La vengeance est un plat qui se mange froid...

Je n'avais techniquement rien à faire dans l'hôpital, je travaillais à la maternité et ça n'était pas le même bâtiments, mais à la suite d'un soucis électrique, nous avions dû emmener les quelques grand prématurés à l'hôpital pour éviter que les appareils qui surveillaient leur évolution ne tombe en panne, le générateur ne pouvant pas les alimenter éternellement. Du coup j'étais occupé dans la partie des soins avec quelques pédiatres, mais là, c'était l'heure de ma pause café, et je fonçais donc vers la machine parce que je pouvais être appelé à tout moment à cause d'un problème avec l'un des prémas, le petit Buichi étant celui dans l'état le plus critique et sans vouloir être pessimiste, j'étais à peu près certain de l'issue de tout ça.

Perdu dans mes réflexions, je rentrais brutalement dans quelqu'un d'un peu plus petit que moi. J'allais me tourner vers celui que je pensais être un adolescent et lui demander pardon quand je rencontrais un regard d'abord surprit puis brusquement glacial.

Oh~Oh~ Lui ici ?

Voilà qui allait égayer un peu ma journée.

- Tiens Ryuku ! fis-je en m'approchant, un grand sourire sur les lèvres, omettant de m'excuser pour notre collision. Que viens-tu faire à l'hôpital ? Si tu veux faire de la pub pour ton salon, je conseille plutôt d'aller du côté des personnes admises ici pour brûlures ou avec des grosses blessures à cacher.

Ouais, je commençais la conversation de façon un peu random mais Ryuku n'était pas quelqu'un rentrant très facilement dans les rangs de toute façon. Rien que par son charisme, tu pouvais savoir qu'il en imposait vraiment.

- Je t'offre un café ?

Sans lui laisser le temps de répliquer, je l’entraînais à ma suite pour pouvoir lui offrir quelque chose à la machine juste à côté. Et puis comme ça il serait obligé de parler un peu.

- Bref, qu'est-ce que tu viens faire entre ces grands murs austères ? Oh non, laisse moi deviner ! dis-je brusquement. Tu n'es pas du côté maternité donc pas d'accouchement dans la famille, pas de suture à faire sinon ça serait les urgences, radio et autres spécialités sont aux étages. Et vu ton air tendu je dirais que tu es dans l'attente de tests sanguins. Dépistage ?

J'étais doué à ce petit jeu, même s'il suffisait de connaître l'emplacement des différents services et de lire un peu les visages pour comprendre où allait qui et pourquoi. Mais bon, ça faisait toujours son petit effet quand on faisait ce genre de choses devant les gens.

- Et Shinya ? Il va bien ? Il est toujours aussi gentil quand il répond à mes SMS en tout cas.

Oh oui ~ Finit les banalités, j'avais envie de le faire rager, voir sa tête passer en mode "je suis pas content" avait quelque chose d'extrêmement jouissif.

Oh il croyait réellement m'impressionner en venant presque se coller à mon visage ? Je n'avais plus vraiment la notion d'espace personnel après tant de temps à draguer tout ce qui passait en me collant aux personnes et en embrassant des inconnus.

Pour moi, la seule chose à laquelle je pensais alors qu'il était quasiment collé à moi, ce fut de l'embrasser mais je ne le fis pas, pas tout de suite du moins, j'attendrai un autre jour où monsieur "bouledogue énervé" se calme un peu, et puis on allait éviter l'hôpital. Mais bon, Ryuku avait une excuse quand à son humeur exécrable, il attendait des résultats de dépistage et ça n'était drôle pour personne, je pouvais moi-même le dire.

Mais revenons à nos moutons, ou plutôt, à notre Shinya...

- Oh mais je l'ai déjà approché mon cher mais ne t'en fais pas, je ne veux pas lui dire "je t'aime", je veux juste qu'il me montre son savoir faire en matière de bondage. Il m'a dit qu'il était doué pour les nœuds qui se resserraient suivant les mouvements de celui qui était attaché.

