Pour ce qui est de fuir, ne penses-tu pas que tout être humain puisse obtenir le bonheur dans sa vie, au moins une fois ? Une seule fois ? En venant ici, j'ai cru bon de me rappeler toutes les bonnes choses que tu avais osé dire à l'intention de ce pays. Alors, peut-être que si je suis ici, au final, c'est inconsciemment de ta... « Faute », hm. » Non, je ne rejetais pas la faute sur toi, bien au contraire. Je te remerciais inconsciemment. Je te remerciais de m'avoir permis de connaître bien d'autres choses que ce que j'avais pu connaître au sein de notre pays natal, mais aussi, des connaissances que j'avais pu faire en ces lieux et bien d'autres points positifs, et ce, malgré les côtés négatifs qui pouvaient, tout aussi bien, faire irruption au sein de mon quotidien. « Dis, Jun. Crois-tu qu'un jour, je pourrais voir Mei ? » Un changement de sujet radical. Certes, mais qui me semblais nécessaire, voir même efficace au sein d'une telle situation. Après tout, Mei avait toujours su avoir de l'importance auprès de ta personne, alors, pourquoi ne pas raviver ce sujet afin de délaisser l'intention que tu portais à mon égard. Ne pouvais-tu pas faire un effort ? « Ou alors une photo, une toute petite photographie. »

Son prénom prononcé, il sentit une légère chaleur l'envahir, de la façon la plus stupide qui soit. Sans doute parce qu'il avait été prononcé à la chinoise, avec cet accent particulier qu'il affectionnait tant, très certainement parce que ça faisait longtemps qu'elle ne l'avait prononcé, du moins, qu'il n'avait entendu Hana le prononcer. Il y avait toujours cette impression de nostalgie quand elle parlait de manière général, mais son prénom, c'était différent. Ça notait la familiarité, la proximité qui restait là malgré les années écoulées. Mais il doutait que le moment était propice à devenir sentimental et Jun ne souhaitait pas le devenir. Il ne devait pas le devenir. Il n'avait pas envie de tomber dans ce genre maintenant.

S'il en avait le pouvoir, il voudrait pouvoir l'aider à comprendre ce que pouvaient cacher ses parents, les raisons qui expliqueraient sans pour autant justifier le comportement abominables qu'ils avaient du avoir envers elle. Qu'elle soit une fille pouvait être une raison. À l'orphelinat, en général, il y avait plus de filles que de garçon, et celles-ci étaient les plus chanceuses du pays, certaines se faisait tuer sans la moindre pitié. Heureusement que les choses changeaient peu à peu dans ce pays. Il n'empêchait qu'au fond de lui, il espérait que les parents Wang n'étaient pas stupides au point de lui avoir fait cela, de l'avoir traîté de façon indécentes sous prétexte qu'elle était une fille, un poids pour la famille qui partira vivre loin d'eux une fois mariée.

« Si personne n'a la réponse, la question perd son importance, non ? » Oh, c'était si facile de le dire, beaucoup moins de le faire. « Même loin de tout ça, ça te tracasse encore. »

Jun n'était pas si mal placé pour témoigner. Se torturer de questions sur ses parents et se contenter de réponses évasives, c'était ce qui avait rythmé une bonne partie de sa vie. Si avoir un fils représente une telle fierté, pourquoi ne pas l'avoir gardé ? Si sa mère était jeune, n'avait-elle pas une famille elle-même pour la soutenir ? Le genre de personne qu'elle était, la vie qu'elle avait, si elle était encore avec son père, comment il était. Il s'était souvent posé la question avant de tirer un trait définitif sur cela. On dit que la génétique forme qui on est, mais il refusait d'y croire. Il se voyait comme une création unique, et il souhaiterait qu'Hana puisse en faire de même. Tout simplement tirer un trait dessus.

Malgré lui, il sourit quand elle lui fit comprendre qu'elle se retrouvait un peu au Japon par sa « faute ». Quelque part, ça prouvait qu'elle l'avait écouté toutes ces années, et qu'il avait été assez convaincant pour lui donner envie de venir ici. Peut-être qu'il devrait s'excuser désormais pour publicité mensongère, ou en tout vas, lourdement amplifié. S'il pouvait vraiment retourner en Chine avec le même confort que lui offre le Japon, il le ferait sans l'ombre d'un doute. L'herbe semble toujours plus verte ailleurs et c'est en général loin d'être le cas.

« Et au final, tu as pu trouvé ce bonheur ici ? Je me demande si je n'ai pas moi-même exagéré durant ces années, à trop voir ce pays comme un el dorado dans toute sa splendeur. C'est sans doute la famille que j'avais à l'époque qui m'avait laissé pensé cela, ou la naïveté qu'on peut avoir en étant gamin. » Nishinaka n'est pas un el dorado, ce n'est pas forcément mieux que Shanghai ou Beijing. Cette ville était encore plus folle que la Chine ne peut l'être dans son entièreté. « Si c'est à cause de moi que tu es ici, j'espère que tu n'es pas déçue, je m'en voudrais un peu. »

Taquin, toujours. Il n'était pas personnellement convaincu d'avoir bien fait de venir ici, mais au fond, ce n'était pas si terrible, c'était mieux que ce qu'il avait avant. Au final, retrouver Hana n'était pas si étonnant, ils partageaient beaucoup de projets et de rêves stupides, comme ceux que tous les adolescents amoureux pouvaient avoir. On tentait de nouvelles choses ensemble et on s'imaginait qu'on essaiera tout ensemble, qu'on ne se quittera jamais. La stupidité de l'époque, mais au fond, il éprouvait quelques regrets quant à cette époque. Si sa vie ne lui convenait pas, il y avait cette aspect rassurant d'avoir toujours quelqu'un à ses côtés, de ne pas sombrer dans la solitude.

À cette époque, c'est vrai qu'il parlait souvent de Mei, il pouvait lui parler de son foyer, des idiots qui y vivaient, mais Mei ressortait le plus souvent. Toujours à grimper sur son dos pour voir ce qu'il faisait, à répéter des mots en japonais pour l'aider dans ses cours. Il afficha un large sourire quand elle lui demanda à la voir, ne se faisant pas prier pour sortir son téléphone. S'il y avait bien une personne qu'il aimait plus qu'il ne s'aimait lui-même, c'était bien cette petite-fille. Il en était si fier. Sans attendre, il s'approcha d'Hana, s'installant à côté d'elle sur le canapé, mettant son téléphone entre eux.

« J'ai tellement de photos d'elle, je crois que mon téléphone en est remplie. » Un petit rire quitta ses lèvres tandis qu'une photo apparu sur l'appareil. « Elle date de cet été, on était à Okinawa quelques jours pour des vacances. Ça c'était en mars dernier, pour la rentrée, elle a changé d'école pour se rapprocher de l'appartement, elle est complètement fan de son uniforme. »

S'en suivait, d'autres photos, encore et toujours. Il ne parlait pas de Mei avec n'importe qui, il préférait évité. Il était rare qu'on le comprenne. Pourquoi un garçon de 21 ans adopterait une gamine de sept ? C'était bizarre, et si c'était malsain ? Vu la sexualité complètement délirante des Japonais, Jun ne tenait pas à en parler avec eux. Il les trouvait déjà assez dégoûtant ainsi.A

« Tu devrais venir la voir une fois. Ça fait longtemps qu'elle n'a pas pu parler chinois avec une fille, c'est encore difficile pour elle de bien s'exprimer en japonais. Si un soir tu ne fais rien, tu peux venir dîner, ou on sortira, peu importe. Ça lui ferait plaisir. »

A lui aussi ? Oh non, pas du tout. Juste à Mei, uniquement à Mei.

