Life is a joke ! So, play the game and come on •

Assis sur un canapé dans un des salons du QG des NSA, Shinji s’amusait à faire tournoyer sa bague entre ses doigts, se demandant qu’est-ce qu’il allait bien pouvoir faire aujourd’hui. Ou plutôt, qui pourrait-il dénoncer, attaquer ? Il avait une liste empli de noms à surveiller à cause de leurs comportements un peu désavantageux de ces derniers jours. Mais aucun ne semblait l’intéresser plus que d’autres. Ce ne serait pas assez violent. Il avait envie d’un peu plus d’action, hors en ce moment, c’était assez mort chez les NSA. Le calme totale. Le néant même.

Soufflant, le jeune homme se résigna à se lever puis parti se chercher quelque chose de costaud à boire. Un bon whisky ne lui ferait pas de mal et il se déciderait peut-être à quitter enfin ce salon dans lequel il traînait depuis une heure. Rentrer chez lui ne l’enchantait pas, sa journée avait été ennuyante à souhait bien qu’il y avait eu ce nouvel élève qui avait osé essayer de lui répondre. Il l’avait amèrement regretté ensuite, Shinji lui ayant fait comprendre de savoir qui était à la place de qui et surtout qui était celui qui commandait. Au lycée, le garçon était réputé pour être l’un des professeurs les plus sévères mais également le plus sadique. On aurait pu le renvoyer oui toutefois même si personne ne pouvait clairement décrire ses méthodes, les résultats portaient leurs fruits et il avait un sourire si éclatant que la proviseur aurait refusé de le jeter hors de son école. De toute façon, Shinji était doué pour mentir, pour manipuler également et c’était la raison pour laquelle cette femme le défendait la plupart du temps, elle ne voyait que les bons côtés du garçon qui en réalité n’existait pas. Elle était juste stupide comme un bon nombre d’individus que l’enseignant côtoyait.

Alors qu’il sirotait tranquillement sa boisson, s’amusant à secouer son verre par moment, il feuilletait la fameuse liste que lui-même s’était créé et son visage s’illumina en reconnaissant l’un d’eux. « Tôda Hanae ». Jusqu’alors, il n’avait pas le souvenir qu’elle ait fait quelque chose de mal si ce n’est d’avoir abandonné un pauvre jeune homme sans défense devant un tribunal. Cela ne le concernait pas, c’était à la police de s’en chargeait. Que cela soit d’elle ou de son petit ami. Néanmoins, il aimait avoir son nom inscrit sur sa liste personnelle, cela lui donnait une raison particulière de la surveiller et de voir qu’au bout du compte, entre son collègue et elle, leur histoire n’était pas totalement terminée. Que c’était beau l’amour. Tellement minable aussi. Shinji eut un léger rire moqueur à cette réflexion alors qu’il se souvenait de comment ces deux-là s’étaient séparés à l’époque et par-dessus tout, à cause de qui. Lui peut-être ? Non, jamais il n’oserait. Pas lui. Une personne aussi gentille que lui n’aurait pu faire de mal à une mouche.

Il connaissait Ryuhei puisqu’il travaillait avec lui et la première fois qu’il l’avait rencontré, autant dire que sa tête ne lui avait pas forcément plus. Shinji n’aimait pas grand monde de toute manière alors malicieusement, comme un lion qui se prépare pour attaquer sa proie, le jeune homme avait joué aux faux semblants avec lui. Sauf que son collègue n’avait pas eu l’air d’accrocher, sûrement que lui était un peu moins abruti que les autres et c’était ce qui avait motivé le professeur à voir plus que loin que ce qu’il avait sous les yeux. Plus loin, il y avait Hanae. Si Ryuhei était plutôt intelligent, ça n’avait vraisemblablement pas été le cas de sa copine qui s’était laissée berner et qui encore à l’heure d’aujourd’hui pensait sûrement que Shinji n’était pour rien dans la séparation de leur couple, qu’il était formidable et qu’il était le seul à l’avoir soutenu dans cette lourde épreuve. Pensée qui fit sourire le concerné de plus bel. Il aurait réellement souhaité assister à leur dernière dispute comme le lui avait raconté son « amie » mais malheureusement il n’avait pas pu. Tant pis. Peut-être qu’à l’avenir il le pourrait encore car apparemment, les deux anciens tourtereaux s’étaient revus et s’étaient même embrassés selon ses sources. Sacré Ryuhei. Il était coriace.