Je ne mentais absolument pas sur ce point, mais pour qu'il me le montre, j'allais devoir subir ses attaques et donc avoir des relations charnelles avec lui. Il était vraiment adorable par SMS et il était vrai que j'aurais aimé me rapprocher de lui en tant qu'ami également.
Mais comment passer à côté de ce couple aussi étrange que possédant un sex-appeal démesuré ? Si j'avais pu me faire les deux en même temps, j'aurais certainement touché le paradis, ou alors j'aurais brûlé en enfer, mais ça aurait été une expérience exceptionnelle. Malheureusement, ce cher Ryuku ne semblait pas prêteur avec ses possessions, et je trouvais d'ailleurs ça plutôt étrange pour un couple pratiquant le BDSM.

- De toi, je n'attend pas grand chose, je sais que tu ne m'aimes pas mais sache que je pense qu'on pourrait bien s'entendre si tu n'étais pas aussi coincé, dis-je en lançant la commande du café. Ton copain au moins est bien plus accueillant et sympathique...

Ouais, je lançais Ryuku sur des sujets qui fâchaient parce que je savais ce qui l'énervais mais pour le moment, lui ne savait pas grand chose de moi.

Oh que c'était plaisant de le mettre hors de lui-même, il était encore plus charismatique quand son visage exprimait quelque chose.

- Je t'ai pas demandé, tu sucres ton café ou pas ?

Ouais, je passais du coq à l'âne parce que j'aimais l'enquiquiner !

Evidemment qu'il était parti, il était décidément une proie de choix, charismatique, fort, et avec un magnifique petit ami, donc complètement inaccessible...

Enfin bon, j'avais le droit à deux café du coup, il ne fallait pas gâcher aussi je l'offris à un infirmier plutôt beau gosse -il ressemblait à Rihito- et il me passa son numéro pour peut-être faire un tour dans un des bureaux, il y avait certaines choses à astiquer.

Mon bipper sonna cependant rapidement, pas pour les prémas à l'hôpital, une des femmes que je suivais venait d'être prise en charge, le travail ayant commencé. Une fois de retour dans le bâtiment, j'appris que la femme en question était l'adorable adolescente de dix-sept ans, tombée enceinte par accident et qui avait fait le choix de garder son bébé et de l'élever avec son petit ami.
J'allais donc rapidement vérifier que tout allait pour le mieux, j'aimais beaucoup ce couple qui avait dû faire face à leurs familles et qui était heureux malgré tout, ils étaient adorables.

Après une demi-heure, je sortais de la pièce après avoir ausculté la jeune femme et rassuré le futur papa qui était le plus stressé du couple. Il tremblotait d'impatience et dès que sa femme avait une crispation, il devenait quasiment livide. Ça promettait !
J'étais donc dans le couloir pour aller rejoindre les autres sage-femmes et le pédiatre présents dans notre salle de repos. C'est là que je remarquais une silhouette familière mais qui théoriquement n'avait rien à faire dans le service, à moins d'être doté d'un utérus et d'avoir été mis en cloque... Quoique je doutais qu'il soit le dominé dans l'histoire.

Je manquais de m'étouffer avec ma salive quand j'entendis sa proposition.

Wooh... Il y avait anguille sous roche là, il y avait même citrouille dans nuage... Je sentais que j'allais le regretter si j'acceptais.

- Okay, mais si ça ne te gêne pas je suis en plein travail, j'en ai certainement pour encore quelques heures avant que ma patiente n'accouche, enfin, on ne sait jamais, ça peut s'accélérer.

On ne pouvait pas forcer la nature à part en faisant une césarienne, et pour le moment, ni la maman ni le bébé n'étaient en souffrance alors pas besoin d'être pressé pour les faire sortir. Et je n'allais pas gâcher le plus beau jour de la vie de ces futurs parents pour les beaux yeux de Ryuku.

Mais j'allais quand même regretter d'avoir accepté.

- Tu peux venir me chercher plus tard si tu as vraiment envie, ou rester ici et discuter avec le reste du personnel médical, on se réunit dans la salle de repos, si tu as envie d'entendre parler de vagin, naissance et sang c'est là que ça se passe !