Comme pouvait-il incarner cet être à la fois si détestable, et tout aussi adorable ? Je n'en avais aucune idée, et mon esprit non plus, par ailleurs. Persistais, au sein de celui-ci, l'image de sa personne que j'affectionnais tant. Et que j'avais tant apprécié au travers de notre passé commun. Il savait lire en moi et discerner mes pensées au travers de ces multiples propos que j'avais tenus à son égard afin de répondre à ces multiples questions concernant la relation que j'avais entretenue envers mes « géniteurs », mais aussi, de ma venue en ces lieux. Tracassée ? Je l'étais, à un point inimaginable. Et pourtant, je tentais de faire face à mon propre quotidien, évinçant ces idées de mon esprit. C'est donc, tout naturellement que je me permis d'approcher d'avantage mes jambes repliées contre mon corps avant que je ne puisse me permettre de laisser mon dos heurter délicatement le dossier de ce canapé qui semblait si confortable. Une moue s'emparant de mes lippes, au final, ta question semblait plutôt intéressante. Étais-je véritablement heureuse ? Je suppose que oui. J'avais obtenu une vie professionnelle des plus agréable qu'il soit, un appartement – en tout solitude -, agrandis mon cercle d'amitié. Et ce, malgré le simple fait qu'il me manquais certaines choses... Je semblais être heureuse. Oui. Je semblais l'être. Je me contentais donc, de hocher naïvement la tête de haut en bas afin de répliquer d'une manière positive concernant ce fait. Geste qui se permis de clore cette discussion quelque peu dérangeante concernant mes déboires du passé. Le présent évinçant cela tel un simple coup de vent face un château de cartes ; les photographies prises de Mei défilaient sous mes yeux tandis que large sourire s'emparait de mes lippes à la simple vue de ce petit être si adorable. « Han... » Une simple murmure et voilà que j'en venais à apporter mon index contre l'écran de cet objet de nouvelle technologie tant apprécie au sein de cette ville afin d'agrandir certains photographies afin de me retrouver bien plus attendrie que je ne pouvais l'être auparavant.

« On voit bien que ce n'est pas vraiment ta fille, hein... Elle est bien trop adorable, ou mignonne, pour cela. » Une légère taquinerie glissée à ton égard et voilà que je me permettais de laisser un ricanement trahir le sérieux au sein duquel je semblais avoir été plongé il y a de ça quelques minutes auparavant. Croire que tu avais pris l'initiative de prendre ce petit être à tes côtés me portais à croire que tu avais malgré tout obtenu une certaine maturité au fil des années, et je ne pouvais qu'être plutôt... Fière, de voir, finalement, qu'un point positif s'était glissé au sein de ton esprit. Et ce, malgré ces côtés forts détestables qui persistaient. Malgré tout, je devais bien avouer que, en ces lieux, tu semblais bien mieux imbu de ta personne. Tout du moins, bien moins que tu n'avais pu l'être au travers de notre fortuite rencontre. Rencontre qui nous avait permis d'en arriver à ce stade-là. Regrettais-je ? Plus maintenant, je suppose. Au fond, j'avais toujours aspiré à te retrouver. Dans une bonne, ou mauvaise situation. Vouloir se remémorer de bons instants passés n'avait rien de mal, n'est-ce pas ?

« Vraiment ? Je peux vraiment, vraiment ? » D'un geste automatique, mon corps s'était retourné vers les tiens, l'une de mes mains s'étant reposée contre l'une de tes épaules, voilà que je me permettais de secouer très légèrement ton être au vu du contentement ressentis au travers de tes propos. « Bien sûr que je le veux ! Enfin... Quand vous le pourrez bien sûr... » Reprends-toi, Hana. Me hurlais ma conscience. Je devais bien avouer que, de nouveau, utiliser ma langue maternelle me faisais amplement plaisir. Mais, était-ce véritablement le seul point qui daignait m'offrir un certain contentement ?

Déglutissant difficilement, j'en venais à mordiller ma lèvre inférieure avant que je ne puisse me permettre de reprendre un certain sérieux face à cet engouement soudain. « Je lui apporterais deux, ou trois, petites choses que tu ne pourras pas lui offrir, puisque, après tout, tu es un homme, tu ne dois pas connaître ça. Hein. » De nouveau, voilà que les taquineries reprenaient le dessus sur une conversation convenable et je devais bien avouer qu'au final... J'y trouvais mon compte. Qui aime bien, châtie bien.

« Enfin. Jun, ne devions-nous pas aller acheter une nouvelle chemise ? Tu sais très bien que, sinon, je vais aller dans la salle de bains chercher celle que j'ai salie, et fuir jusqu'à chez-moi, à toi de voir. Fais ton choix. »

Oui, « han », c'est aussi ce qu'il peut dire d'elle tellement Mei est adorable. Un petit sourire s'était glissé sur ses lèvres en observant son ex-petite-amie regarder les photos de la petite. Même si Mei l'agaçait parfois et qu'elle était pénible, légèrement capricieuse et exigeante, il ne voudrait s'en séparer pour rien au monde. La remarque d'Hana ne le vexa même pas, il savait qu'elle ne le pensait pas, il était si parfait. En soit, c'est vrai que ça se voyait qu'il n'était pas le père de Mei, il l'aurait eu terriblement jeune et n'aurait sans doute pas pu avoir la vie qu'il avait désormais s'il avait du s'occuper d'elle à sa majorité, déjà qu'il avait du mal à l'époque à s'occuper de lui tout seul, alors d'elle, ça aurait été la fin de tout.

« Comme tu te mens à toi-même, c'est terrible. On est plus beaux que les Beckham, réalise la perfection. »

Pour appuyer ses paroles de toute sa maturité, il lui offrit un poke de ses divins doigts contre son crâne. Mei était la plus belle des enfants de dix ans, la plus mignonne aussi et celle avec le plus de style. Il refusait que l'enfant qui vivait avec lui, aussi adorable puisse t-elle être, ressemble à une gueuse. Interdiction. Bon, la petite était aussi folle de mode que lui, elle avait grandi à ses côtés, l'avait suivi dans ses excentricités qu'il pouvait déjà avoir au foyer alors c'était un peu gravé en elle comme le kimchi est gravé dans la tête des Coréens. C'était une partie de leur culture bien à eux.

Laissant le silence s’installer, il ne la quittait pas du regard en attendant qu'elle réagisse à sa proposition. Elle n'avait pas beaucoup changé depuis le lycée, elle avait l'air moins naïve, sans doute, et plus adulte, ce qui était normal. Ils n'étaient pas vieux, mais ce n'était plus des gamins non plus. Ah ce moment compliqué de la vie où on doit tout gérer soi-même.
Jun était ravi de l'entendre accepter. Ça fera plaisir à Mei, sans l'ombre d'un doute. Il craignait un peu qu'elle ne devienne trop « Japonaise » à force de vivre ici. Forcément, ça allait arriver si elle grandissait ici. Ce n'est pas comme si elle avait déjà été réellement confronté à la vie typiquement chinoise dans son pays d'origine, et ici, à part la langue qu'ils utilisaient pour communiquer et la nourriture qu'ils mangeaient, il n'avait pas vraiment la tête à se la jouer parfait petit Chinois pour garder leurs origines en vie. Cependant, il appréhendait légèrement la situation, de peur que Mei ne se fourvoie dans ce que représentait Hana. Non pas que la petite cherchait à reformer le cliché de la petite famille en ayant une « Maman » mais elle entrain facilement dans une phase de romance dès qu'il y avait une personne de sexe féminin qui lui adressait la parole. Alors si en plus elle est Chinoise, jolie et qu'il l'a invité à passer du temps avec eux, elle risque de partir dans de drôle de conclusions.

« C'est quoi ce commentaire sexiste ? Égalité des sexes, tout ça. En plus, je te rappelle que j'ai quasiment passé toute ma vie entouré de filles et de leurs problèmes si terrifiants. Je sais ce genre de chose. » Fierté, fierté, il savait surtout qu'elle avait raison, fichtrement raison. Il était un peu tôt pour cela mais il se doutait que Mei ne rêve pas d'aller acheter son premier soutient-gorge avec lui ou de lui parler de ses premières règles. « Maaais, si ça peut te faire plaisir, je t'en prie. Rien de bizarre hein ! »

Parce qu'il était évident que Hana achèterait des choses bizarres à Mei, c'était ce qu'il y avait de plus probable. Allez, il est con, c'est vrai, mais on va continuer de reconnaître qu'il est beau au moins. C'était le plus important, de garder ça en mémoire. Dans tout les cas, ça lui faisait intimement plaisir de se dire que Mei pourra voir une autre personne de son pays. Enfin, autre que cette petit vieille qui venait de la province Fujian et qui se demandait elle même ce qu'elle foutait au Japon. Mais une dame charmante, cela dit.