D’ailleurs, en songeant au loup, l’auteur de ses songes fit son apparition dans la pièce sans le remarquer pour le moment, ce qui étira une nouvelle esquisse sur les lèvres du second agent.

- Yo ! Le salua-t-il joyeusement en levant sa main vers lui, Quoi de neuf ?

Peu importait si Ryuhei se méfiait de lui, qu’il le détestait pour s’être interposé dans son couple, Shinji n’en restait pas moins espiègle, malsain et sadique.

- Hanae m’a dit que vous vous étiez revu. A ce que je vois, même après tout ce temps, tu y tiens à elle hein ? Laisse-là tranquille à la fin. Après c’est moi qui récupère les pots cassés donc essaie de t’abstenir la prochaine fois.

En réalité, le jeune homme ne l’avait pas revu depuis un moment si ce n’était pas plus d’un an. Même s’ils étaient restés proches après la rupture de la demoiselle, cette dernière s’était éloignée peu à peu et lui n’avait pas cherché à la retenir non plus. Maintenant qu’il avait eu ce qu’il désirait, il n’avait plus besoin d’elle seulement c’était à croire qu’elle risquerait de lui être utile de plus bel. Il fallait qu’il reprenne contact avec elle. En attendant, elle lui servirait de sujets de conversations et de distraction également. Voilà pourquoi avoir son nom sur sa liste lui était utile... Il savait beaucoup de choses sur ses faits et gestes. Et il était prêt à la dénoncer également à la moindre faute effectuée. Pour sûr que Ryuhei serait fou de rage. Pire encore. Il pouvait toujours essayer de l’attaquer, il ne l’atteindrait jamais. Shinji était fort. Shinji était malin. Mais par dessus tout, Shinji était cruel. Et l’autre jeune homme n’avait encore rien vu. Il n’était pas à l’abris de ses surprises. Jamais avec lui. « Pire » était tellement faible comparé à ce que le NSA était capable de faire.

S’il y avait quelque chose que je détestais de plus en plus, c’était bien de me rendre au QG. Surtout avec les nouvelles idées complètement folles de Terazawa. Mettre une personne après l’autre en prison, et puis quoi encore ? Miaki n’avait rien fait, elle n’avait enfreint aucunes règles, pourtant, elle se retrouvait dans ces prisons débiles pour pseudo-criminel qui ne voyaient pas les choses comme le maire. On était à ça près des Goulag, sauf que la torture était remplacée par des séances de maquillages et d’informatiques dérangeantes. J’avais discuté un peu avec Harumi en arrivant, nous étions tous convoqué au QG aujourd’hui, pour les nouvelles « réformes ». Elle était tout aussi septique que moi, mais nous n’en avions pas trop parlé. Il y avait ici la désagréable impression de se faire écouter au moindre recoin.

J’essayais d’avoir l’air un peu près « normal », malgré les dernières révélations, les histoires de Takano et tout ce qui s’en suit. Je me retenais furieusement d’appeler mon père. Enfin, celui qui m’avait élevé, pour qu’il m’explique, qu’il me dise pourquoi il avait accepté de m’élever, de dépenser de l’argent pour un fils qui n’était pas le sien. Mais j’avais peur que maintenant que je savais, il ne veuille même plus m’adresser la parole, qu’il y’ait définitivement plus rien entre nous. Même si je ne tenais pas énormément à lui, qu’il n’y avait rien qui nous liait biologiquement, c’était lui qui m’avait élevé toutes ces années.

Entrant dans une pièce, je faillis faire demi-tour en voyant qui s’y trouvait. Heureusement qu’on ne portait pas d’arme en tant qu’agent, sinon il aurait déjà une balle entre les deux yeux depuis longtemps. Mais je souris, secouant ma main vers lui en m’imaginant lui fracasser le crâne par terre, ce qui me fit sourire davantage.
Mes doigts se crispèrent un peu en l’entendant parler d’Hanae, mais je ne réagis pas davantage, allant jusqu’au frigo pour sortir quelque chose à manger. On crevait vraiment la salle ici, c’est dingue. Sans le regarder, je l’écoutais, souriant un peu. Elle continue de le voir ? Soudainement, je regrettais tellement de lui avoir tout raconté. Je sais qu’elle n’était pas du genre à déballer ce que je pouvais lui dire, mais elle avait bien raconté tous nos problèmes de couple à ce connard, elle pourrait très bien recommencer à se confier à lui.

