On s'est pas déjà vu ? [Takashi Haruna]

Après avoir rangé des vêtements aux bons endroits, je m’étirai. J’avais travaillé assez tard hier soir pour refaire la vitrine et, comme d’habitude, le magasin était calme à cette heure-ci. On était en début d’après-midi. Les écoliers étaient en classe, les salary-man dans leur bureau… Tout le monde travaillait en fait. Je souris à ma collègue qui revenait de sa pause, elle avait l’air plus en forme que moi.
Au bout d’un moment, il y eut enfin quelques clients. Je commençai sérieusement à m’ennuyer et même s’ils déclinaient mes propositions d’aide, au moins, ça mettait de la vie dans le magasin. C’était aussi toujours agréable d’avoir des personnes dans la boutique. Certes, les enfants mettaient la pagaille mais au moins ça me faisait du travail… Puis ils étaient mignons quand ils nous faisaient des compliments.
Une nouvelle vague de calme envahit le magasin. Je pus souffler un peu et ranger de nouveau. J’avais envie que la boutique soit aussi parfaite que possible.
J’entendis la clochette retentir. Je finis de ranger les pantalons que j’avais en main avant d’aller vers le nouveau venu. Il ne semblait pas chercher quelque chose en particulier, simplement ce qui pourrait lui plaire.
Souriant doucement, je pris une respiration pour dire une phrase que je répétai à longueur de journée.

-Bonjour et bienvenu. Je peux vous aider ?

Par politesse je m’étais légèrement inclinée en disant cela. Quelque part, j’espérais qu’il n’allait pas refuser, je m’ennuyai, vraiment.

Mon sourire ne m’avait pas quitté. J’adorais aider un client, surtout quand celui-ci ne cherchait rien de spécifique. Pourquoi ? Je pouvais ainsi faire preuve de créativité, tout en essayant de respecter les goûts de la personne. Je détaillai mon client pour me faire une idée de son style vestimentaire. J’étais tellement concentrée que je sursautais légèrement quand il reprit la parole.

Ce qu’il me dit me fit hausser un sourcil. Je n’avais jamais rencontré d’homonyme dans cette ville, et personne ne m’en avait fait la remarque. De plus, il devait avoir mon âge, peut-être un peu moins, donc il aurait pu me connaître au lycée à cause de ma réputation qui ne devait pas être très glorieuse.
Quand il me dit son nom, je remontai dans mes souvenirs de lycée. Moon Haruki… Ce nom m’était familier. Mais oui ! Je ne le connaissais pas vraiment mais il m’était arrivé de le croiser et j’avais entendu parler de lui à l’époque.

-Drôle de hasard ou non, je me souviens vaguement de vous, je dis avec toujours un sourire sur mes lèvres. Donc, oui, c’est bien moi.

Je lui fis signe de me suivre, car je devais continuer mon travail. J’avais également des idées de vêtements pour Haruki et j’avais peur de les perdre Je me dirigeai vers le rayon des vestes tout en lui parlant.

-J’espère que ce n’est pas très indiscret, mais je voudrais savoir ce que vous devenez.

Même si le jeune homme était une connaissance de lycée je me devais de le vouvoyer, malgré le fait que ça puisse paraître trop formel.

La remarque d’Haruki sur le vouvoiement ne m’étonna pas. J’avais l’habitude de vouvoyer des personnes que je tutoyais en dehors du travail. Celles-ci ne changeaient pas leurs habitudes en venant me voir, ce qui m’avait perturbée au début mais, maintenant ça ne me dérangeait plus.

-Vous pouvez me tutoyer, au travail je dois vouvoyer tout le monde mais ça ne me pose aucun problème.

Ce qu’il me dit par la suite aurait pu m’étonner mais je partais du principe que chacun faisait le métier qu’il voulait tant que ça lui plaisait. Et vu que ça semblait être le cas, je n’eus aucune réaction de surprise ou plus déplacée. Au contraire, je continuais mon travail, sortant une deux vestes tout en répondant au jeune homme.

-J’ai fait des études de stylistes tout en travaillant à mi-temps dans ce magasin. Pour le moment, je travaille à plein temps ici tout en réfléchissant aux possibles évolutions de carrière que je peux avoir.

Ces derniers temps, je réfléchissais à la possibilité de créer ma propre marque ou ouvrir un magasin de vêtements mais ce n’étaient que des projets car je ne me sentais pas prête à voler de mes propres ailes… Puis j’étais jeune, j’avais le temps de penser à ça.
Gardant les vestes avec moi je partis en direction des pantalons. Récemment, on avait reçu des nouveaux produits qui pouvaient lui plaire. Je ne réfléchi pas et sorti, de nouveau, deux pantalons tout en continuant à parler.

-Votre travail à l’air de vous plaire en tout cas, je me trompe ?

Ma curiosité reprenait le dessus, j’espérais ne pas me tromper sinon je ne saurai plus où me mettre. Suite à cela, je lui montrais les quatre produits sélectionnés en espérant que ça lui plaise. Je ne lui avait pas demandé sa taille car c’était rare que je me trompe sur ce sujet et, si c'était le cas, les clients me le disaient.