« Wowowow. C'est fou, la violence qu'il y a en toi, tout de suite il faut que tu me menaces. Allez, lève toi, on y va. »

✧ ✧ ✧.

Rien, rien ne semblait lui convenir, et il passait son temps à critiquer, tirant Hana à sa suite sans réellement y prêter attention. Ah, s'il avait plus de temps, il se ferait ses propres vêtements au lieu de devoir passer par ces magasins prévu aux gueux. Ce n'était pas possible sinon. Et on appelait ça des créateurs ? Et c'était des boutiques de luxes ? Qu'on ne se moque pas de lui messieurs, dames, il n'était pas dupe et savait qu'il se faisait profondément entourloupé ici même. Heureusement qu'il ne comptait pas vraiment faire payer une chemise à la demoiselle sinon ce serait la catastrophe.

« Hana ? Mais tu veux pas avancer plus vite ! Déjà que j'ai l'impression de perdre mon temps ici. Tu sais ce qu'on devrait faire ? Prendre un avion, aller à Paris et chercher là-bas. Ce pays est vraiment excentrique dans le mauvais sens du terme. Regarde, c'est dégueulasse ! »

Oui, ça, cette chemise Versace affiché en vitrine avec un prix exorbitant. Dégueulasse. Comme le café d'Hana, sans doute. Ah, il était hors de lui qu'on lui fasse perdre son temps ainsi, surtout avec des choses si laides. Et bien évidemment, qui était fautif de tout cela ? Hana, encore. C'est fou, le temps qu'elle lui faisait perdre aujourd'hui et le nombre de choses dont elle était coupable, en si peu de temps.

Un énième ricanement se permit de trahir le silence au sein duquel je m'étais retrouvée plongée suite à mes précédents propos avant que je ne puisse me permettre de me relever, à mon tour, voilà donc que mon « engouement » concernant l'idée que nous devions nous rendre en ville afin de sustenter tes désirs d'obtenir une nouvelle chemise afin de remplacer celle que je m'étais permise de tacher par mégarde. Mauvaise action, qui allait, très certainement, me suivre au travers de bien longues semaines. Oui, tu n'allais très certainement me laisser m'en sortir indemne si facilement, non. Impossible. Impensable. N'est-il pas ? C'est donc, au travers de ce léger mécontentement intérieur que j'osais rejoindre l'entrée afin d'enfiler – une nouvelle fois – cette simple paire de basket de couleur noirâtre, tout en réajustant bien vite les vêtements que je portais. Vêtements, qui, en soit, semblaient forts différents de ceux que tu arborais. À l'évidence, je n'avais pas omis l'idée – ce matin, en m'habillant – que je pourrais te croiser en ces lieux. J'avais donc, opté, pour une certaine simplicité. Prenant les premiers vêtements qui eurent la chance de se trouvant sous mes mains. En retard, moi ? Bien sûr. Et toute cette précipitation... Pour rien, au final. Je devrais très certainement faire un effort lors de notre prochaine rencontre... Histoire, de. Je demanderais, par ailleurs, conseil auprès de l'une de mes connaissances. Mes goûts en matières de mode semblaient plutôt dérisoires. Je l'avouais, non sans mal.




Traînée, çà, et là. Encore, encore, et toujours. Acquiesçant, hochant la tête à de multiples reprises tout en dénigrant certains choix, j'étais déléguée au simple rôle de « suiveur et larbin ». À mon plus grand regret, par ailleurs. Mais... Je ne pouvais en aucun cas nier les propos que tu daignais tenir à l'égard de ces multiples vêtements de luxes mis à disposition pour des clients de ton envergure. Rien ne semblait être plaisant, ou s'attirer ses grâces et au final, je ne pouvais qu'être en accord avec tes propos. Il est inévitablement réalisable que le pays du soleil levant possédait des goûts forts étranges, parfois. « Mais... Ce n'est pas de ma faute, à moi. » Une moue légèrement accentuée se glissant contre mes lippes, je me permettais de secouer naïvement l'un de tes bras avant que je ne puisse me permettre d'extirper ton être hors de cette bâtisse. Les propos acerbes que tu tenais à l'égard de ces vêtements avaient poussé les vendeurs à porter un regard incertain à notre égard et une certaine gêne résidait en ma personne. « Si Monsieur le raffiné veut bien se calmer, hein. Il doit bien y avoir quelque chose de bien, ici... » J'aspirais à croire mes propres paroles, de peur de devoir subir ce calvaire de longues heures, encore. C'est donc, tout naturellement, que je me permis de maintenir une pression contre l'un de tes bras afin de t'empêcher de réaliser le moindre mouvement tandis que j'extirpais mon téléphone portable dans mon sac à main à l'aide de ma main libre. Une recherche effectuée sur le net et voilà qu'une simple boutique semblait sortir du lot. Celle-ci possédait – d'après les commentaires indiqués ci-dessous – un goût fort inspiré des pays issus de la culture européenne. Pourquoi ne pas s'y rendre ? D'un simple geste, je démontrais ceci face à ton visage afin d'attirer ton attention. « Là, allons-y. Et ne râle pas, ce serait plutôt à moi de râler dans ces cas-là... T'es pire qu'une fille, ce n'est pas possible, hein... » Rechignant de nouveau, voilà que je suivais simplement les ruelles et rues principales qui nous entouraient afin de nous rendre auprès de ces lieux au sein desquels, j’espérais, tu allais trouver ton bonheur. Aussi difficile, semblais-tu être.

Par ailleurs. Curiosité oblige, au sein de la bâtisse, je me permettais de te laisser vaquer à tes occupations tandis que j'observais les multiples vêtements féminins mis à disposition tandis que ta voix se fit de nouveau entendre. N'y prêtant qu'une infime attention, aussi bien envers ta voix, que les pris exorbitant affichés, je rêverais très certainement de porter ceux-ci au travers de mes rêves les plus fous. Et puis, après tout. Oserais-je, un jour, porter des vêtements similaires à ta personne ? Je suppose que non. Fierté et image oblige, je n'étais pas à la hauteur.

« Alors, hm, tu trouves ton bonheur ? Idiot. »

Pas de sa faute ? C'était toujours de sa faute, entièrement de sa faute. Jun n'aimait pas ne pas trouver quelque chose d'intéressant et il avait l'impression de perdre son temps. Le temps, c'est de l'argent, et il aimerait dépenser son argent de façon utile, dans des vêtements hors de prix qu'il pourra admirer des heures tellement ils sont beaux et vont parfaitement à son corps de dieu. Mais Hana ne tentait même pas de le comprendre. En même temps, vu sa tenue, il se doutait qu'elle ne rêvait pas en Gucci et c'était bien dommage. Il la trouverait tellement plus séduisante si elle faisait un peu plus attention, tellement plus sexy. Oh oui, au lieu de sortir avec des baskets converses comme ça, sans prévenir. Choquant, outrant.

Son regard s'était posé sur elle, profondément perplexe. Elle ne comprenait pas tout cela, ce besoin de perfection qu'il s'exigeait. Il était trop beau pour mettre du moche. Elle devrait le savoir, elle devrait le voir, c'était tellement évident. Auparavant, bien évidemment, il n'était pas autant obsédé par ses vêtements, mais c'est principalement parce qu'il n'avait pas les moyens de s'acheter les vêtements qui le faisaient tant rêver. Il pouvait customiser ceux qu'on lui donnait au foyer, avec le peu qu'il avait, mais ça ne valait en rien ce qu'il aurait pu faire s'il avait eu les moyens. Mais tout cela n'avait pas d'importance, car les moyens, il les avait désormais. Et il en profitait sans doute un peu trop, mais il voyait ça comme un moyen de rattraper le temps.

Une boutique aux allures occidentales ? Il ne la connaissait pas. Etrange. Lui qui pensait tout connaître des boutiques de Diamonds Street, c'était Hana qui lui dénichait ce qui semblait être une pépite d'or. Il haussa les épaules, reposant le chiffon qu'il tenait dans ses précieuses mains. Il avait froncé les sourcils à sa remarque sur son comportement « de filles », trouvant choquant de ne pas comprendre l'importance du style. Hana était incontrôlable, elle devrait faire une émission de relooking. Il y songeait tandis qu'il entrait dans cette nouvelle boutique, détaillant les vêtements exposés avec un vive intérêt pour ces derniers. Toujours pas convaincant. Peut-être était-ce un de ces jours de rejets de la mode actuelle qui le faisait regretter d'être encore dans le mannequinat alors qu'il pourrait faire ce qu'il voudrait réellement faire ; créateur ? Dieu seul le sait.