-Mon pauvre, faut bien que tu serves à quelque chose, répondis-je en attrapant un verre. T’as une vie tellement merdique que tu dois vivre à travers celles des autres. Ne me remercie pas de t’apporter du divertissement, ça me fait plaisir.

Peut-être que j’aurais dû la mettre en garde, lui dire combien il était pervers, mais elle ne m’aurait pas cru, encore moins écouté. J’étais bien trop en colère contre elle pour la « sauver » et visiblement, encore maintenant, elle est sous l’emprise de ce malade mental. Passant à côté de lui, je lui souris tout en allant me poser un peu plus loin. Je n’avais pas envie de discuter avec lui, ni même d’essayer d’engager la conversation. Il était si insignifiant à mes yeux, si stupide et inintéressant. J’avais l’impression de perde mon temps rien qu’à le regarder. J’aurais pu regarder quelque chose de plus beau, de plus impressionnant, et non, j’ai vu cette chose flasque et écœurante. Une perte de temps, vraiment. Rien que l’écouter parler ou respirer me dérangeait. Qu’il ne compte même pas sur moi pour lui raconter quoique ce soit de toute façon. Si elle lui parlait, tant mieux. Mais ça s’arrêtera là.

Son problème était peut-être là. Avoir une vie si ennuyeuse qu’il s’entêtait à faire bouger celle des autres. C’était une réflexion à méditer. Bien que Shinji ne pouvait s’empêcher de penser que Ryuhei avait tort. Il était bien loin de le connaître. Il ne l’avait rencontré qu’à une époque de sa vie et ignorait comment était l’enfance du jeune homme. Comment ce dernier était déjà alors qu’il n’était qu’un petit garçon, mignon selon ses maîtresses. Ce n’était pas à cause d’une vie ennuyante puisqu’au vue de l’enseignement qu’il recevait à la maison, il avait largement de quoi s’occuper et de quoi raconter aussi. Pour lui, faire le mal était un amusement... Si pour d’autres c’étaient jouer à la poupée ou au voiture, lui c’était le mal. Les enfants s’inventent des histoires, s’imaginent être des héros ou des méchants mais ils se camouflent sous des rôles. Lui les jouait en réalité. C’était beaucoup plus divertissant. Mais ça personne n’était capable de le comprendre. Encore moins Ryuhei qui se noyait dans un amour passionné sans aucun sens. Qu’est-ce qu’il pouvait saisir de la vie s’il est entouré de ciel bleu et de papillons ? Son coeur n’était probablement pas aussi pur que ce qu’il le faisait paraître, il l’était juste plus que son collègue. Voilà la raison pour laquelle le jeune homme se mit soudainement à rire, amusé de la remarque de son vis à vis. Il pouvait faire son beau derrière ses paroles, Shinji savait que Ryuhei n’en pensait pas moi et qu’il avait été profondément été touché par cette histoire. Tout comme cela devait le tracasser de savoir qu’ils se revoyaient soit disant encore. Bientôt il se permettrait d’insinuer sérieusement qu’il y avait eu quelque chose entre eux. Désormais il avait des preuves qui pourrait déstabiliser le NSA. Des preuves qu’il n’avait pas autrefois. Aujourd’hui il lui était bien plus facile d’inventer des mensonges encore plus grotesques qu’auparavant.

- Je tiens quand même à te remercier, Rétorqua-t-il une fois calmé, Il n’y a pas plus distrayant que toi. Puis, tu sais, je me fous bien mal d’avoir une vie ennuyante ou autre. Tu ne pourrais pas comprendre et je doute que tu es envie de comprendre de toute manière.

Une esquisse sarcastique se dessina au coin de ses lèvres tandis qu’il buvant quelques gorgées de sa boisson.

- Du moment que je prends du plaisir avec elle, le reste m’importe peu.

Pendant que lui finirait par se torturer l’esprit dans tous les sens à essayer de démêler le faux du vrai. Shinji était professionnel pour cela et si Ryuhei n’était pas toujours tombé dans le panneau, il y avait des moments où ce dernier avait été obligé de douter. Sinon il serait encore marié à Hanae.

