Les congés avaient finalement étaient très court. Et pas de tout repos. J'avais regagné Nishinaka, ayant déjà en tête la montagne de boulot que je devrais rattraper au QG. Ouai, on donnait facilement des vacances, dans la mesure où vous assumiez votre retard ensuite. Et pour cause, depuis mon retour je n'avais pratiquement jamais quitté mon bureau. Des piles de dossiers "Denshou" trainer ça et là sur mon bureau, tandis que mon ordinateur n'avait pas eu, lui non plus, une nuit de repos.
Aujourd'hui devait être la première fois que je voyais le soleil depuis des jours. J'avais bien avancé, je me permettais donc de sortir pour la journée. De toute façon, mon métier consistait aussi à être sur le terrain. J'avais l'habitude d'être enfermé, au QG ou chez moi pour écrire, mais mon frère me le repprochait trop souvent. Il n'avait pas tout à fait tort ... Je connaissais une autre personne que m'aurait réprimandée. Malheureusement, celle-ci n'était plus là depuis longtemps.

Pour l'occasion, j'avais sorti la moto. Une fois mon casque sur la tête, direction le centre ville. C'était le genre d'endroit vivant et bondé de monde, mais où l'on trouvait toujours son bonheur, quoique que l'on cherchait. Enfin, materiellement parlant. J'avais bon espoir de trouver un CD sympa pour égayer mes heures au bureau. L'ambiance morte de la pièce plongée dans le silence et uniquement rythmée par le bruit du clavier commençait à me peser. J'avais vraiment besoin de me décontracter. Je remarquais avec consternation que j'étais facilement tendu ces derniers temps ... Je sortais peu, seulement pour remplir ma mission de NSA et râler pour un rien. Il était grand temps que reprenne ma vie en main.
Sans m'en rendre compte, plongé dans mes pensées, j'avais atteint le rayon musique. Mes yeux passèrent d'une catégorie à une autre, à la recherche de piste qui pourraient susciter mon intérêt. C'était peut-être ça qui manquait à ma vie ... De la musique, ou l'art en général. J'avais tout laissé tomber après le lycée pour me concentrer sur mes études en informatique. Tout ce qui me restait de cette époque, c'était voir mon frère dansait et excercer sa passion. Cela avait peut-être été une erreur pour moi d'arrêter ... Je n'avais plus rien pour exterioriser toutes mes pensées négatives. Tandis que je saisissais un casque pour en écouter le morceau, je songeais à retrouver la guitare perdue dans la maison ... Qui sait ? Peut-être que ça me ferait du bien de m'y remettre.

Je m'étais laissé absorbé par toutes ces reflexions, coupé du monde exterieure grâce à la barrière du son. Mon regard était vaguement posé sur mes doigts qui tapaient le présentoir au rythme de la musique. Mais un sentiment d'être observé me fit machinalement lever les yeux, comme par reflexe. Ils se posèrent sur une jeune femme en face de moi, qui semblait me fixer avec insistance. Mes sourcils se froncèrent légèrement, alors que son visage me parut familier. Un vague sentiment de nostalgie s'empara de moi, comme si mon esprit s'en était rappelé avant mon cerveau. Petit à petit, mes yeux s'arrondirent tandis que l'image d'une jeune fille s'imposa à moi, dans un cadre également familier et évocateur de douloureux souvenir. C'était la résidence des Sôma, la résidence de Miura. Et cette gamine en faisait partie. Cette gamine ressemblait trait pour trait à cette fille qui me dévisageait depuis de longues secondes. Les lèvres de cette dernière se mirent à bouger, mais aucun son ne me parvint ... Seule la musique qui tournait encore dans mes oreilles. Comprenant qu'elle s'adressait à moi, je l'imitais en retirant mon casque et elle réitéra sa question. Son sourire, je le reconnaissais plus que jamais. C'était évident maintenant ... Ce n'était plus cette gamine que j'avais connu quand je me rendais là-bas. Cela faisait cinq ans. Elle avait eu le temps de grandir ...

Alors dans un premier temps, je hochais doucement la tête, comme incapable de parler. Je n'avais plus de doute sur son identité, mais j'ignorais si c'était une bonne chose de la recroiser. En tout cas, mon coeur lui, souffrait d'une pointe lancinante, refusant de se remémorer tout ce que cette fille signifiait.

« Mikan ... Sôma Mikan, je me trompe ? »

De son côté, elle n'avait pas l'air de se poser toutes ses questions. Elle semblait juste heureuse de recroiser un fantôme. Alors, poliment, je lui rendis son sourire. A l'époque, je m'entendais bien avec elle, et au fond, je me sentis soulagé qu'à premier vue, cela ne sembla pas avoir changé.

« Tu as grandi. » soufflais-je simplement.

Oui, elle était loin la jeune fille de quinze ans que j'avais quittée à la résidence. C'était pour cela que j'avais mis autant de temps à comprendre ... Mikan était devenu une jolie femme.