Jun daigna la regarder quand elle s'adressa à nouveau à lui, prêt à lui répondre quand elle l'insulta une fois encore. Terrible. Comme si ce mot était collé à ses lèvres encore et toujours et qu'elle avait besoin de le dire. Un tic dont elle n'arrivait pas à se défaire, qui l'obligeait à le dire encore et encore, inlassablement. Ou simplement elle ponctuait la fin de ses phrases, oubliant que le point ne se prononçait pas et au lieu de cela elle disait « idiot » ? Suspense. Posant ce qu'il tenait, il pivota pour lui faire face, prenant son visage entre deux doigts de manière à pincer ses joues tandis qu'il la secoua un peu.

« C'est la troisième fois que tu me traites d'idiot aujourd'hui, si tu crois que tu peux te permettre cela sans risquer le gourou divin, tu te trompes, pauvre mortelle. Tu regretteras. » S'il avait tenté d'être crédibles dans ses menaces, son sourire le trahissait un peu trop bien qu'il comptait fermement sur sa vengeance. Personne n'insultait trois fois Gao Jun d'idiot sans en payer le prix ! « Non, je ne trouve pas mon bonheur. Tu sais, c'est comme quand on a eu une petite-amie exceptionnelle, toutes celles qui suivent semblent sans intérêt... » Son regard s'était soudainement fait plus sérieux tandis qu'il la regardait dans les yeux, son visage toujours prisonnier jusqu'à ce qu'il exerce une dernière pression et la relâche, haussant les épaules. « Heureusement que je ne connais pas ça ! »

Sourire malicieux, air innocent et il s'éloigna d'elle pour changer de rayonnage. Bon, peut-être qu'il connaissait un peu ça mais il aurait préféré se faire passer dessus par tout les gueux de Nishinaka plutôt que de l'avouer. Jamais. Oh grand jamais il n'avouerait ce genre de chose devant elle. À la place, il allait se contenter de farfouiller dans les vêtements un peu plus loin. Chez les femmes. Oh, parce que s'il ne trouvait rien qui conviendrait à ses goûts, il refusait de considéré qu'il avait perdu son temps en venant ici, il allait trouver quelque chose pour elle et entama une sélection de robes qui devrait y aller, plutôt décontracté, qu'on peut mettre au quotidien, mais toujours distingué. Après avoir encore pris quelques tenues, il retrouva Hana qu'il avait perdu de vu, bien trop absorbé par son « travail », il lui tendit les vêtements qu'il avait trouvé.

« Tiens, va essayer ça, on verra si ça te va, normalement la taille et la coupe devrait t'aller, les couleurs aussi. Considère ça comme un moyen de payer ta dette pour la chemise, je me sentirais infiniment mieux si tu les essaies. »

Une lubie perverse que de mater son ex dans des vêtements de luxe ? Oh, non, pas du tout. Un petit peu, d'accord, mais le look trop décontracté jeans basket, ça le stressait et l'angoissait, il était à ça de faire une crise d'angoisse. Vraiment, on ne dirait pas comme ça, mais il était à ça de le faire. Et on notera que Jun n'est jamais dans l'exagération, grand dieu jamais, pas lui. Tout le monde, mais pas lui !

Inévitablement, la boutique proposée par mes soins ne semblait aucunement sustenter les moindres désirs que Monsieur pouvait avoir. Ayant des attentes, ou des goûts bien plus prononcés qu'en général. Ces multiples vêtements mis à disposition n'attiraient pas ton regard, ni même ton envie de porter ceux-ci, par tous les moyens. Tu semblais dénigrer le travail du créateur concernant ces pièces masculines se trouvant face à toi, trouvant bien plus d'intérêt à me « torturer » suite à mes précédentes paroles. « Idiot ». Oui, cela semblait saillir ta personne à la perfection. Ce simple terme définissant une personne d'une intelligence moins... Obtus, c'est ce, à quoi tu ressemblais actuellement lorsque tu ne semblais guère trouver bonheur au sein de ces antres de luxes. Mon visage se laissant, alors, secouer de droite à gauche, je me laissais faire. Naïvement. Les yeux à demis-clos tandis qu'une légère moue s'emparait de mes lippes. Non, je n'avais pas peur des représailles, plus maintenant. Je n'avais plus peur de rien. Mis à part de l'orage... Peut-être. Mais cela semblait être un tout autre sujet au sein duquel je ne souhaitais aucunement m'aventurer en ta compagnie. Bien au contraire, d'ailleurs. Je n'appréciais que très peu démontrer mes faiblesses, alors, face à toi, cela semblait inimaginable. Pas maintenant, non. Je l'avais déjà bien été au travers du sujet relatant les faits passés, au propos de mes géniteurs et de mon enfance quelque peu difficile. Je me contentais, alors, de ronchonner intérieurement tandis que je me permettais de répliquer à tes propos au travers d'un simple murmure. Comme une simple réponse envers moi-même, tu étais déjà bien trop loin de moi pour parvenir à entendre cela. « Fais le malin tiens, hmpf... » Ajoutant à cela, de la manière la plus enfantine et puérile qu'il soit : j'osais extirper ma langue de ma cavité buccale afin de l'offrir à ton intérêt en guise de mécontentement. Alors, d'après lui, je n'avais pas été une ancienne petite-amie exceptionnelle ?

Fronçant les sourcils, bras croisés sous ma poitrine, je traînais des pieds tout en marmonnant de multiples propos à ton égard au sein du dialecte de la campagne au sein de laquelle j'étais née au sein de la République populaire de Chine. Dénigrant chacune de tes actions, je trouvais cela fort inutile de vouloir persister à rester en ces lieux, si, rien ne semblait attirer ton attention. Autant partir, et parvenir à trouver une autre boutique au sein de laquelle tu trouverais, peut-être, ton bonheur. Mais... Ce qui suivit me surpris d'avantage. Ces quelques robes présentées face à moi, tes propos, voilà donc que tu voulais jouer à l'étape relookage... ? Surprenant. Mais pas vraiment, en même temps. Peut-être avais-tu honte de mon accoutrement ? Peut-être avais-tu véritablement honte de l'image que je pouvais renvoyer à autrui ? Ceci ne me plaisait guère. Et pourtant, je flanchais. Fort naïvement. « Si ça peut effacer la dette, je veux bien faire un effort, va... Mais c'est bien parce que je me sentirais coupable sinon, hein. »

Un lourde inspiration prise, voilà que l'une des multiples vendeuses présente en ces lieux dénigrait ma présence d'un simple coup d’œil. Je le comprenais bien. « Qu'est-ce qu'une gamine de son envergure fait ici, en ces lieux, mais surtout, en compagnie d'un homme tel que lui ? » Il avait attiré bien de regards lors de notre chemin jusque ici. Je ne pouvais en aucun cas le nier. Je l'avais senti. Ressentis. Et vu, par la même occasion. Mais qu'importe. Je faisais à présent mon entrée au sein de l'une des cabines mises à disposition afin de parvenir à essayer l'une des robes préalablement choisies par tes soins. La première ? Simple, agréable visuellement ; mais aussi, à porter apparemment. Mes vêtements ôtés, je daignais enfiler celle-ci avant que mon regard ne puisse se porter envers ce simple miroir face à ma personne.

Depuis combien de temps n'avais-je pas porté de vêtement similaire à celui-ci ? Fort longtemps. Et, aussi longtemps que je m'en souvienne, cela semblait être lors de mon dernier jour au sein de la République populaire de Chine. Un adieu à ma famille, mes amis. Faire bonne figure. Leur offrir une énième belle image de ma personne.

« Je te préviens, si tu te moques, je te frappe à la sortie, avec tout l'amour que je te porte, et je dirais simplement à Mei qu'un nouvel idiot t'a renversé sur la route, sans faire exprès. Bien sûr. » Uniquement mon visage était sorti lorsque je m'étais permis de débiter ces propos avant que je ne puisse finalement me résigner à sortir. Était-ce le bon choix ? Il était bel et bien trop tard. Les joues légèrement rosies par la légèrement gêne ressenties à cet instant, me montrer ainsi vêtu face à toi était très certainement une grande première.