- Soit. T’es réellement un bon gars quand même... Je suis vraiment navré qu’il te soit arrivé toutes ses horreurs.

Son ton était dés plus sérieux néanmoins son sourire narquois et tout ce malice qui se reflétait dans ses yeux montraient à quel point au fond, il n’était absolument pas désolé de la misérable vie qu’avait eu son interlocuteur. Bien au contraire.

Comme pour montrer toute l'ignorance qu'il m'inspirait, j'avais sorti un livre de mon sac, commençant à le lire avec intérêt. Je devais faire un effort surhumain pour tolérer le son de sa respiration, enfin, c'était difficile, mais j'y arrivais un peu près. Alors j'avais oublié sa présence, il jugea bon de me rappeler qu'il existé en reprenant la parole, et je lâchais un petit soupir, prenant calmement une gorgée de mon verre. C'est drôle, ce besoin qu'il avait de parler. Il devait se sentir sacrément seul. Rentrer le soir et n'avait personne à qui parlé. Il était tellement infecte qu'il ne doit même pas se supporter lui-même, c'est fou. Pas d'ami à qui parler, pas de famille de laquelle il est proche. Rien de rien. Je n'étais pas beaucoup plus entouré que lui, au fond, mais je m'en sortais pas trop mal. Tournant la page de mon roman, je haussais les épaules en guise de réaction la plus concluante à ce qu'il venait de dire.

-Ah ça, t'as raison, j'en ai strictement rien à foutre.

Tout ce qui le concernait me semblait plus inintéressant qu'un discours de Terazawa à la télé ou de l'engagement pour je ne sais quelle cause de Lady Gaga. Qui il était, sa vie, sa façon de voir les choses, peu importe. Je m'en tamponnais l'oreille avec une babouche et encore, c'était joliment dit.
Un sourire crispé se dessina sur mes lèvres à la remarque sur Hanae et je levais furtivement mes yeux de mon livre pour le regarder avant de retourner à ma lecture. Connard. Je savais ce qu'il sous-entendait, et je ne savais pas ce qui s'était passé entre eux après notre rupture. Peut-être qu'il a eu ce qu'il voulait, une aventure avec elle. Je savais qu'il n'y avait rien entre eux actuellement et que son pauvre pénis devait être aussi inactif qu'il ne l'a toujours été, sauf quand sa vieille main rugueuse veut bien s'y attarder. Hanae était fidèle, elle avait quelqu'un dans sa vie. Enfin, plus maintenant, mais ça me ferait de la peine pour lui qu'il parvienne à la choper seulement quand elle vient de quitter son copain. Pauvre petite merde.

-Bien sûr que je suis un bon gars, t'imagines même pas, sifflais-je avant de me redresser un peu pour le regarder en souriant. Ce qui est con, c'est que quand il arrive trop d'horreurs à des gars comme moi, on a tendance à péter les plombs, faire n'importe quoi.

Tuer sans faire exprès un pauvre con comme lui, par exemple. J'avais souvent imaginé comment je pourrais le tuer. De mes mains nues, violemment, le faire hurler de douleur et d'agonie jusqu'au bout. Un rêve. Je n'étais pas du genre sadique, je n'aimais pas le sang, mais j'avais juste envie de le décapiter et de le taillader de partout. L'attacher fermement et lui ouvrir le corps petit à petit, lentement. D'abord des entailles, puis, pourquoi pas lui couper un bras, une jambe, son pauvre pénis flasque, le scalper... Puis quand il se mettra à chialer et à m'implorer de l'achever, je continuerais. Encore et encore. Jusqu'à ce qu'il crève dans ses souffrances. Un truc comme ça. Un sourire était apparu sur mon visage sans que je m'en rende compte et je penchais la tête un peu sur le côté, tentant d'oublier ces belles images.

-J'espère que tu as réussi à te taper Hana. Parce que c'est un coup d'enfer, tu sais. Ça me ferait de la peine qu'après t'être amusé à provoquer notre séparation, t'es pas pu la baiser.

Sourire amical – ou hypocrite ? – je retournais à ma lecture, l'air de rien, ne tenant pas à provoquer une nouvelle conversation. Je savais qu'il allait me dire qu'il avait réussi à le faire, ou me raconter une autre de ses conneries, qu'il allait chercher un truc pour m'énerver. Mais j'étais au dessus de toutes les choses qu'il pouvait me dire. Je me fichais totalement de lui. Enfin, je préférerais le voir mort, mais ça faisait longtemps que j'étais devenu hermétique à sa méchanceté, à tout ce qu'il était. À quoi bon rester sensible à ce genre de personnage, au fond ?