Ryuku était avec un homme en ce moment mais il n'en restait pas moins un homme -très charismatique et sexy- qui voulait peut-être avoir des enfants.

- C'est toi qui voit ce que tu préfères faire, mais moi je dois rester ici, j'ai des responsabilités.

J'étais très sérieux, et Ryuku n'avait pas l'habitude de cette facette de ma personnalité qui prenait très à cœur son travail. C'était sûr qu'aider un enfant à naître et à vivre c'était une toute autre responsabilité que de faire un dessin sur la peau...

Et j'allais regretter d'avoir dis oui si au final il voulait vraiment qu'on aille boire un verre.

Ce soir, 21 heures... Ça laissait le temps de rentrer chez moi, me laver, me préparer un minimum et manger. C'était jouable, sauf s'il y avait un contretemps, mais pour le moment, tout avait l'air de se passer correctement, après je pouvais toujours être appelé pour un autre accouchement après, on en faisait rarement deux en simultané. Et puis bon, si Ryuku ne voulait que "discuter" c'était jouable non ? Se doucher, prendre un t-shirt, ne pas se travestir, en moins de deux je serais prêt à aller rejoindre le tatoueur pour parler.

Mais discuter de quoi d'ailleurs ? Du fait qu'il allait me tuer puis donner mon cadavre à des nécrophiles puis me brûler avant de me pendre et enfin me broyer pour me transformer en chair à saucisses ? Faudrait juste que je lui demande de pas trop me torturer, une balle entre les deux yeux c'était suffisant, pas besoin d'étirer le temps avec de longs entrainement à la chirurgie... Enfin, si je me retrouvais attaché et complètement soumis au sadisme de cette homme, je supposais qu'il n'allait pas me laisser m'en tirer comme cela... J'avais dragué son copain après tout...

Brusquement, l'habituelle danse des médecins qui se ruaient en se chamaillant gentiment vers une pièce dans laquelle une patiente était sur le point de donner la vie se fit entendre. Mais ce n'était pas la femme que je suivais qui était en salle d'accouchement, c'était une autre femme -logique- qui attendais des jumeaux et qui était complètement à terme et donc la sage-femme qui s'occupait d'elle devait être obligatoirement avec un gynécologue-obstétricien et un pédiatre.

Ryuku me tendit alors une carte que je pris, il y avait son numéro de portable inscrit dessus mais n'ayant pas mon smartphone sur moi je la mis dans la poche de mon pantalon de travail rose. Et oui, telle était la couleur qu'on donnait aux sage-femmes, qu'on soit homme ou femme nous étions tous logés à la même enseigne.

- Le devoir ne m'appelle pas, il ne s'agit pas de ma patiente, la mienne en a encore pour quelques heures de souffrance avant la délivrance finale... Bref, tu bois quelque chose ? On a une fontaine à eau et quelques sirops dans la salle de repos.

Je lui proposais de rester un peu, enfin il faisait ce qu'il voulait de toute manière, je n'allais pas le forcer à rencontrer mes collègues s'il ne le voulait pas.
Après je pouvais comprendre qu'il n'ait pas forcément extrêmement envie d'entendre parler de placenta, vagin et bébé pendant des heures, mais peut-être que ça l'intéressait. Il avait peut-être envie d'avoir des enfants, quoique si Shinya ne possédait pas la même particularité que moi, il n'en aurait pas l'occasion avant un moment.

- Enfin bref, si tu veux qu'on aille dans un bar ce soir à vingt et une heure pour discuter autour d'un verre, alors je passerai à ton salon de tatouage puisque je sais où il est, après on ira directement vers une boîte de nuit ou un endroit tranquille, enfin on verra bien.

Je me demandais toujours quel sujet il voulait aborder et pourquoi il était soudainement aussi sympathique. Ça sentait les ennuis toute cette histoire...
Mais c'était aussi excitant de savoir que j'allais peut-être me retrouver torturé par ce bel homme charismatique.

Moi masochiste ?

- Au fait, tu m'as toujours pas répondu pour tout à l'heure. Tu sucres ton café ?