« N'ose même pas... Ricaner, je te préviens. » Un simple tour sur moi-même, et voilà que j'avais déjà honte. Honte d'être ainsi, face à toi, honte d'avoir honte, honte... Une simple honte.

Effacer une dette en lui faisant essayer des vêtements, charmante idée qu'était celle de Jun actuellement. Beaucoup aimerait rembourser leurs dettes ainsi, mais qu'on soit d'accord, si elle n'était pas jolie ou peu intéressante, il y avait fort à parier que la dette aurait été monétaire ou de ne plus imposer sa laideur à Jun qui avait beaucoup de mal à le supporter. Il méritait un peu de beauté dans ce mon de brut. Surtout lui, Gao Jun, merveille inavouée de ce monde que bien trop peu de gens estimait à sa juste valeur, sa valeur suprême et géniale. Un jour, il sera reconnu pour cela. Un jour, ça viendra.

Laissant les vêtements aux bras de la demoiselle, il la laissa gagner les cabines tandis qu'une des vendeuses était venue s'adresser à lui, l'ayant visiblement reconnu. Quelle honte serait-ce pour elle de travailler dans ce milieu et de ne pas l'avoir reconnu. Elle lui parla de son magasin, de ses vêtements, attendant sans doute des éloges mais avait-il sincèrement l'air d'avoir le temps d’éloge ce magasin ? Heureusement qu'en ce qui concernait les femmes, ils avaient de meilleurs chois, plus cohérents et intéressants. Enfin, à voir encore sur Hana, si cela la mettait vraiment en valeur ou pas.

Il s'approcha d'ailleurs de la cabine, songeant qu'elle allait bientôt avoir enfilé la première tenue et il ne s'y trompa pas quand elle sortit sa tête pour... Le menacer ? Comme s'il allait se moquer d'elle pour être mieux habillée ! Elle aurait du craindre qu'il ne se moque en la revoyant avec ses converses et son jeans « boyfriend ». Ce serait bête de se moquer d'elle quand il choisit ce qu'elle porte.

« Ah, si tu fais ça, fais au moins ton crime proprement pour qu'on ne te soupçonne pas et prends la garde de Mei, je veux pas qu'elle se fasse élevé par une famille japonaise qui lui apprendra à fantasmer sur un dessin animé. »

Oui, cette folie étrange des Japonais à fantasmer sur toutes les folies possibles et inimaginables. Des dessins animés, ou des mangas, des morceaux de papier parfois. La sexualité nippone avait tendance à presque outré le Chinois qui n'arrivait pas à comprendre ce genre de chose. Oh, pas qu'il soit coincé à ce niveau la, bien au contraire. Pas assez, d'ailleurs, quand il y pensait, avec ces idées folles de « nouvelles expériences » quand il était arraché dans les bars. Plus jamais de nouvelles expériences d'ailleurs, il allait s'enfoncer ça dans la tête mais le mal était déjà fait à ce niveau là, il allait juste le refouler dans un coin de sa tête avec tout ce qui pouvait le dégoûter déjà.

Se reculant un peu, il fit un geste las vers elle, l'encourageant à sortir de cette cabine pour lui montrer le « chef d’œuvre ». Ils n'allaient pas rester des années sur cette même tenue ! Quand elle prit enfin la peine de sortir, un large sourire apparut sur les lèvres de Jun, s'attendant sans doute tout à fait à un pareil résultat sur elle. C'était comme si une autre femme venait de sortir. « Merveilleux ! » s'exclama t-il, en japonais, étrangement, alors qu'il continuait à la détailler, un sourire profondément satisfait sur les lèvres.

Sans attendre, il s'approcha d'elle, arrangeant un peu quelques détails comme le col ou les manches pour que la robe tombe parfaitement. Elle était infiniment plus mignonne ainsi, pour aller travailler ou simplement faire ce qu'elle avait à faire dans la journée, peu importe. Il était conquis par ce style et s'auto-congratulais devant ce chef d'oeuvre.

« Tu es bien plus belle ainsi, je ne sais pas ce que tu fais comme métier, mais si tu arrêtes de rougir ; lève un peu plus la tête et prends confiance en toi, avec une tenue comme ça, tu ne peux qu'assurer. Bon, tu risques de tuer quelqu'un avec ces jambes, mais peu importe, ça en vaut la peine. »

Ses jambes, autres merveilles de ce monde, avec lui. La tenue était plutôt sage mais sur elle c'était diablement sexy et Jun tentait du mieux qu'il pouvait de ne pas trop relever ce détail, de ce concentrer sur l'aspect général sous un regard neutre et objectif mais... Sérieusement, ses jambes divine de déesse Chinoise perdue dans ce pays de gueux. Trop de perfection, il devait tenter de survivre.

Sans conteste. Mon crime envers ta personne sera réalisé à la perfection, si je me devais de le réaliser, un jour. Je ne laisserais aucune trace, uniquement de la violence, de la rage, et une pointe d'amour à ton égard. Parfait, n'est-ce pas ? Je prendrais, bien évidemment, soin de garder ce petit être issu de la culture chinoise à mes côtés. Inévitablement, je ne pourrais aucunement me permettre d'abandonner un être si... Adorable. Et ce, même si la simple image de cet être si angélique parviendrais à me remémorer ta personne, je me contenterais de faire avec. Voilà donc ce qu'il se trimerait au sein de mon esprit si j'étais véritablement capable d'agir de la sorte, mais, au fond... J'en étais bel et bien incapable. Incapable de commettre le moindre crime, aussi quelconque soit-il. Et pourtant, je gardais le silence concernant ce simple fait. Me contentant, alors, d'afficher cette mine à la fois gênée, et boudeuse. Les regards se portant sur ma personne ne faisant qu'accentuer cette gêne. Que ce soit, de ta personne, ou bien, de cette vendeuse qui se disait très certainement, au fond d'elle, que je souillais ces vêtements de si grande qualité. J'aurais souhaité pouvoir lire au sein de mon esprit afin de répliquer. Mais, c'était tout aussi impossible. Irréalisable. Une pure fiction utilisée au travers de multiples créations hollywoodiennes qui en faisait rêver plus d'un.


« Depuis quand, es-tu si gentil ? » Sans prendre garde, ces quelconques propos s'étaient échappés de ma cavité buccale sans que je ne puisse parvenir à le stopper en si bon chemin. À l'évidence, j'étais surprise. « Merveilleux, prends confiance en toi, tu ne peux qu'assurer, tu risques de tuer quelqu'un avec ces jambes ». Ces mots faisaient donc partie de ton vocabulaire si acerbe, alors ? Je ne manquais pas de me « moquer » gentiment à ton égard, et ce, en me contentant de glisser délicatement l'une de mes mains sur le haut de ton crâne avant que je ne puisse me permettre de frapper très légèrement celui-ci. « Jun, Jun, Jun, tu devrais reprendre tes esprits, sinon je vais retomber sous ton charme. Tu sais, le temps où tu étais gentil, simple, et à la fois légèrement chiant ? Comme maintenant, tu vois. »

De nouveau, j'agissais puérilement et laissais ma langue trahir ma maturité au travers d'un simple geste légèrement accentué avant que je ne puisse prendre la fuite au sein de la cabine d'essayage. Sans conteste, je favorisais les vêtements de couleurs sombres. Allez savoir pourquoi, mais je trouvais cela plus... Simple. Agréable à porter. Et ce, malgré l'image terne que cela pouvait renvoyer envers autrui. Peu m'importe. Chaque goût se trouve dans la nature, je n'étais pas une exception concernant ce simple fait. Loin de là. Même. C'est donc, après une légère difficulté que je parvins à ôter cette première robe. Replaçant celle-ci convenablement sur le cintre, peut-être, qu'un jour, je parviendrais à l'obtenir. Après une paye fort méritée, une récompenser envers ma propre personne. Est-ce mal ? Peut-être avais-je craqué. Uniquement pour ce vêtement luxueux. Uniquement pour cette pièce. Non, je ne souhaitais en aucun cas plonger au sein d'une frénésie de mode similaire à la tienne. Non, jamais. De multiples claques glissées contre mes joues, je tentais de parvenir à m'aider moi-même afin de reprendre mes esprits. Je divaguais, et cela était très certainement dû aux multiples compliments que tu t'étais permis de m'offrir. Compliments, que je n'avais pas entendu depuis fort longtemps... Déjà.