Un jour, des problèmes lui tomberaient dessus. Des répercussions de tout le mal qu’il avait causé par le passé ou à présent. Shinji en avait conscience et s’y était mentalement préparé. En tout cas, ce n’était pas Ryuhei qui l’effrayait. Son collègue pouvait bien tenter de le tuer qu’il n’éprouvait aucune peur. Certainement un peu masochiste sur les bords. Il n’avait jamais été terrifié par les morts, ni par les blessures de guerre. En tant que bon petit soldat, il se devait de surmonter n’importe quelle douleur, n’importe quelle crainte donc ce n’était pas de faibles menaces qui le feraient décamper. Au contraire, cela ne faisait qu’accentuer l’esquisse narquoise déjà bien présente sur ses lèvres. Parce que le jeune homme pouvait bien faire le fier, au fond, tout ça le faisait littéralement « chier ». Et c’était le but.

Bien sûr que non, il ne l’avait pas « baisé ». Cela n’avait aucun intérêt pour lui de l’avoir elle alors qu’en sortant, il pouvait en avoir des tas d’autres. Hanae ne l’intéressait pas. Elle était mignonne, mariée mais trop « moisi » désormais. Dés qu’une femme franchit les barrières du mariage, de l’amour, elles ne servent plus à rien... Elles deviennent tellement niaises. Et Shin refusait de s’envoyer - littéralement - en l’air avec une fille pour qui, il n’éprouvait que de la pitié. Elle ne valait rien et était bonne à jeter. Il avait pensé à le faire, c’était la raison pour laquelle il l’avait laissé partir sans jamais reprendre contact auprès d’elle néanmoins elle pouvait encore lui être utile. La preuve en ce jour.

- Je suis sûr que ton ex-femme serait ravi d’entendre comment tu parles d’elle, Répondit le professeur avec le même sourire hypocrite que son vis-à-vis.

Que pouvait-il lui dire d’autre ? Hormis le fait que oui, il avait pu l’avoir et que ça avait été un « coup d’enfer ». Ceci dit il n’aurait aucune preuve de ce qu’il avançait puisqu’il n’avait pas pu tester. Juste voir certaines choses qui, en temps réel, il n’aurait jamais du voir.

S’allumant une cigarette et s’emparant d’un cendrier, le garçon quitta le bar pour venir s’installer auprès de l’autre NSA. D’abord, il laissa le silence prendre place dans la pièce pendant qu’il inhalait quelques bouffées de nicotine.

- Mais qu’est-ce que tu préférerais entendre, Ryuhei ? Que je n’ai pas réussi à l’avoir ou qu’au contraire, j’ai tellement réussi que j’ai même pu entrevoir sa petite marque en forme de lune. Tu sais... Juste là.

Pour justifier ses mots, il désigna le bas de ses reins, un peu au-dessus de ses fesses. Une tâche de sa naissance qu’il n’aurait jamais pu apercevoir en temps normal. Il n’avait pas besoin d’expliquer comment il l’avait vu... La question ne se posait même pas. Non, il n’avait rien fait avec elle mais il avait fallu qu’il soit très proche d’elle pour la voir et surtout... Qu’Hanae soit nu. Ce qui signifiait qu’il n’y avait pas trente six milles façons pour qu’une femme et un homme se déshabille n’est-ce pas ? Du moins, pour tout homme qui se respecte, il y verrait l’évidence alors qu’au bout du compte ce n’était pas le cas. Mais du moment que Ryuhei tombait dans le panneau, c’était le principal.

- J’ai trouvé ça mignon... Mais c’était cool, vraiment. Ne t’en fait pas, je l’aime bien ta petite Hanae... Puis comme tu l’as dit, c’est un coup d’enfer. Pourquoi s’en priver ?

Il haussa les épaules et écrasant son mégot, le jeune homme se leva. Il le regretterait un jour sûrement, peut-être même maintenant. Mais il n’en avait que faire. Au moins lui, il vivait en se distrayant. Le reste n’avait pas d’importance.

Mon ex-femme devait bien se ficher de ce que j'étais entrain de dire. Comme je me fichais de ses petites leçons de morales. Mon regard se posa sur lui d'un air mécontent en le voyant s'approcher, tentant de le désintégrer par la pensée... Mais bien sûr, c'était peine perdue. Je continuais silencieusement ma lecture, en sachant très bien qu'il allait reprendre la parole et me chercher, inlassablement. Et je voyais bien, sauf que je n'aurais pas pensé qu'il chercherait aussi clairement. Ah, j'avais envie de le démantelé, sans même discuter davantage. Il avait couché avec Hanae. Elle avait donné son corps à cette espèce d'ordure, de moins que rien. Rien que d'imaginer, ça me dégoûtait. J'avais envie de lui arracher les yeux pour le forcer à se la fermer.

Mais je ne fis rien, comme d'habitude. Je savais qu'il cherchait à m'énerver. À la place, je me contentais de lire, souriant légèrement en l'écoutant. Oui, sa marque en forme de lune... Très jolie, d'ailleurs. Je n'étais pas le seul à craquer devant. Ça faisait... Plaisir ? Non, pas vraiment. Mais lui accorder le plaisir de me voir énervé, il ne l'aura eu qu'une seule fois.

-C'est vrai, j'ai toujours aimé sa petite lune. Ça lui donnait un petit côté mignon, même quand elle se la jouait tigresse. J'suis content de partager ça avec toi, t'sais j'ai l'impression que ça tisse des liens.

Beau sourire, petite tape sur l'épaule. Voilà. Il pouvait être content s'il voulait, se dire dans sa tête qu'il avait réussi son coup puisque j'étais exaspéré, qu'il me soûlait clairement et que j'avais envie de le tuer. Mais ça n'avait pas énormément d'importance.
Ne supportant plus la proximité que nous avions, je me levais, m'approchant de la fenêtre sur le rebord de laquelle je posais mon livre, me tournant finalement pour voir sa sale tête de con. Je lui souris un peu, penchant ma tête sur le côté.

-Tu sais, bien sûr que ça m'énerve quand tu dis ce genre de truc, tes conneries de lune, tout ça. Et ça m'énervera toujours.

Oh oui, c'est ça, que je lui dise que ça m'énerve pour qu'il continue encore et toujours ! Mais autant le lui dire, ouais, ça m'énervait, mais sans doute à moindre échelle comparé à ce qu'il aimerait. Et je me félicitait pour ça d'ailleurs. Regardant furtivement par la fenêtre, je reposais mon regard sur lui à nouveau.

-Mais au fond, y'a pas grand chose à jalouser. J'ai bien plus vécu dans ma vie, j'ai été plus heureux, j'ai eu plus d'expérience aussi probablement, dans un tas de domaines, bonnes ou mauvaises... Je sais que tu vas me dire que tu t'en fou de ça, que limite, ça peut te faire rire. Mais il n'empêche que tu as beau me dire des trucs comme ça... Elle m'a aimé, m'a épousé, et je pouvais me la taper autant que je voulais sans qu'elle ait besoin d'être triste et désespérée. T'es un pauvre gars, Shinji, qu'est-ce que tu veux ?

Je ne pus m'empêcher de rire un peu, haussant les épaules avant de retirer mes lunettes que je rangeais dans une petite pochette, reprenant mon livre. Pour rien au monde je n'aimerais échanger ma place avec lui. J'étais peut-être stupide, naïf, complètement à côté de la plaque en général avec un humour douteux et une facilité déconcertante à me mettre dans le pétrin, mais je n'avais pas besoin de faire le malheur des autres pour me trouver une once de bonheur personnel. À mon sens, les types comme Shinji, c'est ceux qui se suicideront avant d'avoir 40 ans, seul dans un appart dégueulasse et qu'on retrouvera quatre mois plus tard... Pas à cause du manque, à cause de l'odeur répugnante qui traverse les murs.