Une nouvelle inspiration prise, et voilà le résultat. Je me retrouvais à essayer cette nouvelle robe sans éprouver le moindre sentiment de mécontentement à l'égard de ce simple fait. « Jun. Je te préviens, c'est la dernière fois que je vais faire les boutiques avec toi. » Des nouveaux, ces propos emplis d'amour à ton égard et je daignais extirper mon être de cette simple cabine d'essayage. Bras croisés contre ma poitrine, un simple et unique tour réalisé sur moi-même et finalement, ce regard tourné envers ta personne.

« Je vais devoir en essayer beaucoup, comme ça, pour rembourser ma dette, hein ? » Certes, ces propos semblaient aller à l'encontre de mes véritables pensées, mais, je ne souhaitais en aucun cas te laisser obtenir satisfaction si rapidement. Bien au contraire.

Gentil ? Il l'était depuis toujours. Fut un temps, il l'avait été de façon excessive, puis il avait décidé d'arrêté pour son propre bien. Il avait cessé d'être stupide, trop bon avec les autres afin d'être meilleur avec lui-même. Lentement, minutieusement, il avait tiré un trait sur ce qui lui déplaisait dans sa personnalité, ce qui pourrait créer des barrages à sa réussite ou tout simplement à sa vie de tout les jours. Il avait recherché la puissance et la perfection, à ne plus être un simple pion dans la société mais au contraire, celui qui pouvait les diriger. Et en cela, il n'avait pas encore atteint son but. S'il était le maître du jeu sur certain terrain, au final, n'était-il pas un simple pion pour Terazawa ?

Le coup sur sa tête le ramena un peu à la réalité et il sourit bêtement quand elle prononça plusieurs fois son prénom, s'amusant des propos qu'elle tenait. Avait-il réellement changé depuis ces années ensemble ? Il n'était pas vraiment capable de le dire, bien qu'il n'était pas stupide. Quand son niveau de vie augmente, quand on peut se permettre d'être exigeant, des vices cachés jusque là se révèle. Il n'a probablement pas changé, certains traits de sa personnalité se sont révélés. Cependant, elle devrait s'estimer heureuse, il se trouvait particulièrement calme et agréable avec elle, il était rare qu'il se montre aussi ouvert avec quelqu'un. Dans cette ville, il avait tout simplement appris à se méfier de tous le monde, à ne faire confiance à personne, mais elle, ça restait différent. Elle représentait une grande partie de sa vie, des années heureuses alors qu'il n'avait rien, sauf elle, sauf Mei, sauf quelques espoirs pour le futur.

« Tu es déjà retombé sous mon charme, ça se voit, au point où ça en est, il est inutile que je reprenne mes esprits. »

Aussi puérile qu'elle, s'il aurait pu tenter de rattraper la partie, c'était complètement raté au vu du clin d'oeil qu'il venait de lui faire, sa main allant pincer la joue de la demoiselle avant de lui faire signe de retourner dans la cabine. C'était étrange ce comportement qu'ils pouvaient avoir alors que ça faisait littéralement six années qu'ils ne s'étaient même pas adressé la parole. Pourtant, il avait l'impression que tout cela datait de la semaine dernière et il avait cette étrange impression de redevenir un peu un lycéen stupide qui flirtait avec une de ses camarades de manière presque innocente dans un magasin.

Regardant son téléphone pour voir les nouveautés, il rit pour lui-même à sa remarque. Elle adorait faire les magasins avec lui, il en était certain. Il lui faisait essayer de beaux vêtements qui lui allait bien et en plus, il lui faisait des compliments. Elle devrait s'estimer heureuse et chanceuse. Et quelque part, il l'était aussi, surtout quand elle sortait avec ce genre de robe qui lui arrachait forcément un grand sourire satisfait, à chaque fois. « Fabuleux ! » lâcha t-il cette fois face à cette robe bien plus sobre mais terriblement sexy par sa coupe. Sublime, elle était tout simplement sublime. Ça rajoutait un certain volume à sa poitrine, absolument pas désagréable.

« Cette robe est encore mieux que l'autre, elle fait plus adulte, plus femme. » Hochant la tête comme pour s'approuver, il continua de la détailler du regard avant d'entrer dans la cabine pour sélectionner la dernière tenue qu'il voulait la voir essayer. « Enfile encore ça et je te laisse tranquille. »

Sourire rassurant pour la convaincre de sa bonne foi, il la poussa à nouveau dans la cabine, lâchant un léger soupir. Il ne savait pas trop ce qu'il faisait là, mais ça n'avait pas tellement d'importance, pour une fois que sa journée n'était pas planifier à la seconde près, il devrait s'estimer heureux. Le seul rendez-vous qu'il ne pouvait rater, c'était de chercher Mei à l'école, il le lui avait promis au matin, en partant.

Quand elle ressortit, il afficha ce même sourire satisfait. Moins classique mais il aimait tout autant. Cette femme n'avait malheureusement rien perdu de sa beauté avec les années et c'était tout bonnement scandaleux de s'imposer cela à lui-même. Si encore dans ses vêtements ordinaires il trouvait cela supportable, c'en devenait indécent. « Sublime ! » Et encore une élocution sans davantage de mots, c'était nécessaire, et c'était déjà bien assez. Elle était si belle quand elle se décidait à devenir une femme.

« C'est bon, ça suffit maintenant, tu peux te rhabiller. »

Attendant qu'elle ait fermé le rideau, il fit signe à la vendeuse d'aller lui chercher la réplique des trois tenues et de les encaisser. Elles lui allaient trop bien pour qu'elle ne les ait pas chez elle. Au moins, il se sentira mieux de savoir qu'elle n'a pas que des vêtements étrangement basiques. Allant à caisse, il paya rapidement les vêtements, allant à l'entré du magasin où il attendit qu'Hana daigne le rejoindre, vu l'impatience qu'il pouvait avoir.
Une fois qu'elle arriva, il lui tendit simplement le sachet, puisqu'il n'allait quand même pas se fatiguer à le porter.

« On y va. Ne vois pas ça comme un cadeau, je préfère que Mei se confie à quelqu'un vêtu de Prada plutôt que de je ne sais quelle marque. »

Les trois, c'était juste parce qu'il ne savait pas laquelle il préférait ? Bon, c'était peut-être un peu plus désintéressé qu'il ne voulait bien le dire, mais hors de question de l'admettre de toute façon.

Un nouveau sourire, des compliments à mon égard, un sentiment de surprise, une nouvelle tenue essayée, une énième attention offerte envers ma personne et voilà que ce simple et unique « calvaire » pris fin. Enfin, j'abandonnais ces bouts de tissus sombres et bien trop chers pour ces bons vieux vêtements que j'affectionnais tout particulièrement. Me retrouvant, ainsi, à mon aise au sein de ce pantalon de couleur jean bleuté légèrement clair et bien trop grand pour ma personne, mais aussi, ces baskets peu agréables visuellement pour ta personne. Des fautes de goûts impardonnables que tu t'étais permis de critiquer au sein de notre rencontre fortuite il y a de ça quelques heures... Et cela, me suffisait amplement. C'est donc en arborant une moue légèrement accentuée, que je passais aux côtés de cette femme, vendeuse qui, apparemment, n'appréciait pas son rôle lorsque des clients tels que moi daignait traverser les portes de cette boutique. Je ronchonnais alors, intérieurement, tout en quittant définitivement ces lieux. Lieux au sein desquels je n'entrerais jamais seule, et ce, malgré les quelques pièces essayées qui étaient parvenues à attirer mon attention. Ce n'est que, finalement à l'extérieur de celle-ci que je me sentais finalement libre. Réajustant bien vite cette veste se trouvant sur mes épaules, cet air ambiant légèrement frais parvenait à faire frémir mon échine tandis que j'en venais à frotter rapidement mes avant-bras. « Hein ? » Une question rhétorique, en soit. Mon attention se portant bien vite sur ce sac présenté face à ma personne, était-ce donc là une mauvaise blague ? Apparemment, non. Je jetais un coup d’œil vers l'intérieur de celui-ci avant que je ne puisse y découvrir ces robes auparavant essayées.