Il ignorait pourquoi il faisait ça en réalité ni quel plaisir ou satisfaction cela lui apportait, juste qu’il aimait ça. Il avait toujours aimé ça. Il n’avait jamais apprécié qu’on essaie de le commander, de choisir sa vie à sa place alors en contrepartie, il dominait celles des autres. Puis un jour, il atteindrait le sommet. Il serait même plus haut que Terazawa et plus encore. Parce qu’ils étaient tous des idiots. Ryuhei le premier. Quoi qu’il lui raconte, le jeune homme tombait dans le panneau bien qu’il n’avait pas tout à fait tort. Il avait eu cette chance là certes, sauf que Shinji n’avait vraiment voulu coucher avec son ex-femme, il avait simplement souhaité s’immiscer entre les deux. Il y avait une différence entre agir, mentir et jouer la comédie. C’était plus amusant ainsi. A force, personne ne pouvait savoir si ce qu’il racontait était vrai ou faux. Un jour peut-être que ça lui retomberait dessus néanmoins le professeur n’en avait que faire, il connaissait ses valeurs et c’était le plus important.

Ryuhei était juste pitoyable avec son petit dialogue sur l’amour, ça lui faisait presque de la peine que Shinji se mordait la lèvre pour ne pas rire. C’était méchant, cruel, de se moquer toutefois il le méritait. On devrait le féliciter et l’applaudir parce qu’il s’était marié ? Et puis quoi encore ? Il n’avait rien accompli d’extraordinaire. Il avait juste eu le plaisir de sauter une belle femme sauf que, au cas où, il ne l’aurait pas remarqué, il y en avait des tas d’autres ailleurs.

- Qui a dit que j’ai attendu qu’elle soit triste et désespérée ? Reprit Shinji en souriant.

Parce qu’il n’avait jamais mentionné une telle chose. Certes, au vue de l’énergumène, cela aurait pu être possible néanmoins c’était sa fierté qui en prendrait un petit coup donc non, jamais il ne ferait cela. Profiter d’une femme sans défense pour assouvir ses désirs même si ça avait un petit côté excitant. Jamais.

- Vous êtes divorcé depuis un moment non ? Elle n’allait pas rien faire en t’attendant, Ryuhei. Soit un peu honnête avec toi-même, s’il te plaît.

Le pire était probablement que depuis le début de la conversation, pour une fois, le professeur était sérieux dans ce qu’il racontait. Même s’il ne s’agissait pas de lui, Hanae n’était pas une sainte et d’autres relations, évidemment qu’elle en avait eu.

- Après je suis peut-être un pauvre gars, Dit-il avec un grand sourire avant de lui tapoter l’épaule, Mais si ça peut te rassurer, tu es encore pire que moi. Sauf que tu n’as pas l’air de t’en rendre compte. Bonne chance pour la reconquérir en tout cas !

Au vue de comment il parlait d’elle, c’était l’évidence qu’il en pinçait encore pour cette femme. Et c’était ça, le plus misérable.

Comme si j'étais stupide et que j'avais sincèrement imaginé qu'elle ne verrait personne après notre divorce. Je souris un peu, manquant de rire. Elle avait un petit-ami il y a peu encore. C'est dingue comme il était paniqué. Plus que m'énerver, il me faisait de la peine, on dirait plus un gignole qu'un vrai méchant. Je ne sais même pas s'il s'en rendait compte. J'avais juste envie de rire en l'écoutant, tellement j'en avais plus rien à faire de ses remarques.

C'était lui le pauvre gars, mais je ne comptais pas lui faire la remarque. J'arriverais à reconquérir Hanae, parce que j'étais tout ce qu'il n'était pas. J'avais de l'humour, déjà, et j'étais tout ce qu'il n'était pas. J'étais bien mieux que ce qu'il s'imaginait, bien mieux que ce qu'il ne sera jamais. J'étais humain et ça pourrait étonner, mais ça avait ses charmes. C'était plus charmant que d'être un type pitoyable.

-Si ça peut te faire plaisir de te dire tout ça Shin... Si ça peut te faire plaisir.

Je lui souris, l'air méprisant avant d'aller chercher mon sac, préparer mes affaires. Je ne comptais pas rester plus longtemps ici. Il voulait parler d'Hanae, qu'il le fasse. Je m'en battais totalement de ce qu'il disait, ce qu'il pensait. C'était moi qu'elle avait été assez folle pour épouser alors il pouvait me dire ce qu'il voulait, il n'avait compté que de façon infime. Rien à jalouser.

-Bonne journée, même si tu dois te supporter, donc ça risque d'être merdique. Courage, donc.

Sans rien dire de plus, j'agitais ma main en sa direction avant de quitter la salle, pour aller directement à la porte du QG. Il était temps que je rentre me changer, je travaillais ce soir. J'avais mieux à faire que ces conneries de NSA, bon sang.