« Vraiment, vraiment ? Jun, vraiment ? » Clignant des yeux à de multiples reprises en guise de surprise légèrement forcée.

Mais, il est inévitable de voir qu'au final, malgré cet air détestable scotché contre ton faciès, une certaine gentillesse persistait au sein de ton esprit et je ne pouvais que t'en remercier. Gratifiant ce simple acte de ta part d'un baiser glissé contre l'une de tes joues avant que je ne puisse me permettre de reprendre la parole : « Je vais simplement faire abstraction du reste de tes paroles, et te remercier une nouvelle fois, voilà. Merci, Jun. » Délicatement, j'en venais à resserrer l'emprise que je pouvais avoir contre les anses de ce sac en papier. Mordillant très légèrement ma lèvre inférieure, il est vrai que je ne pouvais en aucun cas me permettre de clore cette journée de la sorte. Non pas que je puisse me sentir de nouveau, redevable envers ta personne, mais... Ce sentiment à ton égard persistait en moi.

Que pouvais-je bien faire pour m'excuser, mais aussi, le remercier au travers de simples sous-entendus dont tu ne soupçonnerais même pas l'existence ? Tu étais parfois bien trop malin et, je devais bien avouer avoir un certain mal à réfléchir rapidement. Un café, quelque chose à grignoter ? Inutile. Tu ne semblais guère apprécier la nourriture que le pays du soleil levant pouvait nous offrir. Alors, pourquoi ne pas user de ce simple fait afin de retourner la situation à mon avantage ? Un fin sourire niché contre mon faciès et voilà que, l'une de mes mains se permit d'attraper l'une des tiennes. « Suis-moi, et n'ose même pas me sortir la moindre réflexion. Sinon... Hein. »



Être près du centre-ville semblait être pratique et, malgré les nombreuses rues que nous devions parcourir, nous n'étions pas si loin de cet appartement peu grand au sein duquel je résidais. À l'évidence, j'avais pris le premier qui venait. Rien de bien rustique, mais pas non plus très moderne. Il me ressemblait, d'un certain point de vu. Et ce n'est donc, qu'après quelques minutes de marches que nous nous retrouvions face à cet immeuble. Un code d'accès entrée, une salutation offerte au gardien et voilà que je daignais te laisser pénétrer au sein de mon antre.

« Mes frères m'ont envoyé beaucoup trop de choses de Chine, si tu pouvais emporter certaines choses pour toi, ou Mei, ce serait plutôt gentil. Et puis sinon... Tant pis. » Moi, user de ces simples faits ? Bien sûr. Et je ne le cachais pas, tout du moins, je tentais de le faire. Mais, étais-je vraiment crédible ? Là, était une tout autre question.

Ces cadeaux étaient bien étranges, même pour lui. Il aimait offrir des choses aux gens qu'il appréciait, une sorte de frustration qu'il comblait de ces années où il n'avait jamais pu offrir quoique ce soit à personne. Même pas à Hana. Ils étaient resté presque trois ans ensemble pourtant il avait été incapable de lui offrir quoique ce soit, sauf des choses faites lui même, des objects ou vêtement customisés, rien de bien extravaguant et ça l'avait toujours assez gêné. Il était plutôt fier d'en être capable aujourd'hui et de la voir si surprise. Oui, maintenant, il en était capable ! Il avait travaillé dur pour ça, ça n'est pas toujours facile, mais il en est capable. Avec Hana, c'était d'autant plus symbolique. Il était devenu quelqu'un qui ne dépendait plus des autres, qui pouvait faire un geste vers quelqu'un au lieu de ne voir les choses qu'aller vers lui.

Il sourit un peu quand elle l'embrassa sur la joue, faisant un geste de la main pour signaler que ce n'était pas nécessaire, le tout pour masquer son embarras actuel face à ce geste. Si proche, si intime, pourtant, il n'y avait rien de cela entre eux, du moins, plus. Elle était la première femme qu'il avait eu dans sa vie, dans une autre vie, comme il se plaisait à le penser. La première qui a su le charmer réellement, le rendre fou d'elle pour finalement disparaître de sa vie, presque du jour au lendemain, d'un coup, comme lorsqu'on se réveil en sursaut d'un rêve.

Désormais, il ne savait pas vraiment quoi faire, à part rester là, la regarder, se demander ce qu'ils pouvaient bien faire. Chaque instant était d'autant plus étrange, il se rendait compte comme le temps avait passé, comme ils étaient différents de ces lycéens qu'ils étaient. Si différent, et pourtant, ils avaient toujours cette même manie stupide de s'envoyer des piques, de se chercher, pour au final se calmer et devenir plus sérieux. Étrange. Jun essayait de comprendre lui-même la situation, mais c'était comme lui demander d'écrire une dissertation complètement en japonais ; impossible.

« Te suivre ? »

Sa main saisit, son corps kidnappé, il n'opposa pour autant aucune résistance, se demandant bien où est-ce qu'elle allait finir par l'emmener. Il faisait plusieurs supposition dans sa tête. Dans une autre boutique, au restaurant, chez elle pour le remercier en nature ; pas la moindre idée. De toute façon, il savait qu'il ne risquait pas sa vie – normalement – donc il n'avait pas plus d'inquiétude à avoir que cela quant à l'endroit où la demoiselle comptait l'emmener.

Un immeuble, donc chez elle. Heureusement qu'il avait pris une douche avant de partir. Bon, il savait qu'il y avait peu de chance que cela arrive, sauf dans ses fantasmes peut-être ou dans un film pornographique. Et il doutait qu'un caméraman et un metteur en scène les attendent en haut.
Son regard balaya l'appartement une fois arrivé. Plus petit que le sien, moins impersonnel aussi. On comprenait toujours quel genre de personne vivait ici, l'appartement dégageait une certaine chaleur, une ambiance rassurante.

« Tu m'offres un peu de Chine ? » Remarqua t-il en riant un peu, s'approchant des produits pour les regarder. « Ahh du bœuf séché de Siuchan ! J'avais complètement oublié d'en prendre la dernière fois, on dirait que tes frères lisent dans mes pensées ! Même de chez Dai Wang. Et des gâteaux à la pâte de taro ! Tu sais que c'est les préférés de Mei ? Enfin, non, tu sais pas, comment tu saurais ? » Merveilleux ! Tout cela était merveilleux ! Il était étrangement bien plus excité par des produits venant tout droit de son pays que par quelques chemises Gucci sans importance. « Je peux pas te prendre ça, c'est trop précieux. »

Il avait l'impression d'avoir dix ans et d'entrer dans un magasin de bonbons tant il était excité. Oh, on trouvait des produits chinois à Nishinaka mais pas les vrais, les plus artisanaux, ceux qu'il préférait. Pas forcément les grandes marques connus, plus les petites marques, moins chers, mais tout aussi bonne. Hana serait folle de se séparer tout ça, ces trésors précieux d'une nation, c'était bien trop.

Enfin, une douce chaleur parvenait à m'emporter au sein de mon antre. Frissonnant agréablement, j'osais quitter ma paire de baskets à l'entrée avant que je ne puisse me permettre de délaisser ma veste sur ce portemanteau installé à l'entrée. Sac reposé au pied de celui-ci, je fis malgré tout attention et délaisser celui-ci avec soin, malgré tout. Le contenu était fort important à mes yeux et je ne pouvais en aucun cas négliger ces cadeaux, aussi quelconques pouvaient-ils être pour certaines personnes, pour moi, c'était véritablement important. Une vulgaire paire de chaussons enfilés, je traînais vulgairement des pieds avant que je ne puisse parvenir à rejoindre la pièce principale en relation avec la cuisine, la seule séparation résidant entre ces pièces était ce simple et unique bar et je devais bien avouer apprécier grandement ce simple fait. Cela accentuant très certainement le sens du partage lorsque je pouvais recevoir des personnes en ces lieux. Inévitablement. C'est donc, tout naturellement que je me permis d'extirper ces multiples cartons afin de t'offrir une vision d'ensemble concernant toutes ces petites choses venant tout droit de notre pays natal. Sucré, salé, original, étrange ou, tout simplement intemporel, il y en avait pour tous les goûts, mais aussi... Bien trop. Une personne de mon envergure pouvait avaler un bon nombre d'aliments, certes, mais je ne pouvais en aucun cas me résigner à vider cela bien vite. Et je ne pouvais, en aucun cas, me résigner à ce que cela puisse clore son chemin au sein du pays du soleil levant dans un quelconque conteneur à déchets. Impossible. Impensable.

Amusée, je ne pue alors retenir un léger ricanement au vu de cet enthousiasme dont tu me faisais part. Je pouvais voir, une image enfantine résidé au sein de tes pupilles brillant comme jamais face à ces simples mets. Notre pays natal te manquait tant ? Ou tout du moins, la nourriture de celui-ci ? Sans conteste, je semblais d'avantage amusé. Un sac plastique résidait au creux des paumes de mes mains, voilà que j'en venais à glisser au sein de celui-ci les multiples choses que tu t'étais permis de citer il y a de ça quelques secondes auparavant. « Arrêtes Jun. Tu me crois vraiment capable de pouvoir engloutir toutes ces choses ? Je veux bien être loin d'une taille mannequin où des exigences typiquement asiatiques, mais mon corps ne parviendra pas à me laisser avaler tout cela. Désolée, Jun, tu vas devoir te sacrifier. Quelle tristesse. » Mimant une légère moue, avant que je ne puisse me permettre d'accentuer celle-ci ; voilà que j'ignorais tes réponses négatives à l'encontre de mes actions, peu m'importe si tu te résignais à ne pas vouloir accepter cela, tu allais devoir partir avec. Parole de Wang Hana.


Par ailleurs, je me permis d'ajouter au sein de ce sac ce que je pouvais avoir en double, avant que celle-ci ne puisse trouver refuge au face à ta personne, une de mes mains attrapant l'une de tes tiennes, je pris l'initiative de glisser ce sac au creux de celle-ci avant que tes doigts ne puissent se refermer définitivement afin d'obtenir une emprise sur le tout. « Là. Tu prends ce sac, tu ne rechignes pas, pense à Mei qui sera heureuse ce soir de découvrir toutes ces petites choses. N'est-ce pas ? » Utiliser Mei afin de te faire fléchir ? Bien sûr. Après tout... Tu prends ce sac, tu ne rechignes pas, pense à Mei qui sera heureuse ce soir de découvrir toutes ces petites choses. Au contraire, je me devais d'user de multiples stratagèmes sans que tu ne puisses répliquer quoi que ce soit de désobligeant concernant ce fait.

« En parlant de Mei... » D'un simple coup d’œil, je relevais très légèrement l'une de mes manches afin d'obtenir une vision de cette montre, là, glissée sur mon poignet. « A quelle heure dois-tu aller la chercher ? Je n'aimerais pas te mettre en retard, tu sais. Après, s'il te reste un petit peu de temps, installe-toi, il doit bien me rester quelques gâteaux chinois aux amandes que j'ai faits, hier. Tu en veux ? » Si mes souvenirs étaient justes, il me semblait avoir réalisé ceux-ci de nombreuses fois au cours du passé. Et, tu n'avais pas échappé à ce simple fait. En ayant apporté à de multiples reprises lorsque nous étions au lycée, ou lors de quelconques rendez-vous que nous avions partagés, je devais bien avouer que tout ceci me poussait à replonger au travers d'un bien grand nombre fait passés.

Naïveté, quand tu nous tiens, alors. Pourquoi devoir, toujours ressasser, le passé ?

Tant de bonté, il trouvait ça absolument incroyable ! Tant de produit chinois, certain qu'il comptait parmi ceux qu'il préférait et qui lui manquait le plus, il avait de tout prendre, de tout goûter, mais c'était trop. Il avait beau être accro à la mode et à ce qui s'en suit, il avait cette attache sentimental pour la Chine et ce qui s'y rapprochait. Tout était mieux que du Gucci ici. Sa mère patrie, sa vie. Jun rêvait d'y retourner un jour, et il espérait que Mei sera d'accord avec cela. Après tout, les années passaient, et c'était ici qu'elle voyait sa vie, non ? Il ne voulait pas voir cela comme un sacrifice, tant qu'il n'était pas profondément malheureux dans cette environnement.

Même s'il est certain que la quantité était trop grande pour qu'elle puisse tout manger elle-même, il trouvait que c'était trop. Ça lui semblait tellement précieux, un cadeau de ses frères. Plus jeune, il avait toujours été plutôt intrigué par ses frères, la relation qu'elle avait avec eux, il ne comprenait pas vraiment ce que ça faisait d'avoir un frère, une sœur, mais il était sincèrement heureux pour elle, qu'elle ait toujours cette attache, ces gens qui partageaient son sang et pensaient assez à elle pour lui envoyer cela. Hana n'était pas seule, et c'était ce qui comptait. De toute manière, elle n'avait jamais été de celles qui avait du mal à lier le contact, il lui faisait confiance pour cela, même à Nishinaka, tout devait plutôt bien aller pour elle.

Sa main attrapant la sienne, elle fut rapidement remplacée par un sachet qu'elle avait rempli de délice. Son regard resta quelques secondes à la fixer elle puis le sachet. Elle avait raison, ça fera plaisir à Mei. Indubitablement. Elle aussi, avait cette petite préférence pour la nourriture chinoise. Ce qui devait être normal. Il fit une petite grimace, levant les yeux au ciel en comprenant bien qu'elle le prenait par les sentiments avant de refermer ses doigts autour du sachet.

« Merci Hana. Je ne doute pas qu'elle sera vraiment très heureuse en voyant tout ça tout à l'heure. »

Il allait probablement devoir se battre avec elle pour qu'elle ne dévore pas tout. C'était un risque à prendre, il devra se contrôler aussi pour ne pas tout dévorer. Il n'aimait pas la cuisine japonaise, ou très peu. Il aimait ce qui se rapprochait de la cuisine chinoise, en fait. La Chine, pays sacré. L'herbe n'y était sans doute pas plus verte, mais on se sent plus à l'aise chez soi, n'est-ce pas ? Rien que pour communiquer. Le japonais était si compliqué, il peinait encore parfois à tout comprendre, à prononcer les choses correctement. Il se demandait si Hana avait également ce genre de problème. Sans doute, non ?

En parlant de Mei... Il se faisait tard, c'est vrai. Jun n'avait même pas fait attention à l'heure et le moment de récupérer la petite approchait. Il n'avait pas encore envie de demander à Haruna d'aller la chercher. Surtout que cette fois, il avait formellement promis – aux petits doigts en plus – d'être celui qui viendra la récupérer. L'évocation de ces fameux biscuits le fut sourire encore un peu. Elle les faisait souvent avant et ils étaient tellement bons ! Il aurait pu en manger des tonnes, il était toujours particulièrement heureux quand elle en faisait et il fabulait intérieurement en se donnant la fierté de se dire qu'elle les avait préparé pour lui. Ce n'était pas forcément vrai, du moins, pas toujours, mais ça lui plaisait de le penser.

« Si j'ose en regoûter un, je vais tout finir et oublier Mei, c'est mieux que j'y aille tout de suite. De toute manière, tu en feras quand tu viendras. » Oui, il s'agissait d'une petite exigence. « J'ai ton numéro de toute façon, il faudra que je le sorte de mon autre chemise, je t'envoie un message pour te tenir au courant. » Regardant autour de lui pour s'assurer qu'il n'avait rien oublié, il s'avança vers l'entrée pour remettre ses chaussures, souriant à Hana tandis qu'il posa sa main sur sa tête, ébouriffant un peu ses cheveux. « Tu mettras une de tes robes quand tu viendras ! J'ai une préférence pour la seconde, elle est moins sexy que la dernière, moins sage que la première, juste comme il faut. Mais tu fais comme tu veux ! Ciao, Amore~ »

Petit sourire amusé sur les lèvres, il secoua sa main vers elle avant de quitter l'appartement, vérifiant encore une fois l'heure. Il sera sans doute dans les temps... Pour une fois. Mei sera fière de lui, mais quel dommage qu'il soit à l'heure la seule fois où il avait dans les mains de quoi se faire pardonner. Monde cruel.